Un record absolu de pollution atmosphérique a été battu ces derniers jours à New Delhi, en partie dû aux pétards utilisés pour la fête des lumières, Diwali. | MONEY SHARMA / AFP

Les trois jours de fête célébrant Diwali, la fête des lumières qui marque le Nouvel An hindou, resteront marqués d’une pierre noire cette année à New Delhi. Lundi 31 octobre, alors que les derniers pétards et feux d’artifice explosaient peu après minuit, la capitale de l’Inde a littéralement étouffé dans un brouillard toxique.

L’agence gouvernementale indienne de prévision et de recherche sur la qualité de l’air (Safar) a vu avec effarement la concentration en particules fines PM 2,5 franchir la barre des mille microgrammes par mètre cube, alors que le seuil admissible pour la santé humaine est fixé par l’Organisation mondiale de la santé à soixante microgrammes. L’agglomération est certes connue pour être l’une des plus polluées au monde mais, cette fois, un record absolu a été battu.

Le Safar est formel : « 60 % à 70 % de la fumée » qui est allée jusqu’à s’insinuer dans les tunnels du métro était due aux pétard de Diwali, et non aux conséquences habituelles de l’urbanisation croissante, de l’activité des centrales électriques au charbon et de la circulation des moteurs au diesel.

Les autorités publiques s’y attendaient. Vendredi 28 octobre, elles avaient demandé à la population de renoncer à la tradition des pétards. Le gouvernement de la région capitale avait aussi annoncé une décision inédite : installer des purificateurs d’air aux grands carrefours du centre ville.

Le ministre de la santé local, Satyendar Jain, a précisé qu’une expérimentation serait menée « d’ici un mois ou deux », en vue de « réduire le taux de pollution » en cinq points névralgiques du réseau routier : les gares routières d’Anand Vihar et de Sarai Kalen Khan, le quartier IPO, la porte du Cachemire et l’hôpital AIIMS.

Jusqu’à présent, ce sont les purificateurs d’air intérieur qui connaissaient un engouement très fort au moment de Diwali et à l’approche de l’hiver, lequel plonge tous les ans New Delhi dans un épais brouillard. Même si les médecins restent sceptiques quant à l’efficacité de ces équipements, les fabricants comme Sharp ou Panasonic disent avoir vu leurs ventes plus que doubler en novembre 2015. Cette année, ce sont les pouvoirs publics qui se laissent tenter, pour purifier non plus l’air intérieur, mais extérieur.

Dix mille à trente mille morts chaque année

Dans les rues de New Delhi, au lendemain de Diwali, la fête des lumières, le 31 octobre. | MONEY SHARMA / AFP

Selon Satyendar Jain, qui est architecte de profession, la ville de Pune, dans l’Etat du Maharashtra, aurait déjà obtenu des résultats intéressants de cette façon. Les systèmes qui seront testés prochainement dans la capitale, aux heures de pointe de la circulation automobile, seront capables de réduire « de 40 % à 60 % » la quantité de monoxyde de carbone et de particules en suspension, « dans un rayon compris entre vingt et trente mètres », affirme le ministre. Ils ont été mis au point conjointement par l’Institut national de recherche en ingénierie environnementale (Neeri) de Nagpur et par l’Institut indien de technologie (IIT) de Bombay.

En outre, les autorités ont décidé de tester un brumisateur géant à un autre grand carrefour de la ville. La brume vaporisée dans l’air contribuera à fixer les particules et pourrait, toujours selon Satyendar Jain, diminuer significativement la quantité de particules fines PM 2,5 et PM 10, considérées comme responsables de la forte augmentation des cas de bronchite chronique, de cancer du poumon et de maladies cardiaques.

Certains habitants de New Delhi dénoncent des mesures « cosmétiques ». D’autres assurent que le gouvernement régional, dirigé depuis bientôt deux ans par une formation populiste, le Parti de l’homme ordinaire (AAP), cherche à faire oublier « l’échec » de la circulation alternée, expérimentée à deux reprises cette année et jugée inefficace par le tribunal « vert », une juridiction créée en Inde en 2010 pour régler les litiges en matière d’environnement.

Selon le Centre pour les sciences et l’environnement, 10 000 à 30 000 personnes meurent chaque année de la pollution de l’air à Delhi. Et dans un rapport publié à quelques jours de la conférence de l’ONU sur le climat organisée à Marrakech, au Maroc, l’Unicef a fait savoir que sur les 2 milliards d’enfants respirant un air vicié sur la planète, un tiers vit dans le nord du sous-continent. Tous âges confondus, la pollution atmosphérique est aujourd’hui la cinquième cause de décès en Inde.