Alstom : un mois après Belfort, des résultats financiers flamboyants
Alstom : un mois après Belfort, des résultats financiers flamboyants
Par Éric Béziat
En un semestre, le carnet de commandes du groupe ferroviaire s’est enrichi de plus de 6 milliards d’euros de contrats.
Il y a de quoi sabrer le champagne ! Mercredi 9 novembre, un bon mois après la fin de « l’affaire Belfort », Alstom a publié des résultats semestriels record. Entre le 1er avril et le 30 septembre, soit durant les six premiers mois de son année fiscale 2016-2017, le groupe a enregistré une vive croissance. « Alstom a démarré l’année avec d’excellents résultats », a commenté sobrement Henri Poupart-Lafarge, le PDG du groupe ferroviaire. De fait, Alstom présente là son meilleur exercice semestriel depuis 2014, lorsque la vente de la branche énergie à General Electric (GE) a transformé l’entreprise en une société strictement centrée sur l’industrie du rail.
La lecture des tableaux de chiffres suffit à souligner l’aspect éclatant de ces résultats. A commencer par l’envol des commandes reçues sur la période. Elles atteignent 6,2 milliards d’euros, en hausse de 60 % par rapport au semestre précédent, portant le carnet de commandes d’Alstom à un niveau jamais-vu jusqu’ici de 33,6 milliards d’euros.
Chiffre d’affaires (3,57 milliards), résultat d’exploitation (200 millions), résultat net (128 millions), marge d’exploitation (5,6 %), tous les indicateurs sont au vert par rapport à la même période de 2015. La trésorerie exceptionnelle de 333 millions d’euros (à comparer au cash-flow négatif de 1,3 milliard en 2015) devrait, en particulier, réjouir les marchés. Cette petite cagnotte, en s’ajoutant au gros trésor de guerre de plus de 2 milliards d’euros issus de la vente de la branche énergie à GE (et dont Alstom pourra disposer en 2018), fournira une belle force de frappe au groupe français dans moins de deux ans.
« Ces résultats démontrent le succès de la stratégie d’Alstom », se félicite Henri-Poupart Lafarge. Une politique au plus près du client qui a permis d’engranger des contrats phares à l’étranger : vente du train à grande vitesse Avelia Liberty pour 2 milliards de dollars (1,78 milliard d’euros) à la société des chemins de fer américaine Amtrak ; marché de l’extension de la ligne Rouge du métro de Dubaï (2,6 milliards d’euros).
A cela se sont ajoutés des succès commerciaux moins spectaculaires mais tout aussi rémunérateurs : des trains régionaux en Italie et aux Pays-Bas, un train pendulaire également en Italie, des métros au Pérou… Le groupe se félicite aussi de la prédominance des activités les plus profitables (signalisation, services et systèmes), qui représentent 54 % du chiffre d’affaires.
Succès paradoxal
Ce succès peut apparaître comme paradoxal, car, en septembre, au moment où l’entreprise bouclait ce semestre idéal, Alstom défrayait la chronique en annonçant la fermeture de son site historique de Belfort faute d’activité. L’usine sera finalement sauvée par une commande publique sur mesure de 23 TGV au total.
Un cadre d’Alstom souligne ainsi :
« Les résultats sont bons, certes, mais si on regarde plus finement, toutes les planètes ne sont pas complètement alignées. En zoomant sur certains marchés, on s’aperçoit qu’il y a eu des difficultés passagères. C’était le cas au Brésil par exemple. C’était aussi le cas en France. »
De plus, l’emploi dans les usines françaises d’Alstom profite relativement peu de ses conquêtes à l’étranger. Faire fabriquer sur place est d’ailleurs souvent une condition pour emporter le contrat. Le TGV américain sera construit aux Etats-Unis, les trains italiens produits dans les usines transalpines du groupe français.
Il n’en reste pas moins que l’année fiscale 2016-2017 s’annonce comme un cru exceptionnel pour Alstom. Il faudra, pour confirmer l’exploit, que le second semestre soit à la hauteur du premier. La commande publique française participera largement de cet effort. Outre les trains achetés par la SNCF pour sauver Belfort, Alstom sera – avec Bombardier – le bénéficiaire du contrat géant de 3,7 milliards d’euros pour fabriquer 271 RER nouvelle génération (NG), la SNCF venant de notifier à son concurrent, la société espagnole CAF, qu’il était écarté de l’appel d’offres. A l’étranger, Alstom espère beaucoup dans les mois qui viennent d’un gros contrat de métro à La Mecque, comportant la livraison du matériel roulant et la fourniture du système informatique.