Les employés de Megabus manifestent devant Bercy, le 18 novembre 2016. | LIONEL BONAVENTURE / AFP

Des chauffeurs de Megabus en grève ont manifesté devant le ministère de l’économie, vendredi 18 novembre, pour réclamer un plan social à la hauteur du « préjudice subi ».

Lancée dans le sillage de la libéralisation du marché créée par la loi Macron, la compagnie Megabus, qui emploie 175 salariés, cessera prochainement ses activités, privée de son unique contrat de prestation avec l’allemand Flixbus.

Après l’échec, à l’aube, d’une opération escargot sur le périphérique parisien, une quarantaine de grévistes se sont rassemblés à la mi-journée devant Bercy, où une délégation était reçue, pour demander « un appui » de l’Etat dans le cadre des négociations, dont la prochaine réunion aura lieu mercredi 23 novembre. Benoît Hamon et Gérard Filoche, candidats à la primaire de la gauche, étaient présents pour les soutenir.

« C’est une banqueroute organisée », dénonce Mohammed Ouhnache, élu UNSA. « A aucun moment nous n’acceptons les dires de la société disant ce n’est pas viable. Sur ce marché, il ne faut pas s’attendre à être bénéficiaire tout de suite. » Le syndicat réclame 50 000 euros net pour chaque employé contre 2 000 euros proposés actuellement.

« Megabus, c’est une coquille vide »

« Les négociations sont au point mort » et les mesures d’accompagnement ne sont pas à la hauteur du « préjudice subi », estime pour sa part Natasha Pinçon, représentante du personnel. « On nous remercie en nous prenant pour des mendiants », renchérit un délégué de la CGT, qui espère obtenir un plan de reclassement, sans vraiment trop y croire.

« Megabus, c’est une coquille vide en France ! Personne ne serait assez bête pour l’acheter », se désole-t-il. Selon les syndicats, la compagnie ne possède ni bus, ni dépôt, préférant passer par la location. Il y a un an, « ils nous ont démarchés », « vendu du rêve ». « On a tous quitté des CDI », rappelle le délégué CGT, pour aujourd’hui « nous dire merci, au revoir ».

« Nous sommes pleinement conscients que nos collaborateurs traversent une période d’incertitude quant à leur devenir », a répondu la direction de Megabus dans une déclaration transmise à l’Agence France-Presse.

Le mouvement de grève, a-t-elle ajouté, « n’est pas dans l’intérêt des salariés, et nous craignons qu’il ne compromette les efforts que nous déployons dans la recherche de la meilleure solution possible ».

40 millions d’euros de chiffre d’affaires

Réputée pour ses billets à 1 euro, la compagnie a changé de mains à la fin de juin, quand le groupe de transports britannique Stagecoach a cédé toutes ses activités en Europe continentale à l’allemand Flixbus. Mais sitôt finie la saison estivale, Flixbus a décidé de résilier son contrat en France avec son ancien concurrent.

Pour les syndicats, la loi Macron qui a libéralisé le secteur du transport par autocar en 2015 est responsable de cette situation. En laissant entrer « la concurrence sauvage sur les lignes de bus », elle a ouvert la porte au « non-respect des salariés », déplore la CGT.

Ce « dommage collatéral » montre « les limites [de] la libéralisation à outrance », renchérit le SNTL-UNSA, qui juge « inéluctable que le cas Megabus ne [soit] pas unique ».

Pour Emmanuel Macron, la faute revient avant tout à l’entreprise, « qui a voulu se développer en cassant les prix [et] se retrouve en situation difficile ». « Son activité sera reprise par d’autres. C’est immanquable quand un marché se développe », a déclaré l’ex-ministre de l’économie, visiblement optimiste.

Il est vrai que le succès commercial des « cars Macron » est indéniable : 3,4 millions de passagers transportés et 40 millions d’euros de chiffre d’affaires en moins d’un an, selon le décompte arrêté à la fin de juin par l’Arafer, l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières.o

Mais les autocaristes sont encore loin d’être rentables. Le plus optimiste, Flixbus, dit qu’il atteindra l’équilibre financier l’an prochain. Son principal concurrent, Ouibus (filiale de la SNCF), prévoit d’y parvenir au mieux en 2018, tandis que l’outsider Isilines (filiale de Transdev) se donne « quelques années » pour dégager des profits.