TV : « Pilules bleues », un amour dans l’ombre du sida
TV : « Pilules bleues », un amour dans l’ombre du sida
Par Véronique Cauhapé
Notre choix du soir. Jean-Philippe Amar signe un téléfilm d’une grande pudeur sur un couple naissant confronté à la maladie (sur Arte à 0 h 10).
Pilules bleues
Durée : 01:01
Jean-Baptiste (Guillaume Gouix) croise Laura (Florence Loiret-Caille) dans une fête. Il l’a jadis admirée. En ce soir de Nouvel An 1999, il est à nouveau sous le charme. Elle est divorcée et mère d’un petit garçon de 6 ans. Ils se revoient, se plaisent. Lorsque Laura lui révèle qu’elle et son fils sont séropositifs, il ne recule pas et s’engage avec détermination dans cet amour que le téléfilm ancre vite dans un quotidien où la maladie tient la place d’un personnage, invisible et terriblement présent.
Cela n’empêche pas les bonheurs de se vivre, les corps de s’étreindre avec fougue, les projets de se concevoir. Laura et Jean-Baptiste ne s’interdisent rien. Ils intègrent et font avec la réalité du sida, les combats et les peurs auxquels il contraint.
Gravité, humour et poésie
L’histoire d’amour écrite, pour ce téléfilm, par Charlotte Sanson et Jean-Philippe Amar, est celle de Frederik Peeters qui la raconta dans une bande dessinée en noir et blanc parue en 2001 chez Atrabile, où se mêlaient gravité, humour et poésie. Son adaptation à l’écran reste fidèle à l’ouvrage, en grande partie grâce à la réalisation de Jean-Philippe Amar qui, sans jamais perdre sa retenue, rend compte d’une histoire intime, à la fois sentimentale et crue, forte et fragile, préoccupante et drôle.
Pilules bleues traduit en image la grâce et la subtilité de la bande dessinée, dont la création est intégrée dans le film, avec des dessins recréés pour l’occasion par Frederik Peeters.
Timothé vom Dorp et Guillaume Gouix | © Marion Poussier
Ce rappel de l’œuvre originale fait le lien entre l’auteur et l’adaptation de son histoire. Il permet aussi de rendre compte de l’acte de création auquel se plie le personnage de Jean-Baptiste. Un acte de création dont font également preuve, de manière à la fois prosaïque et intuitive, les deux amants confrontés à une maladie qui les pousse, chaque jour, à composer, chercher la juste place dans ce paysage singulier qui est le leur.
Interprètes magnifiques, tout en pudeur et douceur, Guillaume Gouix et Florence Loiret-Caille nous offrent un pas de deux réglé au cordeau, où les corps s’unissent, s’embrasent et se séparent sans jamais s’éloigner vraiment. Un duo subtil à la hauteur d’une histoire belle comme le jour, sans pathos ni faux-semblants.
Pilules bleues, de Jean-Philippe Amar. Avec Guillaume Gouix, Florence Loiret-Caille, Benjamin Bellecour (Fr., 2014, 105 min).