De gauche à droite, Fidan Dogan, Leyla Soylemez et Sakine Cansiz, les trois militantes kurdes assassinées le 9 janvier 2013 à Paris, dans les locaux du Centre d’information du Kurdistan (10e arrondissement). AFP PHOTO / KURDISH INSTITUTE | AFP PHOTO / KURDISH INSTITUTE

Omer Güney, assassin présumé de trois militantes kurdes à Paris en janvier 2013, est mort samedi matin à la Pitié-Salpêtrière, avant son procès devant la cour d’assises, a appris l’AFP de source judiciaire.

Atteint d’une grave maladie au cerveau, ce Turc de 34 ans était le seul suspect renvoyé devant la cour d’assises spéciale de Paris pour « assassinats en relation avec une entreprise terroriste ». Son décès a pour effet d’éteindre l’action publique à son encontre, mettant fin de fait à la tenue de son procès qui était prévu du 23 janvier au 24 février 2017.

Des familles « privées d’un procès public »

Le 9 janvier 2013, en plein jour, trois activistes kurdes, dont Sakine Cansiz, l’une des fondatrices du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), avaient été froidement abattues de plusieurs balles dans la tête dans un appartement hébergeant un centre communautaire kurde, rue La Fayette, dans le Xe arrondissement de Paris.

Les avocats des parties civiles ont fait part dans un communiqué de la « colère des familles des victimes, privées d’un procès public qu’elles attendaient depuis près de quatre années, familles, qui, elles, avaient foi en la justice française ». Ils ont exprimé leur « consternation de voir qu’une fois de plus, la France n’est toujours pas capable de juger un crime politique commis sur le territoire français par des services secrets étrangers », selon ce communiqué signé des avocats Sylvie Boitel, Antoine Comte, Virginie Dusen, Jan Fermon et Jean-Louis Malterre.

Infiltré pour « éliminer des cadres du PKK »

Les enquêteurs français avaient conclu à « l’implication » de membres des services secrets turcs, le MIT, dans ce triple assassinat, selon une source proche du dossier. Mais ils restaient prudents sur le degré d’implication du MIT et sur l’identité du donneur d’ordre. Comme l’écrivait le parquet à l’été 2015, lors de sa demande de renvoi définitif du procès de M. Güney en cour d’assises, l’instruction n’a pas permis d’établir si ces agents avaient agi « avec l’aval de leur hiérarchie » ou « à l’insu de leur service afin de le discréditer ou de nuire au processus de paix », entamé à l’époque entre Ankara et le PKK.

Durant l’instruction, Omer Güney a nié les faits malgré de nombreux éléments à charge : la vidéosurveillance l’a filmé entrant dans l’immeuble de la rue La Fayette peu avant les crimes, l’ADN d’une des victimes a été retrouvée sur sa parka et sa sacoche contenait des traces de poudre.

L’accusé, ancien agent d’entretien à l’aéroport de Roissy, s’était rapproché fin 2011 d’associations kurdes en région parisienne. Décrit par ses proches comme un Turc ultranationaliste, il avait infiltré cette mouvance « dans un but de surveillance et d’espionnage » avec pour mission « d’éliminer des cadres du PKK », d’après la source proche du dossier. Les services secrets turcs ont officiellement démenti en janvier 2014 tout rôle dans les assassinats.