Donald Trump entretient le trouble sur le nucléaire militaire
Donald Trump entretient le trouble sur le nucléaire militaire
Par Gilles Paris (Washington, correspondant)
Dans un tweet diffusé jeudi, le président élu américain a plaidé pour un renforcement de la capacité nucléaire des Etats-Unis.
Donald Trump, le 15 décembre. | EVAN VUCCI / AP
Le président élu Donald Trump a-t-il annoncé un changement stratégique sur l’armement nucléaire dans un message de 140 signes publié jeudi 22 décembre ? En assurant d’une formule assez vague que « les Etats-Unis doivent grandement renforcer et accroître leur capacité nucléaire tant que le monde n’aura pas retrouvé la raison dans le domaine des armes nucléaires », M. Trump a donné l’impression de tourner le dos à la politique de dénucléarisation engagée par Barack Obama, avec il est vrai des effets mitigés.
The United States must greatly strengthen and expand its nuclear capability until such time as the world comes to its senses regarding nukes
— realDonaldTrump (@Donald J. Trump)
Contactés pour plus de précision, ses conseillers avaient tenté de nuancer le propos du magnat de l’immobilier en assurant qu’il ne visait que la lutte contre la prolifération. Mais M. Trump aurait renchéri vendredi lors d’une conversation avec une journaliste de la chaîne d’information MSNBC, Mika Brzezinski. « S’il le faut, il y aura une course à l’armement », aurait-il déclaré, selon des propos rapportés par la journaliste. Evoquant les rivaux des Etats-Unis, M. Trump aurait assuré, selon la même source : « Nous les dépasserons à chaque étape et nous leur survivrons. »
Peu familier des dossiers géostratégiques
Interrogé sur NBC, le futur porte-parole de la Maison Blanche, Sean Spicer, nommé la veille, a indiqué qu’« il y a des pays autour de la planète en ce moment qui parlent d’augmenter leurs capacités nucléaires ». « Les Etats-Unis ne vont pas observer ça de loin et permettre que cela arrive sans agir en conséquence », a ajouté M. Spicer. Interrogé pour savoir s’il visait la Russie, il a ajouté : « Je parle de la Russie. Il ne s’agit pas seulement d’un pays, mais de n’importe quel pays. » Le futur porte-parole a cependant exclu la perspective d’une course à l’armement en assurant que le propos de M. Trump visait précisément à l’éviter de manière préventive.
Le milliardaire avait publié son message, jeudi, quelques heures après l’annonce par le président russe, Vladimir Poutine, du renforcement en 2017 de la force de frappe nucléaire de son pays. M. Poutine a indiqué qu’il souhaitait la rendre capable de défier tout système de défense antimissile, comme celui que Washington entend déployer en Europe orientale. Vendredi, lors d’une conférence de presse, le président russe a estimé que le message de M. Trump ne comportait « rien de nouveau ».
Peu familier des dossiers géostratégiques, M. Trump ignorait manifestement la signification du terme de triade, pour désigner l’ensemble des vecteurs dont dispose l’armée américaine, comme l’avait montré son hésitation lors d’un débat républicain. Il a d’ailleurs multiplié les déclarations décapantes sur le sujet pendant la campagne. M. Trump ne s’est en effet pas limité à la promesse de moderniser l’arsenal nucléaire rappelée vendredi par M. Poutine. Il a aussi évoqué une nucléarisation du Japon et de la Corée du Sud, pour que ces deux pays prennent en charge leur défense, avant d’assurer qu’il était hostile à la prolifération.
Jeudi, M. Trump avait également utilisé son compte Twitter pour annoncer son intention de rebattre les cartes à propos d’un projet d’équipement de l’armée de l’air jugé trop coûteux. L’action du groupe de défense Lockheed Martin, maître d’œuvre pour le bombardier F-35, avait immédiatement chuté face à la demande faite par M. Trump à son concurrent Boeing d’un chiffrage d’une offre pour son F-18 Hornet. Des sommes sans comparaison cependant avec l’effort budgétaire qu’impliqueraient la modernisation et l’expansion de l’arsenal nucléaire américain.