Gunther Oettinger en septembre 2014. | EMMANUEL DUNAND / AFP

Parodie d’audition ou vrai exercice à risque pour la Commission Juncker ? Günther Oettinger, le controversé commissaire allemand au numérique, était interrogé par les eurodéputés lundi 9 janvier sur le fait de savoir s’il était apte à récupérer le très stratégique portefeuille du budget de l’Union.

Les élus ne devaient se prononcer définitivement que mardi 10 janvier dans la journée, mais déjà la veille, pour nombre d’entre eux, l’affaire était entendue : malgré ses écarts de conduite, le commissaire allemand avait peu de chances de se voir priver de sa nouvelle casquette.

« Bien entendu, les matchs de catch ne sont pas des exercices chorégraphiés ou réglés à l’avance. Alors, Oetti sera-t-il confirmé? Quel suspense ! » s’interrogeaient lundi soir assez justement les Grecques, un collectif de « bas fonctionnaires européens » parodiant depuis quelques mois l’actualité bruxelloise.

Image abimée

Il faut dire que la commission a préparé le terrain pour éviter une déconvenue à son représentant : une audition fixée le jour de la rentrée parlementaire à Bruxelles, laissant un temps de préparation minimal aux élus. Et un commissaire déjà officiellement intronisé au budget par le président Juncker en décembre, en remplacement de Kristalina Georgieva, la commissaire bulgare partie à la Banque mondiale.

Le conservateur allemand avait pourtant défrayé la chronique à l’automne, contribuant à abimer encore un peu plus l’image de Bruxelles, après les affaires Barroso (l’ex-président de la commission parti pantoufler chez Goldman Sachs), et Neelie Kroes (l’ex-commissaire aux avoirs non déclarés aux Bahamas).

M. Oettinger a accepté, sans le signaler comme le veut le réglement, un déplacement professionnel en Hongrie au printemps 2016 dans le jet privé d’un lobbyiste allemand proche des intérêts russes. Il s’est aussi distingué, à l’automne, en tenant des propos jugés racistes à l’égard des Chinois, lors d’une réunion à Hambourg.

Regrets

Devant les élus, il s’est excusé platement : « pour mon discours de Hambourg, je regrette d’avoir tenu ces propos à l’époque, je ne voulais blesser personne». Et a justifié sa supposée proximité d’avec les lobbies : « je me considère comme totalement indépendant vis à vis d’eux. Je suis quelqu’un d’engagé, à l’écoute des intérêts des PME ».

Pour le reste - les questions proprement budgétaires - M. Oettinger n’a pas brillé par sa connaissance du sujet mais n’a pas non plus commis d’impairs. Il a promis « un renforcement de l’OLAF [l’office européen anti-fraude] » , plus de femmes dans les institutions européennes, etc. Ce qu’il risque, au pire ? Une deuxième audition... Car qui a envie à Bruxelles de le déstabiliser et de provoquer une nouvelle crise ?