Le porte-parole de la Maison Blanche au supplice des « faits alternatifs »
Le porte-parole de la Maison Blanche au supplice des « faits alternatifs »
Par Gilles Paris (Washington, correspondant)
Sean Spicer doit désormais défendre devant la presse les affirmations peu étayées par des faits du président Donald Trump, non sans peine.
Sean Spicer a entamé lundi son tout premier point presse quotidien en tant que porte-parole de la Maison Blanche. | NICHOLAS KAMM / AFP
Le nouveau porte-parole de la Maison Blanche, Sean Spicer, a pu éprouver, mardi 24 janvier, l’inconfort auquel expose la défense de « faits alternatifs ». L’expression a été forgée dimanche par une proche conseillère du président Donald Trump, Kellyanne Conway, à l’occasion de la controverse sur le nombre de personnes présentes à la cérémonie de prestation de serment du 45e président des Etats-Unis. M. Trump avait peu apprécié le fait que la presse insiste sur le fait qu’il était moins élevé que pour son prédécesseur Barack Obama, en 2009. Lors de son premier briefing officiel, lundi, M. Spicer avait assuré en réponse à une question sur ce chiffrage que « parfois, on peut être en désaccord sur les faits ».
Recevant quelques heures plus tard les principaux responsables du Congrès, M. Trump a alors répété l’affirmation selon laquelle une fraude massive, qu’il estime entre trois millions et cinq millions de personnes en situation irrégulière, l’aurait privé d’un succès le 8 novembre au niveau du vote populaire. Si M. Trump a remporté un nombre nettement supérieur de grands électeurs au sein du collège électoral, il a par contre été devancé de près de trois millions de bulletins par son adversaire démocrate, Hillary Clinton.
Répéter les éléments de langage
Interrogé à de nombreuses reprises sur cette affirmation rapportée mardi matin par la presse américaine, M. Spicer s’est accroché à ses éléments de langage comme à une bouée : « Le président croit à ce qu’il a dit, il s’inquiète de la fraude, et il continue de le croire, sur la base d’études et de preuves qui lui ont été présentées. » Harcelé, il n’a avancé qu’une seule étude, remontant à 2012, mais ses auteurs avaient déjà fait savoir qu’elle ne concerne pas la fraude électorale.
Pas moyen non plus pour M. Spicer de témoigner en la matière, fort de son expérience d’ancien responsable du Parti républicain. Ce dernier n’a en effet jamais accordé le moindre crédit à cette récrimination de M. Trump. Il s’en est donc tenu contre vents et marées au credo du président.
Question après question, le porte-parole s’est consciencieusement enferré.
« Allez-vous enquêter sur ce qui serait alors un scandale aux dimensions astronomiques ? », lui a demandé l’une de ses bourreaux du jour. « Peut-être que nous le ferons, mais la priorité pour le président est de se concentrer sur l’emploi » , a-t-il esquivé. « A propos de cette enquête… », a poursuivi une autre. « Quelle enquête ? », s’est interrogé M. Spicer. « Celle que vous avez évoquée. » « C’était une question hypothétique, j’ai dit que c’était possible. Tout est possible. »
Lorsque la candidate écologiste Jill Stein avait demandé un recomptage des votes dans trois Etats au lendemain de la présidentielle, elle s’était heurtée à l’opposition de l’équipe de M. Trump. Ses avocats avaient assuré le 1er décembre que « toutes les preuves disponibles montrent que l’élection générale 2016 n’a pas été altérée par la fraude ou par des erreurs ».