A l’hôpital de la Timone, à Marseille, le 11 janvier. | BORIS HORVAT / AFP

Près de 15 000 cas de cancer pourraient être évités chaque année par une amélioration des conditions de vie et de la santé des populations les plus défavorisées, assure une étude publiée mardi 7 février dans le bulletin épidémiologique hebdomadaire de l’agence sanitaire Santé publique France. Ce gain potentiel serait plus important pour les hommes que pour les femmes et maximal pour le cancer du poumon, notent les auteurs de cette enquête.

Un contenu de cette page n'est pas adapté au format mobile, vous pouvez le consulter sur le site web

L’analyse – la première du genre dans l’Hexagone – examine l’influence de l’environnement socio-économique sur l’incidence (nombre de nouveaux cas annuels) de la maladie, qui diffère selon les organes touchés. Elle a porté sur 189 144 personnes, dont 78 845 femmes, qui ont eu un cancer entre 2006 et 2009 et habitant dans l’un des 16 départements disposant d’un registre de cette pathologie.

Détermination sociale de facteurs de risque

L’étude confirme, à partir de données françaises, le surrisque des cancers des voies respiratoires et digestives hautes pour les populations des milieux défavorisés. « La détermination sociale de certains facteurs de risque comme la consommation de tabac, les expositions professionnelles ou les polluants atmosphériques explique sans doute une partie importante des différences observées », explique Joséphine Bryère, chercheuse à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).

En revanche, l’enquête montre, ce qui est nouveau, que d’autres cancers – foie, estomac, pancréas et vessie – pouvaient aussi être plus fréquents dans les populations défavorisées, rapporte le professeur Guy Launoy. La part des cas de cancers attribuables à un environnement socio-économique défavorisé était la plus importante pour les cancers du larynx (30 %), des lèvres-bouche-pharynx (26,6 %), du poumon (19,9 %) et de l’œsophage (16,7 %) chez les hommes, et, chez les femmes, pour les cancers des lèvres-bouche-pharynx (22,7 %) et du col de l’utérus (21 %) et de l’estomac (16,4 %).

Pratiques de dépistage plus fréquentes

A l’inverse, le mélanome mais aussi les cancers de la prostate, des testicules, des ovaires et du sein sont plus fréquents dans les zones aisées. « La surreprésentation du cancer de la prostate dans les milieux les plus favorisés, et dans une moindre mesure pour le cancer du sein, est sans doute très liée aux pratiques de dépistage plus fréquentes dans ces milieux et, pour la prostate, au surdiagnostic très important constaté pour ce cancer qui évolue extrêmement lentement », a détaillé le professeur Launoy.

Par contre, on n’a pas pour l’instant, selon lui, d’explication satisfaisante pour la fréquence plus élevée de cancers de l’ovaire, du testicule et surtout de mélanome dans les milieux favorisés. La lutte contre les inégalités sociales de santé passe aussi par des politiques dédiées en matière d’éducation, d’urbanisation, de transports et d’emploi, rappellent les chercheurs à l’occasion de cette étude.