Assurance-chômage : l’avenir du paritarisme en jeu
Assurance-chômage : l’avenir du paritarisme en jeu
Editorial. Le 13 février, le Medef a décidé de reprendre le fil de la négociation. Le pari n’est pas gagné alors que patronat, syndicats et candidats à la présidentielle sont divisés sur le devenir d’un Unedic en péril.
Des demandeurs d’emploi à l’agence Pôle Emploi de Villenave-d’Ornon (Gironde), le mars 2016. | Regis Duvignau/Reuters
Editorial du « Monde ». A deux mois du premier tour de l’élection présidentielle, le patronat et les syndicats vont reprendre les négociations, rompues le 16 juin 2016, sur l’élaboration d’une nouvelle convention d’assurance-chômage. Il y a urgence. Avec un déficit de 4 milliards d’euros en 2016 et une dette cumulée de 33,8 milliards d’euros, l’Unedic est en péril. Dans un premier temps, le Medef semblait se résigner à laisser l’Etat reprendre la main, comme il avait été obligé de le faire en 1982, ce qui revenait à signer l’arrêt de mort du paritarisme.
Le libéral Emmanuel Macron s’est déjà prononcé pour une nationalisation de l’Unedic. Le candidat d’En marche ! va jusqu’à envisager une suppression des cotisations chômage et maladie sur tous les salaires, qui serait compensée par une augmentation de la CSG. François Fillon ne préconise pas une mesure aussi radicale. Mais s’il préserve l’autonomie des partenaires sociaux, il leur dicte les règles qui doivent conduire à un retour à l’équilibre.
La décision du Medef, lundi 13 février, à l’issue d’une longue discussion de son conseil exécutif, de redonner sa chance à la négociation est une victoire de son aile sociale, incarnée par Alexandre Saubot, président de l’Union des industries métallurgiques et minières (UIMM) et patron du pôle social de l’organisation patronale, contre les « faucons », partisans d’une grève du dialogue social en attendant l’élection d’un nouveau président.
La fragilité du candidat des Républicains jusque-là plébiscité par les cercles patronaux a favorisé cet inattendu changement de pied. Mais c’est un chemin de crête qui s’annonce pour les négociateurs. En mettant en avant « l’impérieuse nécessité de ne pas alourdir le coût du travail » et en insistant sur « le besoin de flexibilité » de l’économie, le Medef réaffirme en creux son opposition à toute nouvelle taxation des contrats courts qui avait conduit à l’échec de juin 2016.
Nouveau round
Si les partenaires sociaux ne veulent pas que cette négociation ressemble à un leurre, il leur faudra, avec les contraintes d’un calendrier très court, faire preuve d’imagination et de bonne volonté pour retrouver la route de l’équilibre. S’ils ne veulent pas que ces discussions soient vaines, il faudra que le patronat et les syndicats fassent des concessions et montrent qu’ils cherchent vraiment un compromis.
Pour éviter une impasse sur la taxation des contrats courts, la CFDT préconise une dégressivité des allocations en fonction de la durée des contrats. Le Medef n’a sans doute pas opéré sa volte-face pour faire semblant de négocier, car il n’a pas politiquement intérêt à être celui qui serait jugé responsable d’un nouvel échec. Mais le pari est loin d’être gagné.
Car le véritable enjeu de ce nouveau round est bien l’avenir du paritarisme. S’il est une fiction à la Sécurité sociale, où toutes les décisions sont prises par l’Etat, il est encore une réalité tant pour les régimes de retraite complémentaire que pour l’assurance-chômage. Les partenaires sociaux y disposent d’une véritable autonomie. Mais celle-ci ne garantit pas une bonne gestion et ne favorise pas la prise de risque que nécessite toute réforme.
Si la négociation débouche sur un accord – ce qui n’est pas aujourd’hui le plus probable –, le paritarisme ne fera pas l’économie d’une réforme pour se moderniser. Si un nouvel échec se profile, ce sont ses jours qui seront comptés. Le compte à rebours a commencé.