Quand la culture s’invite dans le management
Quand la culture s’invite dans le management
Par Sophie Blitman
A l’université de Nanterre, les littéraires aussi se forment au business. Une polyvalence souvent appréciée dans le monde du travail.
Un master original a vu le jour à l’université de Nanterre en 2012. | ERIC NUNES
A 25 ans, Alexandre Delmas assume son ambition : « Je me suis fixé comme combat dans ma vie professionnelle de promouvoir un business humaniste », affirme le jeune homme qui déploie son énergie au sein du Lab RH, une association née il y a un an pour « promouvoir l’innovation dans les ressources humaines ».
Cette vision, Alexandre se l’est notamment forgée au sein du master Humanités et management, créé en 2012 par l’université de Paris-Nanterre. « Une formation pluridisciplinaire qui porte une approche radicalement différente de l’entreprise, et plus largement de la société, décrit ce diplômé de la deuxième promotion. Avec l’idée que la philosophie, l’histoire ou la littérature peuvent être source de performance dans l’entreprise. »
Au programme : des séminaires sur le fait religieux, l’alcoolisme au travail ou les risques psychosociaux, des cours d’histoire de la consommation et du marketing en lien avec le roman de Zola Au bonheur des dames, ou encore des questionnements philosophiques sur le capitalisme et le rôle de l’entrepreneur aujourd’hui.
« Esprit critique »
« Quand vous avez lu Balzac, vous regardez la société avec des yeux différents », lance Marcos Giadas Conde, le responsable du master, convaincu de « l’apport de la philosophie ou de l’histoire en matière de prise de recul et d’esprit critique ». A côté de ces disciplines littéraires, la formation vise à donner des bases en comptabilité, finance, marketing…
« Nous concevons le management comme un socle, mais nos diplômés n’ont pas vocation à devenir expert-comptable ou contrôleur de gestion », indique l’enseignant. C’est cette « culture business » ainsi qu’une spécialisation dans le digital qu’est venu chercher Clément Jodeau après sa licence en médiation culturelle. « Le master donne des connaissances théoriques mais aussi des compétences pratiques qui nous plongent dans la réalité du monde de l’entreprise et de ses métiers, à travers notamment l’intervention de professionnels comme la community manager du site Doctissimo », se souvient celui qui travaille aujourd’hui chez Barter, une start-up positionnée dans le secteur de l’art.
Postes hybrides
D’autres font leurs armes dans « des PME ou de grands groupes comme Total, EADS ou Renault, énumère Marcos Giadas Conde. Les entreprises recherchent de plus en plus des profils polyvalents qui non seulement comprennent les problématiques économiques mais ont également un bon esprit de synthèse, savent rédiger et sont capables d’animer une réunion tout en se montrant créatifs ».
Leur formation atypique conduit nombre de ces diplômés à occuper des postes hybrides dont « beaucoup n’existaient pas avant, souligne l’enseignant, qu’il s’agisse de faire de la gestion d’intelligence collective au sein d’une société de services en ingénierie informatique ou d’accompagner une start-up dans son développement ».
« Il faut savoir être multitâche, confie Clément Jodeau. Chargé de mission “business to consumer”, il a « mis la main à la pâte pour construire le business plan de la start-up » et s’occupe de programmer des événements tout en gérant le site Internet. Une polyvalence considérée comme formatrice par les jeunes diplômés qui apprécient d’éviter ainsi de s’enfermer dans une case.