Les doyens des facs de médecine redemandent la suppression du numerus clausus
Les doyens des facs de médecine redemandent la suppression du numerus clausus
Par Adrien de Tricornot
Ils interpellent les candidats à l’élection présidentielle pour obtenir une hausse du nombre de médecins formés, afin de répondre aux besoins des territoires.
Face au manque de professionnels de santé, les doyens des facs de médecine souhaitent augmenter les effectifs des étudiants et refondre leurs parcours. | ALEX PROIMOS / CC BY-SA 2.0
Les doyens des facultés de médecine s’invitent dans le débat de l’élection présidentielle en prônant une réorganisation profonde des études de santé, et notamment de « sortir du numerus clausus, qui a montré ses limites en termes de gestion de la démographie médicale et des déserts médicaux ». Dans ses « 10 propositions », rendues publiques lundi 20 février, la Conférence des doyens renouvelle son appel à supprimer ce contingentement des places à l’issue de la première année commune aux études de santé (Paces). Une proposition qui, selon son président, Jean-Luc Dubois-Randé, « fait désormais largement consensus », tant chez les universitaires que chez les étudiants et les acteurs de la santé.
Le nombre de places à pourvoir serait déterminé en fonction des besoins du territoire, en liaison avec les régions, le conseil de l’ordre des médecins et les acteurs de terrain. Les universités concluraient des « contrats d’objectifs » pour remplir ces besoins. En résulteraient un accroissement du nombre de médecins formés et des moyens accordés aux facultés concernées. Jean-Luc Dubois-Randé, président de la Conférence des doyens de médecine, souligne en effet l’ampleur des besoins : « Trois diplômés sur quatre décident de s’installer pour exercer la profession de soignant, et de nouveaux métiers se développent aux confins de la médecine et des nouvelles technologies, d’ingénieur, ou de manageur médical… » Et de rappeler que 30 % des nouveaux médecins s’installant en France ont obtenu leur diplôme dans un autre pays européen…
Pour autant, les doyens ne préconisent pas de supprimer la première année commune aux études de santé (Paces). Avec un taux d’échec de 85 % au bout d’un an et de 75 % pour les candidats qui la redoublent, cette année de préparation aux concours de médecine, dentiste, pharmacie et maïeutique (sage-femme) est très critiquée : on peut la valider mais ne pas être admis au concours. Ces « reçus-collés » – qui doivent aujourd’hui se réorienter ou redoubler – pourraient, pour une part, bénéficier de la fin du numerus clausus, et de la hausse du nombre de places qui en résulterait. De plus, les Doyens plaident pour continuer à développer des alternatives à cette voie, et des passerelles avec les filières scientifiques : « Plus de 20 universités vont entrer dans les nouvelles expérimentations d’alternatives à la Paces, c’est-à-dire que les deux tiers seront bientôt concernées. Progressivement, la réinvention de ce modèle est déjà en cours », se félicite Jean-Luc Dubois-Randé.
Pour les doyens, la suite du cursus doit être entièrement remise à plat. Ainsi, ils remettent en cause le rôle central actuel des « épreuves classantes nationales » (ECN), concours qui détermine l’accès aux spécialités à la fin de la sixième année. Les professeurs de médecine voudraient ouvrir des voies parallèles à ces fourches caudines, « pour des projets professionnels originaux identifiés et/ou des projets de santé professionnels adaptés aux territoires », explique leur communiqué. « Nous recommandons d’organiser très tôt le parcours professionnel des étudiants, et les stages, et de leur faire des propositions de trajectoires professionnelles. L’expérience montre que la relation avec le maître de stage est un élément déterminant de la décision d’installation », plaide M. Dubois-Randé.
Avec plus de diplômés en médecine – par la suppression du numerus clausus – et l’instauration de nouveaux parcours, le manque de professionnels de santé dans les zones sous-dotées pourrait être comblé, sans pour autant remettre en question le principe de la liberté d’installation sur le territoire d’« autant que nous disposons maintenant des outils pour attirer les diplômés dans les zones sous-dotées, comme les contrats de service public ou les maisons pluridisciplinaires de santé », argue le président de la Conférence des doyens.
Parmi les propositions portées par les responsables des facultés figure aussi le développement de la formation continue, de la transdisciplinarité, de l’e-santé ou de « la recherche et la formation par la recherche dans les secteurs paramédicaux, qui accusent en France un retard important, lié à l’éloignement de ces formations de l’université ». Pour M. Dubois-Randé, l’ensemble des formations paramédicales devraient rejoindre l’université. Et celle-ci devrait aussi proposer des prépas publiques aux Instituts de formations en soins infirmiers (IFSI), afin d’assurer l’égalité entre les candidats.