TV : « François Hollande, le mal-aimé » ou l’épopée malheureuse d’un président
TV : « François Hollande, le mal-aimé » ou l’épopée malheureuse d’un président
Par Daniel Psenny
Notre choix du soir. Jean-Michel Djian tente de comprendre pourquoi et comment l’hôte de l’Elysée a suscité un tel désamour chez les Français (sur France 3 à 20 h 55).
François Hollande, le mal-aimé - bande-annonce
Durée : 00:47
Décidément, François Hollande n’a pas livré tous ses secrets. Malgré les nombreux documentaires réalisés avec sa complicité depuis le début de son quinquennat et le livre Un président ne devrait pas dire ça…, écrit par les deux journalistes du Monde Gérard Davet et Fabrice Lhomme (Stock, 2016), François Hollande demeure une énigme. C’est le cas pour le réalisateur Jean-Michel Djian, qui propose de la résoudre dans son documentaire François Hollande, le mal-aimé.
Pour cela, il est allé interroger pas moins de vingt et une personnalités plus ou moins proches du président de la République qui, au fil de son documentaire, soumettent leurs analyses, avancent leurs hypothèses ou proposent leurs éclairages. L’exercice est difficile et parfois pesant. Chacun tente d’expliquer à sa manière pourquoi et comment François Hollande a suscité un tel désamour chez les Français.
Personne n’a vraiment la solution. Mais les propos de chacun ont le mérite de revisiter le quinquennat tout en assistant à l’épopée malheureuse d’un homme au sommet de son pouvoir confronté à la plus importante impopularité qu’un président de la République ait connue sous la Ve République. Un mal-aimé qui, pour beaucoup, ne le mérite pas. Selon eux, François Hollande a réussi à engager de grandes réformes de société qui ont été incomprises, inaudibles et souvent invisibles.
Solitude et trahison
Mais c’est le fort sentiment de solitude et de trahison suscité par les promesses non tenues qui domine dans ce documentaire. Le discours du Bourget en 2012 avec « mon principal ennemi, c’est la finance » fut une belle envolée, mais qui est revenue à François Hollande comme un boomerang. D’autres faux pas ont entamé son crédit, comme l’affaire Leonarda, autour de cette jeune Kosovare expulsée de France, qui avait obligé François Hollande à s’exposer en première ligne, ou ces vacances qu’il s’était octroyées à l’été 2012 alors que les plans sociaux s’accumulaient et que la croissance était en berne.
« Ces images ont laissé une impression de vacance du pouvoir », affirme Hervé Asquin, correspondant à l’Elysée pour l’AFP. Entre la gestion des « petites affaires » et les grands séismes politiques, comme l’affaire Cahuzac, le pacte de responsabilité qui permettait aux patrons de recevoir des aides allant jusqu’à 50 milliards d’euros ou la déchéance de nationalité après les attentats de 2015, s’est installée une impression de gestion au jour le jour où les grands desseins sont absents.
François Hollande le 15 mai 2012 à Paris | MARTIN BUREAU / © AFP PHOTO / MARTIN BUREAU
Il ressort enfin une forme de malaise à l’égard de ce « président normal » que tout le monde trouve certes sympathique, empathique et chaleureux, mais qui n’a pas su endosser le costume d’un chef d’Etat. Tout le monde s’accorde cependant à lui reconnaître avoir su incarner son pays lors de l’intervention au Mali et lorsque la France fut confrontée à l’une des pires périodes de son histoire après les attentats terroristes en 2015. C’est Tobie Nathan, professeur émérite de psychologie qui, de sa voix posée, résout une partie de l’énigme Hollande : « J’ai appris en Afrique que, pour diriger un village, il faut deux personnages. Il y a celui qui est le roi du jour qu’on exhibe et qu’on montre au peuple, et le roi de la nuit, celui qui manipule les objets derrière. Hollande est le roi de la nuit. Au fond, si l’on avait Hollande et Sarkozy ensemble, on aurait le président parfait. »
François Hollande, le mal-aimé, de Jean-Michel Djian (Fr., 2017, 90 min).