A Cannes, à la recherche du « killer format »
A Cannes, à la recherche du « killer format »
Par Mustapha Kessous
Après la fiction, Newen veut développer le divertissement, délaissé par les grands groupes internationaux au profit des séries.
Les producteurs internationaux délaissent le flux pour s’investir de plus en plus dans la fiction. | Paul Sakuma / AP
Désormais, au marché international des programmes de télévision (MipTV), les grands groupes spécialisés dans le jeu et le divertissement – comme Endemol Shine ou FremantleMedia – ne se contentent plus de dévoiler leur dernière trouvaille en matière de télé-réalité. Ils présentent aussi, en avant-première mondiale, leur nouvelle série.
Et cette tendance qui voit les producteurs internationaux délaisser le flux pour s’investir de plus en plus dans la fiction devrait se confirmer lors de la nouvelle édition du MipTV qui débute lundi 3 avril. « Depuis le lancement de “The Voice” en 2010, il n’y a plus de “killer format” qui fait exploser l’audience sur le marché pour lequel toutes les chaînes du monde se battent », explique Bibiane Godfroid, directrice générale déléguée de Newen chargée des contenus.
Une aubaine pour le troisième producteur français. « Nous voulons faire le chemin inverse. Même si la fiction représente 80 % du chiffre d’affaires du groupe, nous allons développer le flux afin de créer un “killer format” », assure-t-elle. Pour cela, Newen s’est doté d’une direction de développement qui dépense, chaque année, 5 % du chiffre d’affaires (quelque 10 millions d’euros) pour lancer des projets de séries ou de divertissement. En est sorti le jeu « Harry », lancé en 2012, qui attire un peu moins de 800 000 téléspectateurs chaque jour sur France 3.
Développer des concepts
Reste qu’en France, les sociétés de production sont confrontées à un problème majeur : la réticence des chaînes historiques à diffuser des programmes qui n’ont pas fait leurs preuves à l’étranger. A quoi s’ajoute celui des chaînes de la TNT qui diffusent des jeux longtemps retransmis sur les chaînes hertziennes. « C’est le chat qui se mord la queue : la France donne peu de chances aux créateurs d’exister. Et si vous ne passez pas par l’international, vous aurez du mal à exporter les formats français », poursuit Mme Godfroid, qui a été directrice des programmes de M6.
D’où la stratégie mise en place par Newen pour contrer l’obstacle : développer des concepts destinés à être vendus à l’international puis, en cas de succès, revendus en France. Tel fut d’ailleurs le cas pour « Harry » puisque le jeu a d’abord été acheté par une chaîne turque avant de l’être par France 3. Lorsque des pilotes sont tournés à l’étranger, un animateur français est présent afin d’avoir une version française du programme déjà prête.
Newen compte aussi sur ses filiales à l’étranger – le groupe vient d’acquérir le néerlandais Tuvalu Media Group – pour parvenir à ses fins. « Il ne faut surtout pas considérer le divertissement comme un sous-genre. Dans le flux, les Français sont très peu reconnus à l’international », estime-t-elle. Il y a donc une place à prendre.
Mais s’imposer sera un tout autre défi. En effet, les grandes plateformes comme Netflix commencent, elles aussi, à proposer du divertissement de belle facture et onéreux, à l’image d’« Ultimate Beastmaster », un jeu de course d’obstacles présenté par Sylvester Stallone.