HORS-SÉRIE. Les Français aiment l’histoire… mais se passionnent pour la géographie. Et ils adorent les cartes. Pour s’en convaincre, il suffit de voir la multiplication et le succès des atlas. Rien n’y échappe : les conflits, les civilisations, le sport, la mer, la gastronomie et même les pays imaginaires chers à Umberto Eco. Au début du XXe siècle, un phénomène très particulier, le mariage de la cartographie et de la statistique, a ouvert la voie à l’infographie moderne. Aujourd’hui, même si avec Google Earth, on peut parcourir la planète sans quitter son fauteuil, mieux vaut avoir un décodeur pour comprendre le monde, celui-ci s’appelle un cartographe ou un infographe.

Sur une carte, la frontière est ce trait de crayon plus ou moins appuyé qui sépare deux Etats. En pointillé, il raconte un tracé discuté, voire disputé. En continu, il exprime la reconnaissance – parfois dans la douleur – de cette frontière. Depuis la chute du mur de Berlin, les cartographes n’ont cessé d’épaissir plus d’une cinquantaine de traits avec la multiplication des barrières de sécurité dans le monde. Ces murs séparent les peuples, les niveaux de vie, entravent la circulation des hommes et limitent les trafics. Les frontières ne sont pas les seuls éléments à cartographier, mais elles symbolisent les choix que le cartographe doit faire pour chaque élément posé sur la feuille.

Classées en cinq dossiers

Les cartes produites chaque semaine dans les pages « Géopolitique » du Monde, dont nous publions ici une sélection, cherchent à mettre en lumière une situation troublée, un enjeu, des rivalités aux facteurs multiples. Nous les avons classées en cinq dossiers montrant les zones de tension et les interrogations autour d’un monde mouvant : l’Europe qui doute, les défis de l’ère Trump, la Chine et la Russie qui s’affirment, le feu au Moyen-Orient et les enjeux de la gouvernance mondiale.

Le défi, pour le cartographe, est de présenter, avec des points, des chiffres, des lignes et des à-plats de couleur, la complexité, sans user d’adjectifs qualificatifs pour nuancer son propos. Les informations cartographiées sont issues de la collaboration entre le journaliste chargé de la rubrique concernée, des chercheurs universitaires et les cartographes du service Infographie, qui synthétisent le récit des gens de terrain. Ces cartes sont avant tout l’expression d’un choix éditorial : à travers des légendes articulées en plusieurs parties et « anglées » comme un article, elles cherchent à expliquer la complexité des enjeux sans être simplificatrices, afin de guider le voyageur-lecteur-citoyen soumis à un flot d’informations. Nous avons complété ce choix géopolitique avec sept cartes pointant les fractures françaises – éducation, logement, transports, santé, chômage, emploi, sécurité – qui seront les dossiers auxquels le nouveau président de la République et la nouvelle Assemblée nationale devront se consacrer en priorité.

Le Monde 40 cartes, Hors-série « Le Monde », 100 pages, 8,50 euros, en kiosque et sur boutique.lemonde.fr