Lors de la cérémonie de passation des pouvoirs, dimanche 14 mai à l’Elysée, il n’a pu retenir une petite larme. Vieux baron du Parti socialiste, qu’il a rejoint dès la fin des années 1960, Gérard Collomb a été l’un des premiers à croire en Emmanuel Macron, à penser que le Touquettois pouvait être l’instrument de la revanche de la gauche social-démocrate sur les frondeurs du PS, qu’il abhorre pour avoir saboté le quinquennat de François Hollande. Sa nomination au ministère de l’intérieur vient récompenser cette fidélité.

Durant la campagne, Gérard Collomb s’est surtout démené dans l’ombre, laissant l’exposition médiatique aux autres proches de la première heure, comme Richard Ferrand, Christophe Castaner ou Benjamin Griveaux. C’est lui qui fut notamment chargé de discrètement récupérer les parrainages d’élus nécessaires à la candidature de l’ancien ministre, alors que le PS menaçait d’exclure les fautifs. Une mission parfaitement remplie : Emmanuel Macron a déposé 1 829 parrainages auprès du Conseil constitutionnel sur les 500 nécessaires pour se présenter.

Avec son homologue sénateur du Rhône Michel Mercier, proche de François Bayrou, il a également joué un rôle déterminant pour amener le président du MoDem à nouer une alliance avec le candidat d’En marche !. Les deux hommes ont dû reprendre du service pour apaiser les tensions qui ont suivi la publication de la première liste d’investitures aux législatives.

« Réseau élargi »

Membre du Grand Orient de France, appartenance à la franc-maçonnerie qu’il est l’un des rares hommes politiques à assumer publiquement, le maire de Lyon a joué un rôle essentiel pour convaincre certains élus de se présenter aux élections législatives sous les couleurs de La République en marche. « Il a une fine connaissance de la carte électorale et un réseau élargi. Cela a été très utile », reconnaît un membre de la commission d’investiture d’En marche !.

Le maire de Lyon s’est enfin démené pour mettre en scène son champion. Le 24 septembre 2016, il lui a offert une tribune nationale en l’invitant à clore un sommet européen des réformistes organisé dans sa ville, avec tout le gratin de la social-démocratie du Vieux Continent. Le 4 février, il a rempli le Palais des sports de Lyon pour un meeting considéré comme l’un des plus réussis de la campagne.

En propulsant Gérard Collomb au ministère de l’intérieur, Emmanuel Macron prend pourtant un risque, celui de se voir accusé de ne pas respecter ses engagements en matière de renouvellement et de cumul des mandats. A 69 ans, le leader du pôle des réformateurs, l’aile droite du PS, a en effet une très longue carrière politique derrière lui. Son premier mandat de député remonte à 1981 et il est sénateur du Rhône depuis plus de dix-sept ans.

D’abord élu maire du 9e arrondissement de Lyon en 1995, il a conquis la mairie en 2001 à la faveur d’un duel fratricide à droite entre Michel Mercier et Charles Millon. Selon ses proches, l’ancien professeur de lettres n’avait d’ailleurs pas d’ambition nationale et voulait rester à s’occuper de sa ville. Le nouveau président de la République en a décidé autrement.