C’est l’une des rares nouveautés de la feuille de route remise mardi 6 juin aux partenaires sociaux. Le gouvernement souhaite que soient « interrogées (…) certaines règles » relatives au licenciement car elles constituent « des freins au recrutement ». Durant sa prise de parole, mardi après-midi, la ministre du travail, Muriel Pénicaud, a exprimé à ce sujet une position très tranchée : il faut « lutter contre le formalisme ».

Cette préoccupation, qu’Emmanuel Macron n’avait pas mise en avant durant la campagne présidentielle, s’inscrit dans la volonté de « sécuriser » les relations entre les patrons et leurs personnels. La rupture du contrat de travail obéit à des règles dont certaines n’ont « pas pour vocation de protéger les salariés mais d’alimenter les contentieux », assure une source gouvernementale.

A l’appui de cette thèse, un exemple : lorsqu’un employeur souhaite se séparer d’un membre de son équipe à cause de la baisse du chiffre d’affaires, la marche à suivre est très stricte : « S’il oublie de mentionner dans la lettre de licenciement “donc votre poste est supprimé”, la rupture du contrat est considérée comme sans cause réelle et sérieuse et les dommages-intérêts dus par l’entreprise s’élèvent au minimum à six mois de salaires, devant les prud’hommes », explique cette même source.

« Formalisme nécessaire »

La démarche de l’exécutif répond à une vieille doléance patronale. Fin 2012, lors de la négociation sur l’accord interprofessionnel relatif à la sécurisation de l’emploi, le Medef avait, sans succès, proposé d’édicter de nouvelles dispositions pour qu’« une irrégularité de forme ou de procédure » ne fasse pas « obstacle à la validité » d’une mesure de licenciement. La Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), de son côté, monte régulièrement au créneau pour dénoncer les situations où un dirigeant de société est condamné par les prud’hommes au motif que le courrier de congédiement est mal rédigé – alors même que le motif économique est fondé.

« Il est vrai que des employeurs, notamment parmi les TPE-PME, se trompent, parfois de bonne foi, dans la rédaction de la lettre de licenciement, décrypte Pascal Lokiec, professeur de droit à l’université Paris Ouest-Nanterre-La Défense. Cependant, le formalisme est nécessaire pour permettre au salarié de se défendre devant le juge, pour protéger ce qu’on appelle le principe du contradictoire. C’est l’employeur qui dispose des informations sur l’entreprise, qui sait ce qui fonde la décision de licencier ; il est tout à fait normal que le salarié en soit informé de manière précise. »

Le fait que le gouvernement veuille repenser certaines règles sur le licenciement obéit à une autre considération, d’après François Hommeril, président de la CFE-CGC : « Mme Pénicaud, lorsqu’elle nous a reçus, a développé l’argument selon lequel des investisseurs étrangers hésitent à venir en France, à cause des risques de contentieux, rapporte-t-il. Elle y voit un frein au développement de l’emploi et aux embauches – analyse que nous ne partageons pas. »

L’une des questions qui se pose désormais est de savoir jusqu’où l’exécutif entend pousser la réflexion. « S’agit-il d’assouplir les règles par le biais d’accords d’entreprise ?, s’interroge Fabrice Angei, du bureau confédéral de la CGT. Nous n’avons pas de précisions en la matière. »