La chef de file du PUD, Arlene Foster, au soir des résulats de l’élection législative du 8 juin. | NIALL CARSON / AP

Ils sont les « faiseurs de roi », selon la BBC. Ou plutôt de reine. Theresa May a réussi, vendredi 9 juin, à conclure un accord avec le Parti unioniste démocrate (PUD), qui lui a permis d’obtenir une majorité suffisante pour former un gouvernement.

La première ministre a obtenu de la reine l’autorisation en ce sens. Dans une brève allocution, Theresa May a assuré que son nouveau gouvernement « mènera à bien le Brexit », avant de lancer devant la presse « Et maintenant, au travail ! ».

Cet accord est le fruit d’intenses négociations nocturnes avec ce petit parti nord-irlandais, qui a obtenu dix sièges jeudi, soit deux de plus qu’au scrutin précédent. Des sources au sein du PUD, citées par le Guardian, expliquent que leur décision s’explique par la « consternation » à l’idée que Jeremy Corbyn, dont les liens historiques avec l’ennemi du PUD, le Sinn Féin, sont connus de longue date, puisse prendre la tête du pays :

« Aussi longtemps que le Parti travailliste acceptera d’être mené par une pom-pom girl de l’IRA [armée républicaine irlandaise, groupe armé opposé à la présence britannique en Irlande du Nord], il s’interdira lui-même d’entrer à Downing Street. »

« Plus d’influence » sur le Brexit

On ignore encore les contours de cet accord avec les tories, qui est toutefois présenté par la presse britannique comme un « contrat de soutien plutôt qu’une coalition formelle ». Mais il est sûr que le parti nord-irlandais signe là un bon coup politique. S’il est peu probable que des membres du PUD participent au gouvernement de Theresa May, le Parti unioniste démocrate devrait voir, en échange de son soutien lors des votes de confiance ou du budget, certaines de ses idées faire du chemin à Westminster.

« Plus de voix. Plus de sièges. Plus d’influence. Plus pour l’Irlande du Nord ». L’affiche de campagne du parti s’est révélée pertinente. Parmi les batailles menées par le PUD, la promesse qu’il n’y aurait pas de statut spécial pour l’Irlande du Nord dans les négociations sur le Brexit devrait être entendue favorablement par Theresa May.

Nigel Dodds, élu du PUD dans la circonscription de Belfast nord, a rappelé vendredi que le combat de son parti, particulièrement actif pendant la campagne du Brexit, était en effet de « faire en sorte qu’il n’y ait pas un accord séparé qui ferait que l’Irlande du Nord garde un pied dans l’Union européenne ». Une condition, selon le PUD, à ce que « la boîte de Pandore des mouvements indépendantistes de toute sorte » ne soit pas réouverte.

Le DUP s’est ainsi fortement distingué du Sinn Féin, qui demande pour sa part un statut spécial, alors que 56 % des électeurs d’Irlande du Nord ont voté pour rester dans l’Union européenne. Le parti républicain a récolté sept sièges lors du scrutin du 8 juin. La leader du PUD, Arlene Foster, a déclaré qu’elle était « absolument enchantée » de ces résultats.

Attelage faible

Dans son manifeste publié avant les élections, le PUD a lancé d’autres chantiers prioritaires, comprenant notamment une baisse des tarifs des ferrys entre l’Irlande du Nord et la Grande-Bretagne, un soutien accru au secteur touristique dans la région, ou encore le maintien des aides sociales au transport en Irlande du Nord, qui existe depuis les années 1960. Au plan sociétal, le parti est également un opposant de longue date au mariage homosexuel.

Ce n’est pas la première fois que le Parti conservateur dépend d’un parti irlandais pour former une majorité, rappelle vendredi la presse britannique. En 1996, le premier ministre John Major avait dû s’appuyer sur les neuf députés de l’Ulster Unionist Party pour prendre la tête du pays. Un soutien bien marchandé, quelques mois avant le début des négociations intra-irlandaises.

Une situation dont se souvenait peut-être Theresa May, qui a soigné ses relations avec le PUD depuis son arrivée au 10, Downing Street. Mais, malgré cet accord de circonstance, l’attelage reste très faible, rappelle la BBC. Selon les projections, l’addition des sièges des tories et du PUD donnerait une majorité de 329 sièges, soit la majorité absolue (qui est à 326 sièges). Celle-ci resterait toutefois trop serrée pour assurer la « solidité et la stabilité » appelée de ses vœux par Theresa May avant le scrutin.