« Beyond Good & Evil 2 », le jeu vidéo spatial aux ambitions folles
« Beyond Good & Evil 2 », le jeu vidéo spatial aux ambitions folles
Par William Audureau
Quelque part entre « GTA », « No Man’s Sky » et « Zelda : Breath of the Wild », le projet de Michel Ancel veut franchir une nouvelle étape dans les jeux d’exploration.
La planète Ganesh, colonisée par des Indiens. | Ubisoft
C’est une grande pièce décorée de posters en tout genre – vaisseaux spatiaux, créatures hybrides entre humains et animaux, corsaires aux regards bestiaux, paysages solaires que surplombe une statue hindoue géante. Tous ces documents visuels sont autant d’empreintes du développement de Beyond Good & Evil 2 (BGE 2), projet de jeu d’aventure débuté pour la première fois en 2007, et dont Ubisoft a, une nouvelle fois, annoncé officiellement l’existence à l’Electronic Entertainment Expo (E3) 2017, lundi dernier, à Los Angeles. Provoquant une secousse de 8,1 sur l’échelle de Richter des annonces les plus commentées.
BGE 2, et c’est sans doute sa particularité, n’est pas un jeu. Pas encore, en tout cas. Cela fait désormais dix ans qu’il habite le royaume des châteaux en Espagne, des plans sur la comète, des idées majestueuses qui n’ont pas d’habit à leur taille. Le temps d’une visite de la salle qu’Ubisoft lui consacrait dans un hôtel de Los Angeles, on comprend pourquoi : son ambition démesurée a longtemps été à la fois sa raison d’être et de ne pas être.
En trois mots, BGE 2 est un jeu d’aventure se déroulant dans une galaxie entière et en ligne. C’est du moins le projet, la vision d’artiste, le pari un peu fou de son directeur créatif, Michel Ancel, et de la cinquantaine de concepteurs qui l’épaulent et le soutiennent à Montpellier. Une galaxie, rien que ça : un « Grand Theft Auto de l’espace », dans lequel le héros, modelé librement selon les choix du joueur, parcourrait tout aussi librement un petit bouge glauque où s’attablent des créatures animales mafieuses que le grand air interstellaire à bord d’un vaisseau mère colossal. « Un changement d’échelle jamais vu dans le jeu vidéo », assure enthousiaste un collaborateur de Michel Ancel.
« BGE 2 » veut pouvoir aussi bien mettre l’accent sur le gigantisme de l’univers que sur l’expressivité d’un visage. | Ubisoft
Pas de robots mais des colons humains
Beyond Good & Evil 2 se déroule au XXIIe siècle, dans un univers où la Chine et l’Inde seraient les deux premières puissances mondiales, et où l’humain se serait lancé dans la colonisation de l’espace. Une tâche herculéenne et particulièrement onéreuse, qui n’aurait été rendue possible que par le financement d’industriels comparables à Elon Musk, le fondateur de SpaceX, et la création d’une race d’hybrides, mi-hommes mi-animaux corvéables.
Si l’univers du projet d’Ubisoft Montpellier respire le space opera, son goût est différent des autres. Ici, pas vraiment de robots – on préjuge qu’ils ont été relégués après une guerre avec une intelligence artificielle –, mais plutôt des colons humains qui se tournent vers la religion au fur et à mesure qu’ils s’éloignent de la Terre, pour investir de sens les mondes inconnus qu’ils peuplent. D’où cette ville de Ganesh, à la statue hindoue gigantesque. Le joueur évoluera dans ce monde dans la peau d’un corsaire de l’espace à la Albator, entouré de son propre équipage, et prêt à décoller vers des planètes éloignées.
Les joueurs devraient pouvoir gérer leur propre vaisseau spatial et son équipage. | Ubisoft
Sur le papier, BGE 2 peut évoquer le jeu No Man’s Sky, lui-même composé d’une galaxie générée de manière procédurale par des algorithmes. La démonstration technique montrée à l’E3 permettait d’apercevoir le singe de la bande-annonce voler avec un jet pack, puis décoller en vaisseau spatial de la planète et s’extraire du système solaire, au prix d’un dézoom vertigineux.
Certains éléments-clés du premier épisode
L’approche et les outils sont toutefois différents : les mondes d’Ubisoft Montpellier ne seront pas générés aléatoirement, mais en bonne partie bâtis à la main avec l’aide d’un générateur automatisé. Du « procédural sous contrôle », souffle Michel Ancel. Ainsi, et piochant au passage dans une approche évoquant Civilization, sur une même planète, certaines villes auront une dimension plus religieuse que d’autres, tandis que certaines seront plus exposées aux chutes de météorites.
Le jeu n’oublie pas non plus d’emprunter au premier épisode, dont il raconte ce qui précède, en reprenant certains éléments-clés, comme la photographie. Le monde se veut toutefois entièrement ouvert, en ligne et organique. L’équipe d’Ubisoft Montpellier lorgne du côté de The Legend of Zelda : Breath of the Wild, la production magistrale de Nintendo, pour ce qui est de donner au joueur les pleins pouvoirs sur son aventure, tout en lui donnant l’impression d’avoir tout le temps des choses à découvrir.
Reste à concrétiser cette idée. A cette heure, seules trois planètes ont été réalisées. Et encore, trois semaines avant l’E3, les décors ressemblaient à des entassements de cubes. Ubisoft Montpellier se refuse pour l’instant à évoquer la moindre date de sortie, ni même une plate-forme de jeu. Michel Ancel assure toutefois que la démonstration tourne aisément sur une PlayStation 4, voire sur un iPad.
Désormais, le projet va rentrer dans une phase de concertation avec les fans, qui peuvent s’inscrire sur un programme pour donner leur avis. Une autre manière de leur dire que, oui, Beyond Good & Evil 2 existe bel et bien, qu’ils peuvent même participer. S’inscrire, c’est déjà y croire.