Nouvelles inculpations dans le scandale de Flint
Nouvelles inculpations dans le scandale de Flint
Par Martine Valo
Les 100 000 habitants de cette ville américaine ont été approvisionnés pendant dix-huit mois avec une eau gravement contaminée au plomb.
Le gouverneur du Michigan, Rick Snyder, à Washington, en mars 2016. | Kevin Lamarque / REUTERS
Cinq personnes viennent d’être inculpées pour homicide involontaire, mercredi 14 juin, pour leur responsabilité dans le fiasco de la gestion de l’eau à Flint, dont le chef du département de la santé de l’Etat du Michigan, Nick Lyon. A partir d’avril 2014, les 100 000 habitants de cet ex-bastion de l’industrie automobile au bord de la faillite ont été approvisionnés avec une eau gravement contaminée au plomb. Ils avaient eu beau protester, alertés par l’odeur et l’apparence de ce qui coulait de leurs robinets, ils avaient dû s’en contenter pendant dix-huit mois.
Dans ce scandale retentissant, tout commence lorsque, sous la responsabilité du gouverneur républicain du Michigan, Rick Snyder, la ville décide de réaliser des économies en puisant son eau dans la rivière Flint au lieu d’utiliser, comme auparavant, le réseau d’approvisionnement de l’agglomération de Detroit. La nouvelle source, corrosive, a contaminé les tuyaux d’alimentation avant de délivrer une eau impropre à la consommation, qui a empoisonné des milliers d’enfants et causé la mort de douze personnes, victimes de la légionellose.
Obstruction à la justice
Comme l’ont montré plusieurs enquêtes judiciaires et administratives par la suite, les autorités ont laissé les gens boire une eau non potable à leur insu. Il est ainsi reproché à Nick Lyon de ne pas avoir prévenu la population du danger. Lui et quatre autres responsables de l’époque – déjà sous le coup de poursuites au pénal dans cette affaire – sont mis en examen pour homicide involontaire : Darnell Earley, Howard Croft, Liane Shekter Smith et Stephen Busch. Il est en outre reproché au médecin-chef de l’Etat du Michigan, Eden Wells, d’avoir fait obstruction à la justice et d’avoir menti aux enquêteurs.
La crise sanitaire qu’a connue Flint – majoritairement habitée par des Afro-Américains – a fait d’elle un symbole des injustices sociales aux Etats-Unis. La Commission des droits civiques du Michigan publie, en février 2016, un rapport dénonçant un « racisme systématique » dans cette affaire. En effet, dès le changement de branchement, la population s’était plainte de vomissements, de pertes de cheveux, d’éruptions cutanées. Mais les autorités de la ville se contentent alors de conseiller aux consommateurs de faire bouillir leur eau ! Quelques mois plus tard, en septembre 2015, un groupe de médecins alerte sur le niveau élevé de plomb décelé dans le sang d’enfants de la ville. Ils constatent aussi que les cas de légionellose augmentent.
Le gouverneur de l’Etat, Rick Sydner, annonce, en octobre 2015, qu’un million de dollars va être consacré à l’achat des filtres, et accepte de faire analyser l’eau dans les écoles. Des bouteilles d’eau minérale et des filtres seront distribués. Mais il faudra attendre le 29 décembre pour qu’il présente ses excuses, avant de déclarer l’état d’urgence en janvier 2016, puis d’appeler l’administration Obama à la rescousse. Le Congrès vote finalement, en décembre 2016, une loi autorisant plusieurs vastes projets d’amélioration des équipements à travers le pays, qui inclut une aide de 170 millions de dollars pour Flint.