Le lycée Montaigne à Paris propose des classes préparatoires commerciales voie scientifique (ECS) ou voie économique (ECE). | JACK GUEZ / AFP

Selon le baromètre « Génération prépa » 2017 réalisé par l’école EM Strasbourg et du magazine spécialisé Espace Prépas, et que Le Monde publie en avant-première, les élèves de classes préparatoires aux écoles de commerce sont souvent traversés par le doute au cours de ces années exigeantes, et les filles encore plus que les garçons. Ainsi, cette enquête à laquelle ont répondu plus de 1 000 étudiants « casse l’image d’élèves sûrs d’eux et compétiteurs », selon Stéphanie Ouezman, rédactrice en chef d’Espace Prépas.

  • Un choix d’orientation difficile et toujours questionné

La majorité des élèves de classes prépas commerciales ont hésité avant de s’engager dans cette voie. Seuls 35 % estiment n’avoir jamais douté avant d’y accéder, tandis que les autres ont douté parfois (36 %), souvent (21,5 %) ou simplement la veille de la rentrée (7,5 %).

Les élèves de prépa semblent d’ailleurs méconnaître les autres voies pour entrer en grande école, en admission post-bac pour certains établissements, et surtout en admission parallèle. A la question : « Si vous n’aviez pas fait de prépa, auriez-vous tenté d’intégrer une grande école de management par un autre moyen ? », les élèves sont encore 23 % à choisir la réponse : « Je ne savais pas que cela était possible ».

S’ils ont finalement choisi la classe préparatoire – en dépit des doutes qu’ils avaient exprimés –, ces bons élèves ont d’abord été convaincus par leurs professeurs de lycée, leurs familles ainsi que leurs proches. Et maintenant qu’ils y sont plongés, la proportion d’élèves non convaincus de leur orientation reste importante. 37 % déclarent douter parfois de leur choix, et 10 % souvent.

  • Un « acharnement à travailler » harassant

Les élèves reconnaissent la qualité de leur formation, tout en déplorant la fatigue et le côté déstabilisant de la notation. Invités à citer le « vrai plus » de la prépa, ils désignent en premier « les connaissances acquises » (51 %) devant le « challenge à relever » (35,5 %) ou les « amitiés nouées » (33,5 %). Mais lorsqu’on leur demande de désigner le « point noir », une « fatigue omniprésente » est déplorée (58,5 %), suivie de « l’acharnement à travailler » (33 %) ou du « côté bachotage » (28 %). Cette lassitude est d’autant plus compréhensible qu’un étudiant sur deux travaille en moyenne entre dix et vingt heures par semaine en dehors des cours, et 38 % plus de vingt heures.

Cependant, certaines caractéristiques souvent reprochées aux prépas sont peu citées, comme « l’autorité imposée » (10 %) ou « l’esprit de compétition » (8 %), confirmant les dires de certains enseignants selon lesquels ces traits culturels hérités du passé ont tendance à décroître. De fait, seulement 4 % des élèves estiment que leurs professeurs ont instauré un climat de compétition dans la classe, alors que les mots les plus cités pour qualifier ce climat sont l’exigence et la solidarité (39 %), suivis par la confiance (32 %).

  • Neuf étudiants sur dix doutent de leurs capacités

Cette atmosphère n’empêche pas les élèves de constater à 43 % qu’une mauvaise note en classe prépa, c’est « normal, le quotidien ». Une majorité (53 %) n’avait « jamais » eu d’aussi mauvaises notes jusqu’à présent. Ils savent prendre du recul et juger que cette notation est seulement une indication sur la valeur de leur travail à un moment donné, dont ils doivent comprendre les causes. Il n’empêche, une part conséquente se sent perdue : 29 % avouent ne plus savoir à quel niveau se situe leurs capacités !

Au total, leur vie scolaire est massivement traversée par le doute. Depuis leur entrée en classe préparatoire, 29 % ont souvent douté de leurs capacités, 30 % souvent et 31 % parfois… L’étude montre aussi une différence selon le genre : les garçons semblent plus confiants que les filles sur leurs capacités depuis leurs débuts en prépa : 10 % estiment avoir rarement douté de leurs capacités et 5 % jamais. Chez les filles, généralement plus perfectionnistes à l’école en dépit de leurs bons résultats, cette part se réduit à 1 % (jamais douté) et 6 % (rarement).

  • Apprendre à « travailler vite et bien » et à gérer le stress

Malgré ces questionnements, les élèves ont conscience des atouts intellectuels que leur apporte leur formation. Ils sont une majorité à estimer que c’est la classe prépa qui leur apprend à « travailler vite et bien », à « rebondir après un échec », à synthétiser par écrit et écrire clairement ou encore à gérer leur stress. Pour gérer un projet ou un budget, être créatif, travailler en groupe ou prendre la parole en public, ils comptent davantage sur leur future école, estimant que leur employeur aura également besoin de telles compétences :

Le baromètre 2017 des classes préparatoires « Génération prépa » : quelles compétences acquérir au lycée et à l’école de commerce ? | EM Strasboug - Espace Prépas

Néanmoins, ils manifestent dès à présent une envie d’ouverture sur la vie professionnelle : ces futurs managers sont 87 % à estimer que leur prépa n’a « pas assez de lien avec l’entreprise ». Ils plébiscitent les idées de séjour linguistique à l’étranger (80 % sont tout à fait ou plutôt d’accord), d’immersion sur le campus d’une grande école (73 %), de stage court de deux à trois semaines en entreprise (71 %) ou d’une session d’été d’initiation au management (64 %).

  • Choix d’une école : les garçons plus attachés aux salaires

Le regard rivé sur les concours, les étudiants pensent également à l’admission dans leur future école de commerce, préparant leur vie professionnelle. Les critères qu’ils citent pour choisir leur établissement sont d’abord la ville où se situe l’école (31 %), juste devant les classements dans la presse (30 %), les partenariats internationaux (23 %), les doubles diplômes (20 %) et les salaires à la sortie (18 %). Ce critère remonte en troisième position chez les hommes (21 %). Tandis que les femmes ne le placent qu’en septième position (avec 16 %), valorisant davantage les parcours académiques et les partenariats avec les entreprises. Un reflet, peut-être, d’une autocensure et d’une intériorisation des discriminations salariales persistantes dont témoignent les enquêtes sur l’insertion professionnelle :

Enfin, pour leur future « première destination étrangère pour leur formation ou pour un stage », les élèves disent préférer les Etats-Unis (20 %), l’Angleterre (13,3 %), le Canada (12 %) et l’Australie (9,9 %). Au total, ils souhaitent d’abord partir en Europe de l’Ouest, choisi par 36 % des répondants (6,6 % en Allemagne, 6 % en Scandinavie, 2,7 % en Espagne…). L’Asie recueille 14 % des suffrages (la Chine, 3,3 % et le Japon, 3 %) et l’Amérique du Sud, 9 % (le Brésil, 3,2 %).