Affaire Traoré : ce que disent les rapports d’autopsie
Affaire Traoré : ce que disent les rapports d’autopsie
Par Julia Pascual
Si le jeune homme est bien décédé d’une asphyxie après une interpellation violente, la responsabilité des gendarmes n’est pas avérée pour le moment.
La foule rassemblée pour dénoncer la mort d’Adama Traoré après l’intervention des gendarmes brandit son portrait, le 22 juillet 2016, à Beaumont-sur-Oise. | THOMAS SAMSON / AFP
Près d’un an après le décès d’Adama Traoré au cours de son interpellation par des gendarmes à Beaumont-sur-Oise (Val-d’Oise), le 19 juillet, une contre-expertise anatomopathologique confirme que le jeune homme de 24 ans est mort suite à une asphyxie, c’est-à-dire conséquemment à un manque d’oxygène.
Ainsi que le révélait Le Parisien mardi 4 juillet, un rapport médico-légal a été remis aux juges d’instruction du tribunal de grande instance de Paris, qui conclut en ce sens. L’article du quotidien a suscité quelque remous puisque Libération a réagi mercredi 5 juillet à travers un article sur « les raccourcis du Parisien », reprochant à ce dernier d’avoir occulté « une information pourtant cruciale » du rapport, relative à une anomalie du cœur d’Adama Traoré.
Les causes du décès d’Adama Traoré sont un enjeu crucial dans la détermination de la responsabilité des gendarmes qui ont procédé à son interpellation en commettant, selon la famille du jeune homme, une « bavure ». Lors de leurs auditions, trois militaires ont reconnu avoir immobilisé le jeune homme en procédant à un plaquage ventral. Une technique dangereuse – mais autorisée – qui peut provoquer l’asphyxie.
Deux rapports d’autopsies médico-légales, datées du 21 et 26 juillet 2016, ont déjà établi qu’Adama Traoré avait souffert d’asphyxie. Mais, à l’époque, le procureur de Pontoise n’avait pas communiqué cette information. Avant que le dossier ne soit dépaysé à Paris, il avait au contraire évoqué une « infection très grave », « touchant plusieurs organes ».
« Un épisode d’effort et de stress »
Un examen médico-légal, daté de septembre 2016, avait également cru déceler « une cardiomyopathie hypertrophique débutante », c’est-à-dire une maladie du cœur pouvant être « potentiellement la cause directe de la mort ». Mais rien ne permettait d’en être certain.
Le nouveau rapport, en date du 22 juin, fait plusieurs constats. Ses auteurs, deux médecins experts judiciaires, considèrent que « l’hypothèse d’une éventuelle cardiomyopathie hypertrophique (…) ne peut être retenue avec certitude ». En revanche, « l’existence d’un syndrome asphyxique aigu est indiscutable ». Adama Traoré a bien manqué d’oxygène.
Par ailleurs, il souffrait d’une « maladie inflammatoire » de type sarcoïdose. Une affection « habituellement d’évolution bénigne » et qui n’était en tout cas pas localisée au niveau du cœur. Adama Traoré présentait enfin une « cardiomégalie relative », c’est-à-dire un cœur anormalement volumineux. « La cause précise de la cardiomégalie ne peut être établie », expliquent les médecins. Mais cette « anomalie peut s’être décompensée sur un mode aigu à l’occasion d’un effort ».
Qu’est ce qui est à l’origine de la dégradation brutale de l’état d’Adama Traoré ? Les médecins l’attribuent à « un épisode d’effort et de stress ». Un an après la mort du jeune homme, l’enquête judiciaire n’a pas déterminé s’il était imputable aux gendarmes.