A l’heure du sommet du G20 à Hambourg, tandis que la police et les manifestants s’affrontent parfois violemment, le rapport de force qui s’exprime dans les rues a son équivalent sur les réseaux. Si les manifestations anticapitalistes sont fréquentes lors de telles réunions, leur mode opératoire a beaucoup évolué au regard des premières, dans les années 1990.

Les nombreux groupes et organisations qui ont convergé à Hambourg communiquent et se coordonnent en ligne, via des mots-dièse (#NOG20, #BlockG20, #YesWeCamp), en diffusant les mouvements des forces de l’ordre ou en filmant en direct sur l’application Periscope.

« On a atteint notre premier objectif : le président de la Commission européenne, Juncker, et le président, Tusk, ont été retardés à cause de #BLOCKG20. »

Les comptes créés spécifiquement à l’occasion du G20, souvent liés aux mouvements anarchistes et antifascistes, prennent le pas sur les acteurs habituels de ces rassemblements. Des ONG altermondialistes comme Attac, moins présentes sur les réseaux sociaux, sont bien aux « happenings » prévus pour faire la « une » des journaux, à l’image de ce millier de personnes grimées en zombies d’argile, mais vite oubliés des activistes.

Et pour cause, Judith Amler, militante chez Attac Allemagne, considère que le vrai combat a lieu dans la rue. Dans la matinée du vendredi 7 juillet, la manifestante de 33 ans est sur le pont de Schwanenwik, elle nous répond au téléphone en attendant que les policiers laissent passer la foule :

« Oui, les réseaux sociaux permettent de montrer aux gens que la police nous vole la manifestation, comme maintenant. Mais j’ai du mal avec ceux qui militent uniquement sur Internet et ne bougent pas de chez eux. »

#BlockG20, la viralité comme mode opératoire

C’est loin d’être la vision de Laura Kröger, 21 ans, membre des Jeunes contre le G20, qui coordonne au même moment un cortège de collégiens, lycéens et étudiants anti-G20. Selon l’étudiante en sociologie à l’université de Hambourg, les réseaux sont indispensables pour diffuser leur message.

« Ça permet de communiquer avec le monde entier mais aussi d’organiser des trucs cool qu’on aurait eu du mal à mettre en place sans. »

Pour se tenir au courant, elle se rend surtout sur le fil Twitter du Block G20, l’un des collectifs les plus actifs, dont la méthode consiste à former plusieurs groupes vêtus de couleurs éclatantes répartis dans différentes zones de la ville et se dirigeant vers la « zone rouge », où se trouvent les délégations.

« Doigts bleus et rouges réunis, contournant la zone rouge ! »

Autre illustration du sens de l’organisation dont font preuve les militants en ligne, le site g20hambourg.org fournit une carte de la ville, régulièrement mise à jour, qui indique, entre autres, où sont situés les postes de contrôle connus de la police et les centres de premiers soins installés par les militants.

Le site g20-protest.de propose une plateforme de couchsurfing où sont répertoriés plus de 200 Hambourgeois prêts à accueillir des Allemands ou des internationaux chez eux le temps du week-end. Et Sonderzug-nog20.org organise une vente solidaire de billets de train pour que mille étrangers sans le sous puissent venir à Hambourg gratuitement.

« Comment bloquer le G20 ? Que faut-il amener ? […] Tips and Tricks. »

Les anti-G20 ne sont pas les seuls présents sur le terrain numérique. La police de Hambourg – dont les effectifs ont été renforcés à hauteur de 20 000 agents à l’occasion du sommet – se sert également abondamment de Twitter pour communiquer.

Entre les messages précisant le nombre de blessés dans ses rangs et ceux appelant les manifestants à « se distancier des auteurs de violences », la patrouille connectée cumule les retweets, et donc la visibilité, en postant des photos de graffitis « Kill cops » et de dalles délogées.