Renault fête ses 40 ans en formule 1 à Silverstone
Renault fête ses 40 ans en formule 1 à Silverstone
Par Catherine Pacary
Le 16 juillet 1977, Renault entrait en formule 1 et inventait le premier moteur turbo ; quarante ans plus tard, ils se cherchent un pilote et réinventent… la théière.
Le pilote Jolyon Palmer sait que c’est lors des qualifications qu’il doit progresser entre Spielberg (photo le 8 juillet) et Silverstone, le 15 juillet. | DARKO BANDIC / AP
Le 16 juillet 1977, une drôle de formule 1 jaune et noir se présente sur la piste de Silverstone, la RS01 Renault, première dans l’histoire de la F1 à être propulsée par un moteur « turbocompressé ». Au volant, le pilote français Jean-Pierre Jabouille. Mais assez vite, la RS01 semble en difficulté et rejoint les stands au 16e tour, contrainte à l’abandon sur panne moteur. Une abondante fumée blanche s’échappe du capot. Le paddock est dubitatif et les commentateurs perplexes devant cette monoplace « fumante ». « A yellow teapot ! » (une théière jaune), se moque le patron d’écurie Ken Tyrrell.
« Cela ne marchera jamais », aurait déclaré Jean-Pierre Jabouille pendant les essais. La difficulté, pour le pilote, est d’anticiper le temps de réponse du turbo et sa brutale accélération. « Seul, en essais, j’y arrivais plutôt bien, mais dans le trafic, c’était autre chose !, confiait Jabouille en 2007. C’est pourquoi nous avons décidé de faire nos débuts à Silverstone car le tracé rapide n’était pas trop défavorable. » Le pilote et sa RS01 devront attendre le Grand Prix de France à Dijon en 1979, pour décrocher leur première victoire, soit deux ans, ce qui à l’échelle du temps de la F1, est très peu.
1977 Renault RS01 : l'incroyable histoire de la première F1 à moteur turbo
Durée : 05:17
Onze titres pilotes et douze titres constructeurs plus tard, Renault aligne deux yellow teapots, dimanche 16 juillet, à Silverstone, à l’occasion du Grand Prix de Grande-Bretagne, après avoir racheté, à la fin de 2015, l’écurie britannique Lotus pour redevenir « constructeur à part entière ». Le turbo, abandonné en 1989, est de retour depuis 2014 mais hybridé. Une nouvelle technologie qui, une fois encore, nécessite du temps. Le champion maison de 1993, Alain Prost, n’est plus au volant mais conseiller spécial de l’écurie depuis février.
Dans les baquets, Nico Hülkenberg, dont le contrat court jusqu’à la fin de 2019, alors que celui du Jolyon Palmer expire en décembre. Pour sa septième année dans l’élite automobile, le pilote allemand de 29 ans attend sa première victoire et se classe à la 12e place au général. Quant au Britannique, âgé de 26 ans, il est « le maître de la 11e place », comme il le relevait avec humour à l’issue du Grand Prix d’Autriche du week-end dernier.
Le contrat du pilote Renault Jolyon Palmer arrive à expiration en décembre. | RONALD ZAK / AP
Alors que le Grand Prix du Royaume-Uni marque la mi-saison, les yellow teapots sont en quête de pilote. Après le début de saison exceptionnel du débutant français Esteban Ocon, le directeur de Renault Sport Cyril Abiteboul a reconnu « regretter » avoir cédé le jeune pilote prometteur à Mercedes en 2016.
Faute d’avoir un rookie, Renault regarde donc vers les trentenaires. Après des essais en simulateur en septembre 2016, le pilote Robert Kubica, 32 ans, a couru 115 tours sur le circuit de Valence (Espagne), en juin, soit l’équivalent d’un Grand Prix et demi, au volant d’une Lotus E20 de 2012 aux couleurs de Renault Sport F1, la même que celle que Kimi Räikkönen a mené à la victoire la même année à Abou Dhabi. Vainqueur du Grand Prix du Canada en 2008, Robert Kubica a eu sa carrière en F1 interrompue par un grave accident de rallye en 2011. Depuis, après un retour gagnant en rallye en 2013 (WRC2), il a tâté de la Formule E et de l’endurance sans conclure. Au début de juillet, Renault aurait confirmé, selon F1i.com, organiser une deuxième cession d’essais.
Parallèlement, nul n’ignore que le fougueux pilote espagnol Fernando Alonso, 35 ans, veut quitter McLaren-Honda à la fin de la saison, après avoir été contraint à six abandons en huit Grands Prix – dont la dernière fois à Spielberg (Autriche) le 9 juillet, après à peine un tour. « Ferrari ou Mercedes ne le prendront pas, affirme au Monde un ancien pilote de F1. Ils l’adorent, mais ses déclarations sont trop incontrôlables. » Renault, avec qui Alonso a remporté ses deux titres de champion du monde (2005 et 2006), est-il un recours ?
Alonso ? « Ce serait un honneur de l’avoir, mais… »
Dans un entretien au site Nextgen-Auto.com, le quadruple champion du monde français ferme poliment la porte : « Dans le cas de Fernando… Il a été champion du monde avec Renault il y a plus de dix ans, donc, bien entendu, ce serait un honneur de l’avoir, mais, d’un autre côté, on sait qu’il veut gagner tout de suite. Et je pense qu’on ne peut pas lui donner une voiture pour gagner tout de suite. Donc le problème n’est pas facile à résoudre. »
Restent les pilotes qui ont du temps devant eux. Jolyon Palmer tire les leçons de Spielberg et s’enthousiasme à l’idée de courir à domicile ce week-end. « Je dois mettre l’accent sur de meilleures qualifications. (…) Silverstone est un beau tracé que j’affectionne avec ses nombreux virages rapides. J’espère qu’il s’agira du circuit qui me permettra d’entrer dans les points. »
Le pilote britannique a pris la onzième place des essais qualificatifs, samedi, alors que son coéquipier Nico Hülkenberg réussissait sa meilleure performance depuis le retour de Renault en F1, il y a dix-huit mois, puisqu’il partira en sixième position sur la grille de départ.
Si Silverstone n’est plus le temple de la vitesse de ses origines, en 1950, il reste un des circuits préférés des pilotes, même après une douzaine de modifications de son tracé, en particulier pour l’enchaînement de ses quatre virages rapides et sélectifs de mi-circuit – Maggots-Becketts-Chapel pour les initiés – qui se négocient à plus de 300 km/h.
De quoi faire chauffer les pneumatiques et fumer les mécaniques ? Pas de grande innovation technologique en tout cas au programme chez Renault pour cette course anniversaire. Juste la sortie… d’une vraie théière. Jaune, bien sûr.
Les temps forts de Renault en F1
C’est l’histoire d’un « come-back » attendu. Renault a annoncé, jeudi 3 décembre, par la voix de son PDG, Carlos Ghosn, son retour au plus haut niveau en rachetant Lotus, l’écurie qu’il avait vendue, entre 2009 et 2010, à Genii Capital.
La marque française a une longue histoire en formule 1, avec notamment deux titres constructeurs (2005-2006) et cinq couronnes mondiales glanées en huit saisons comme motoriste. Ses pilotes ? De Jacques Villeneuve à Fernando Alonso ou Sebastian Vettel, mais aussi Michael Schumacher, Damon Hill.
Renault wins its first GP 1979
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1978-1979 : première victoire en Grand Prix de Renault constructeur. Après une première saison partielle, Jean-Pierre Jabouille marque les premiers points de Renault F1 – et d’un moteur turbo – au Grand Prix des Etats-Unis, en arrivant 4e. Après avoir gagné les 24 Heures du Mans, l’écurie décide de se concentrer sur la F1 et aligne la saison suivante une seconde monoplace, conduite par René Arnoux. Les duels avec Ferrari sont mythiques. Côté résultats, Jean-Pierre Jabouille signe la première pole position en Afrique du Sud et remporte son premier Grand Prix en France, sur le circuit de Dijon.
Circuit d'Estoril (Portugal), le 21 septembre 1986, de gauche à droite, les pilotes Ayrton Senna, Alain Prost, Nigel Mansell et Nelson Piquet. | DOMINIQUE FAGET / AFP
1985 : premier départ, partiel. Renault se retire de son activité de constructeur mais reste motoriste de Lotus – déjà –, Ligier et Tyrrell. Sur les circuits, le Brésilien Ayrton Senna signe 8 poles positions pour 2 victoires. En coulisses, dans les bureaux d’étude de Viry-Châtillon (Essonne), les ingénieurs planchent sur le V10 du futur, la nouvelle réglementation imposant des moteurs atmosphériques. En 1988, fin prêt, Renault s’associe avec l’écurie Williams.
Jerez 1997 - The Final Lap
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1991-1997 : premier retour, et re-départ. Nigel Mansell, arrivé en 1990 avec de grandes ambitions, offre en 1992 à Renault son premier titre dès le mois d’août. Alain Prost rejoint Williams en 1993 et gagne le titre mondial avant de prendre sa retraite. Parallèlement, Renault s’engage en 1995 avec le team Benetton. Aux manettes, Michael Schumacher, qui remporte le titre des pilotes en 1995, avant Damon Hill en 1996 et Jacques Villeneuve en 1997. Avec les deux écuries, Renault aligne six titres entre 1992 et 1997, et gagne 74 % des Grands Prix entre 1995 et 1997. Difficile de faire mieux. Renault se retire de la formule 1, mais Williams, Benetton et BAR continuent d’utiliser ses moteurs sous les appellations Supertec, Mecachrome et Playlife.
F1 Spa 2005 Fernando Alonso Renault R25
Durée : 02:21
2001-2007 : deuxième retour du motoriste. Renault rachète la team Benetton pour devenir une écurie à part entière dès 2002. Les doubles titres de champion du monde constructeurs 2005 et 2006 couronnent le moteur turbo, grâce à Fernando Alonso et Giancarlo Fisichella, qui mettent fin à six années de la suprématie Ferrari-Schumacher (de 1999 à 2004). Malgré le règlement de 2006 qui impose le passage du moteur V10 au V8, l’écurie remporte encore une fois les deux titres.
Sebastian Vettel pilote la Red Bull Renault lors du Grand Prix d'Australie, 18 mars 2012. | PAUL CROCK / AFP
2007-2013 : la domination Red Bull-Vettel. Un partenariat est conclu avec Red Bull Racing (RBR). Parvenus au top, les deux pilotes Sebastian Vettel et Mark Webber se battent pour le titre en 2010 : Vettel devient le plus jeune champion du monde de l’histoire de la F1 ; RBR gagne le titre constructeurs. En 2011, Renault redevenu simple motoriste, l’écurie est rebaptisée Lotus Renault GP. Sebastian Vettel conquiert encore un second titre – à quatre Grands Prix de la fin de la saison ! – et devient, en 2012, le plus jeune triple champion du monde. Les quatre écuries du Losange finissent dans les dix premiers du championnat constructeur avec 9 victoires, la saison la plus performante de Renault à ce jour. En 2013, dernière saison du moteur V8 RS27, Sebastian Vettel devient quadruple champion du monde. Avec cinq couronnes mondiales glanées en huit saisons, Renault s’affirme ainsi comme le motoriste le plus titré de l’ère des moteurs V8.
La Lotus du Français Romain Grosjean, lors du Grand Prix d'Abou Dhabi, le 29 novembre. | ANDREJ ISAKOVIC / AFP
2014-2015. La main passe. Après le passage forcé au moteur hybride, beaucoup plus coûteux, Renault motoriste n’excelle plus. Le duo Mercedes-Lewis Hamilton en revanche maîtrise parfaitement et rafle tous les titres. A la fin de 2015, il faut choisir entre abandonner la F1 ou redevenir une écurie à part entière, en rachetant la Britannique Lotus, en péril financier. Le PDG, Carlos Ghosn, annonce sa décision le 3 décembre. « Après analyse détaillée, j’ai pris ma décision, dit-il : Renault sera présent en formule 1 dès 2016. »
Le promoteur de la F1 Bernie Ecclestone (au centre) dans les paddoks du circuit d'Abou Dhabi, salue le directeur général de Renault Sport F1 Cyril Abiteboul (à droite), le 28 novembre. | ANDREJ ISAKOVIC / AFP
20 mars 2016. Premier Grand Prix en Australie de Renault « écurie historique », un titre accordé par le promoteur de la F1, Bernie Ecclestone, à un cercle fermé d’écurie (Williams, McLaren, Mercedes, Ferrari et Red Bull), qui permet de bénéficier de meilleures primes. Restent quelques interrogations, parmi lesquelles : qui sera au volant ?