TV : «Take Shelter », l’apocalypse selon Jeff Nichols
TV : «Take Shelter », l’apocalypse selon Jeff Nichols
Par Isabelle Regnier
A voir aussi. Le cinéaste américain signe un film sur la peur comme moteur fondamental de l’existence (sur TCM Cinéma à 20 h 45).
TAKE SHELTER official movie trailer in HD!
Voilà un film qui vous plonge dès le premier plan dans son atmosphère, et ne vous laisse plus en réchapper. Un climat de menace qui prend naissance entre les branches d’un grand arbre sur lequel s’ouvre le film. Alors que le vent s’engouffre dans la ramure, le ciel vire, en quelques secondes, du gris clair au gris foncé. Un nuage terrifiant avance vers l’objectif, bientôt déchiré par des salves d’éclairs. Un cyclone se prépare. Peut-être pire.
Sur le seuil d’une petite maison américaine typique, un homme se tient debout, seul, le regard inquiet, il scrute le ciel. C’est Michael Shannon, formidable acteur dont le personnage, ici, s’appelle Curtis La Forche. Il est chef de chantier, marié à Samantha (Jessica Chastain). Le couple a une petite fille, sourde et muette, qu’ils espèrent pouvoir faire opérer pour lui permettre d’entendre.
Curtis fait des cauchemars violents. La tornade qui avance en est l’un des motifs récurrents. Au réveil, il en porte les stigmates dans sa chair et ses rêves se prolongent en hallucinations. Il voit des éclairs, des nuées d’oiseaux noirs sillonnant le ciel, résurgence explicite de ceux d’Hitchcock. On pense qu’il devient fou. Il le pense aussi. A l’âge de 30 ans, sa mère a sombré dans la schizophrénie, Curtis sent que c’est son tour.
TAKE SHELTER - Movies 2011 - Sci Fi Movies Full Length [ HD 1080 ]
Take Shelter (« abrite-toi »), littéralement, est un film sur la peur. La peur comme moteur fondamental de l’existence. Avec ce personnage de père de famille modèle qui perd pied et détruit progressivement tout ce qu’il avait construit, l’auteur décline ce sentiment sur un mode kaléidoscopique. Peur des catastrophes naturelles ou d’un accident industriel, peur qu’il arrive malheur à l’enfant, peur de ne plus pouvoir subvenir à ses besoins, de perdre son assurance-maladie, de devenir schizophrène.
Rien n’est appuyé. Nichols s’en tient à la chronique familiale et distille, par petites touches, des indices sur la fragilité économique du foyer, sur le bon vouloir de la mutuelle, sur le climat de la crise économique ou les risques de pollution chimique…
Un foyer américain moyen de l’ère postindustrielle, en période de marasme, qui peut basculer d’un coup, du tout vers le rien. C’est ce que suggère le contraste entre le portrait de la famille heureuse, fait au début du film, et les rêves pesants qui le hantent.
Take Shelter, de Jeff Nichols. Avec Michael Shannon, Jessica Chastain (EU, 2011, 90 min).