Après le veto de Duda, que deviennent les lois polonaises ?
Après le veto de Duda, que deviennent les lois polonaises ?
Par Jakub Iwaniuk (Varsovie, correspondance), Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, bureau européen)
Une grande incertitude plane sur le comportement à venir de la majorité ultraconservatrice, le PiS, qui a mal vécu la décision présidentielle.
Le président du PiS, Jaroslaw Kaczynski (au milieu du premier rang), à Varsovie, le 20 juillet. | AGENCJA GAZETA/REUTERS
Le président Andrzej Duda a décidé de prendre en main l’avenir de la réforme du système judiciaire polonais. « Les lois sur la Cour suprême et le Conseil national de la magistrature sortiront de la chancellerie du président, ce seront des projets de lois présidentiels », a annoncé, lundi, le porte-parole de la présidence, Krzysztof Lapinski. Il a aussi indiqué qu’elles passeraient par « un large processus de consultation », que le président espère boucler dans un délai de deux mois.
M. Duda a reçu, lundi 24 juillet, la présidente de Cour suprême, Malgorzata Gersdorf, ainsi que le président du Conseil national de magistrature, Dariusz Zawistowski. Mme Gersdorf a vanté une atmosphère « amicale et de dialogue. » « J’ai remercié le président pour sa décision, même si nous espérions qu’il mette également son veto sur la troisième loi [sur le régime des tribunaux de droit commun, placé sous la coupe du ministre de la justice]. Concernant les travaux futurs sur la loi, nous avons déclaré notre disposition intellectuelle à coopérer à sa création. »
« M. le président a déclaré qu’il souhaite nommer un groupe d’experts qui travaillera sur un nouveau projet de loi. Nous pensons que c’est très positif, a, pour sa part, estimé Dariusz Zawistowski. J’ai l’impression que le président comprend que les futurs changements doivent être en accord avec la Constitution. »
« Prudence dans les annonces »
Une grande incertitude plane sur le comportement dans les jours à venir de la majorité ultraconservatrice, qui a particulièrement mal vécu le double veto présidentiel. Le président a aussi reçu, durant une heure et demie, la chef du gouvernement, Beata Szydlo, ainsi que les présidents de la Diète (la Chambre basse du Parlement) et du Sénat. « Le veto présidentiel a ralenti le travail sur la réforme, a déclaré Mme Szydlo. Nous ne pouvons pas céder aux pressions de la rue et de l’étranger. Nous ne reculerons pas sur notre route de réparation de l’Etat, nous ne céderons pas aux pressions. »
Malgré l’annonce du veto présidentiel, des milliers de manifestants sont sortis, lundi 24 juillet, dans les rues de Varsovie et de nombreuses villes de province. Beaucoup tenaient à « remercier » le président pour son geste, d’autres réclamaient un veto sur le troisième texte controversé.
A Bruxelles, la Commission européenne est restée prudente, après l’annonce de M. Duda. Elle maintient la discussion de fond, prévue lors de la réunion de son collège, mercredi 26. « Ce sera seulement l’un des paramètres du débat », indiquait Margaritis Schinas, le chef des porte-parole. « On a déjà vu beaucoup de choses dans ce dossier, et nous sommes prudents avec les annonces », confirmait une autre source. Et d’ajouter : « Ce possible veto ne concerne que deux lois, nous avons exprimé notre préoccupation à propos de deux autres textes. » Mais pour Bruxelles, un coin a été enfoncé dans le bloc jusque-là monolithique du PiS, il faut pousser l’avantage et maintenir un discours de grande fermeté.