Près de 36  millions de tonnes de blé devraient être récoltées en France en 2017. Soit 30 % de plus que l’an dernier. | STEPHAN AGOSTINI / AFP

Les dernières moissonneuses-batteuses sont encore dans les champs. Mais l’essentiel de la moisson de blé est engrangé. Une récolte qui se termine en avance par rapport au calendrier habituel. Et qui redonne le sourire à beaucoup de céréaliers. Ou en tout cas à la filière céréalière dans son ensemble.

Même si le bilan n’est pas définitif, on s’achemine vers « un rendement moyen de 70 à 71 quintaux de l’hectare, soit dans la moyenne des cinq dernières années », affirme Rémi Haquin, président du conseil spécialisé de la filière céréalière de l’organisme public FranceAgriMer. Un résultat, en volume, qualifié donc de « moyen » par Philippe Pinta, président de l’AGPB (Association générale des producteurs de blé).

Mais il est à nuancer. « On constate une très grande hétérogénéité entre régions, voire entre exploitations voisines avec des rendements variant de 40 à 100 quintaux l’hectare », explique M. Haquin. Là où les sols se dessèchent vite, les cultures ont souffert. La Lorraine, la Bourgogne, comme la Haute-Marne, ont été particulièrement touchées.

Un grain de bonne qualité

Il est vrai que le soulagement de la filière intervient après des moments de grande inquiétude. La sécheresse du printemps a coupé quelques épis. Surtout, raconte M. Haquin : « Nous avons eu très peur en juin avec les fortes chaleurs. L’état des cultures était toutefois suffisamment avancé pour absorber le choc ».

Mais le véritable motif de satisfaction n’est autre que la qualité du grain. Et là, le satisfecit est général. Il n’est pas humide, gage d’une bonne capacité de conservation. Son poids volumique est tel qu’il réduira les coûts de transport. Enfin « le taux de protéine est élevé. Il est supérieur à 12 %. Sur mon exploitation, il atteint même 13 %, du jamais-vu », se réjouit M. Pinta. Un paramètre-clé pour satisfaire les boulangers, mais aussi les marchés étrangers. En particulier pour répondre aux cahiers des charges des pays du Maghreb, premier bassin d’exportation du blé français, qui exigent des taux de protéines supérieurs à 11,5 %.

Globalement, les céréaliers français devraient engranger cette année près de 36 millions de tonnes de blé. Rien de comparable à 2016, qui restera dans les mémoires comme une année noire. La récolte de blé était tombée à 27,6 millions de tonnes et la qualité du grain n’était pas non plus au rendez-vous. Le choc avait été d’autant plus rude que l’année précédente était celle de tous les records avec un volume historique de 41 millions de tonnes. A cette contre-performance culturale, commune à quasiment l’ensemble des céréales, s’était ajoutés des prix bas. Résultat, la filière céréalière a vu s’envoler près de 3,5 milliards d’euros en 2016 par rapport à 2015, contribuant à la baisse de 6,6 % de la valeur de la production agricole française, estimée au total à 69,5 milliards d’euros. Sachant que les céréales ont représenté 11 % de ce montant.

Une inconnue de taille : le prix

Cette année, le soulagement est donc de mise sauf dans les régions touchées pour la deuxième année d’affilée. D’autant que la récolte d’orge est très favorable en volume, en progression de 17 % par rapport à 2015 à plus de 12 millions de tonnes, de même que celle de blé dur, estimée à 2 millions de tonnes, en hausse de 20 %.

Reste une inconnue de taille : le prix. Les regards sont donc tournés vers les marchés mondiaux. Le cours du blé s’est échauffé fin juin alors que les bulletins météo annonçaient une sécheresse persistante dans le grenier à blé américain à une période charnière pour le devenir de l’épi. A Paris, la tonne de blé a dépassé, mi-juillet, le seuil des 180 euros. Un niveau qu’il n’avait plus atteint depuis un an. Mais l’annonce de pluies bienfaisantes pour les cultures outre-Atlantique et la publication des statistiques du ministère de l’agriculture américain ont refroidi les ardeurs. Ce dernier estime que les stocks de blé au niveau mondial resteront quasiment inchangés à 260 millions de tonnes. C’est le poids des excellentes récoltes mondiales qui continuent à peser sur les cours. Lundi 24 juillet, le cours du blé a continué à se replier, terminant la séance à 169 euros la tonne sur la place de Paris. « Le compte n’y est pas pour boucher le trou de l’année dernière », estime M. Pinta. « Cela fait du 150 euros la tonne sortie ferme, il faudrait au moins 10 euros de plus », affirme M. Haquin. Les céréaliers français espèrent bien une remontée des cours pour vendre au mieux une récolte de qualité.