Les Pussy Riot recréent leur prison sibérienne
Les Pussy Riot recréent leur prison sibérienne
Par Mathilde Dumazet
L’opposante russe Nadejda Tolokonnikova lance une campagne de financement pour monter un spectacle militant à Londres, inspiré de son emprisonnement en Russie.
L’un des prix de la campagne de financement participatif : un tirage montrant la Pussy Riot posant en costume de prisonnière. | Jonas Akerlund
Nadejda Tolokonnikova, la chanteuse du groupe Pussy Riot, veut mettre à profit son incarcération en Sibérie. Libérée en 2013, elle avait passé un an et demi en prison pour avoir récité une « prière punk » contre le président Poutine dans la cathédrale du Christ Sauveur à Moscou, en 2012. Dans des conditions difficiles : alors qu’elle effectuait une grève de la faim pour protester contre les conditions de sa détention, Nadejda Tolokonnikova s’était vue temporairement privée d’eau potable. Pour aller au-delà de l’indignation suscitée par son témoignage, elle proposera, en novembre, une expérience théâtrale participative à Londres, dans laquelle les spectateurs pourront « faire l’expérience de ce qu’ont vécu les Pussy Riot durant leur emprisonnement ».
La performance aura lieu en toute légalité pendant six semaines, fait plutôt inédit pour les membres du groupe punk contestataire, plus habituées aux interpellations violentes qu’à l’accueil chaleureux. Mais cette fois, les musiciennes ont reçu une invitation en bonne et due forme de la compagnie britannique Les Enfants Terribles, spécialisée dans le théâtre participatif : cette dernière a acquis sa notoriété grâce au 150e anniversaire d’Alice au Pays des Merveilles, en proposant aux spectateurs une immersion dans des décors spectaculaires inspirés du livre. Pour ce collectif, « le moment est absolument parfait pour rappeler au public ce qu’il s’est passé et dénoncer la fragilité des droits fondamentaux et de la liberté d’expression. »
Trois des membres de Pussy Riot avaient été emprisonnées pour « hooliganisme » en 2012. Ce qui ne les empêche pas de continuer leur contestation : le groupe soutient la candidature à la présidentielle russe d’Alexeï Navalny, l’opposant principal au régime, quand bien même il a été déclaré inéligible par la commission électorale, à moins d’un an de l’échéance.
C’est pour lutter contre les « tendances autoritaires et misogynes de droite » que Nadejda Tolokonnikova a décidé de monter ce spectacle, a-t-elle confié à l’AFP, en incluant dans cette catégorie la politique de Donald Trump. Ce contexte international, ajouté aux célébrations du centenaire de la révolution russe, offre une opportunité à l’événement et Les Enfants terribles comptent bien en profiter. Maria Alekhina, une autre membre des Pussy Riot, a elle aussi monté sa propre pièce de théâtre. Intitulée Révolution et consacrée aux origines du groupe, elle a été présentée en mars à New York.
Les Pussy Riot imaginent dans leur dernier clip la vie sous Donald Trump
Durée : 00:49
Financement participatif
Forte du soutien de plusieurs associations de défense des droits de l’homme et de sa renommée internationale, Nadejda Tolokonnikova compte associer les spectateurs à chaque étape du projet : de son financement jusqu’à la représentation. En quelques heures, le projet a récolté plus de 1500 livres sterling (1678 euros) versées par une trentaine de donateurs sur la plateforme de financement participatif Kickstarter. « Nous espérons que cette production sera financée par des gens normaux du monde entier, des gens qui seront enthousiastes à l’idée d’un théâtre immersif et politique », écrit-elle sur la page.
we've raised the first £1,000!
thank you all who backed our political immersive art project! it's important for us
https://t.co/hNFPqQIPmX
— pussyrrriot (@Pussy Riot)
En échange des dons, la plateforme propose des récompenses aux noms explicites. « Kill the sexist » : les internautes qui ont versé une contribution de 25 livres (28 euros) sont invités à écrire un message au président russe et à se prendre en photo cagoulés comme les Pussy Riot. Le tout sera imprimé sur une carte postale « envoyée amicalement à Vladimir Poutine en prévision de l’élection ».