On a testé… Shadow, le PC dématérialisé « made in France »
On a testé… Shadow, le PC dématérialisé « made in France »
Par Damien Leloup
Lancé il y a quelques mois, le Shadow propose un PC complet et puissant accessible uniquement à distance, sur un modèle d’abonnement.
Un PC puissant, accessible tout le temps, de partout… La start-up française Blade propose depuis quelques mois – et au compte-gouttes – un service pas totalement nouveau, mais d’ordinaire plutôt destiné au monde de l’entreprise : un ordinateur dématérialisé. Contre un abonnement variant entre 30 et 45 euros mensuels selon la durée d’engagement, le Shadow offre l’accès à un PC gamer (Nvidia GeForce GTX 1070, processeur 4 core, 15 Go de RAM…) à distance. Un ordinateur auquel on peut accéder de plusieurs manières : grâce à un petit boîtier que l’on branche à son écran, tout d’abord, mais aussi via des applications Windows, Mac OS ou Android.
Un même PC, tout le temps, à distance, mais accessible de différentes manières : une promesse séduisante, qui ouvre des possibilités nouvelles d’utilisation – mais qui vient aussi avec quelques désagréments.
Autant le dire tout de suite : les premiers essais de Pixels avec le Shadow ont été frustrants. L’installation est pourtant très simple : il suffit de brancher son boîtier à un écran et à une prise Ethernet pour accéder à son PC, sur lequel il suffit de paramétrer son installation Windows comme pour n’importe quel PC physique. Mais le boîtier souffre de quelques défauts : pas de Wi-Fi (pour garantir la stabilité de la connexion), un nombre limité de ports USB (quatre), et un bruit un peu plus fort que ce qu’on s’attendrait à entendre de la part d’une si petite machine.
Via le Shadow, on peut jouer à « Overwatch » sur des machines ridiculement peu puissantes. / Le Monde.fr
Rien de rédhibitoire : c’est surtout au moment de tester le caractère portable du service que les déconvenues ont été les plus nombreuses. L’application Windows qui permet d’accéder à son PC a refusé de s’installer sur un premier PC – carte graphique non compatible. Le boîtier lui-même, facilement transportable, ne fonctionnait pas sur le réseau du Monde, non pas en raison d’un problème lié au Shadow, mais à cause des restrictions de sécurité dudit réseau.
En revanche, dès la bonne configuration trouvée, le Shadow montre toute sa puissance : sur un tablet PC d’entrée de gamme (Asus T100HA), une fois la résolution d’écran correctement réglée, il permet de jouer sans aucun problème à des jeux récents et gourmands, y compris sur une connexion Wi-Fi peu véloce. The Witcher 3 : Wild Hunt fonctionnait ainsi parfaitement sur une machine totalement incapable de le faire fonctionner normalement, et sans drainer plus que de raison la batterie du micro portable.
Stable même pour des jeux en ligne
« The Witcher 3 » sur téléphone, c’est possible.
Dans ces conditions plutôt acrobatiques, même les jeux de tir multijoueurs ont plutôt bien tenu le choc – de légers ralentissements pouvaient être ressentis sur les connexions Wi-Fi les moins performantes, mais sur des titres anciens (Team Fortress 2) comme sur des très récents et gourmands en ressources (Overwatch), il était tout à fait possible de jouer de manière confortable sur une machine très limitée. Evidemment, dans ces conditions, pas question de pousser les paramètres graphiques au maximum, mais tout de même.
Plus impressionnant encore, l’application Android du Shadow fait tourner sans aucun souci votre PC virtuel sur téléphone, et fonctionne même… en 4G. On en oublierait presque qu’un téléphone n’est pas vraiment conçu pour les jeux PC, et que pour pouvoir profiter de cette fonctionnalité, une manette et/ou un clavier bluetooth sont nécessaires. Avec ses différentes applications, Shadow oblige parfois à aller à l’encontre de nos habitudes informatiques : il est par exemple tout à fait possible de démarrer une partie sur le boîtier Shadow, et de la poursuivre sans interruption de session sur une tablette. Ou encore « d’installer » en quelques minutes son PC sur l’ordinateur chez des amis pour lancer une partie d’un de vos jeux ou leur montrer une vidéo.
En version « boîtier », sur une connexion fibre commerciale classique, la différence avec un PC gamer est imperceptible : tout fonctionne vite et bien, sans aucun ralentissement. La connexion dont dispose la machine dématérialisée est également impressionnante : des jeux de plus de 10 gigaoctets se téléchargent en quelques minutes.
Bugs divers et communauté dynamique
Si l’entreprise qui commercialise le Shadow affiche des objectifs ambitieux, sa vente est pour l’instant limitée aux abonnés à la fibre, et les inscriptions ne sont ouvertes que de temps à autre. Ce qui crée un sentiment d’appartenance à une communauté assez visible sur le forum réservé aux utilisateurs, très fréquenté par les développeurs, où l’on peut signaler bugs et problèmes variés ou poser des questions.
Haut de 20 centimètres et léger, le boîtier est aisément transportable.
Produit complexe encore en développement, le Shadow n’est en effet pas exempt de dysfonctionnements plus ou moins gênants. A l’heure d’écrire ce test, un bug d’affichage spécifique empêche par exemple de jouer à Overwatch – un écran noir remplaçant celui du jeu dès le lancement. Une bonne partie des problèmes rencontrés au fil des semaines ont été corrigés entre-temps, mais l’équilibre délicat du système impose des limitations assez sévères : les constructeurs déconseillent par exemple d’installer un antivirus sur le Shadow, sous peine de plantage. Un défaut majeur pour une machine qu’on aimerait pouvoir utiliser non seulement pour du jeu mais aussi pour de la bureautique…
En termes de sécurité, justement, le Shadow transmet les données de manière chiffrée, pour éviter que votre activité puisse être interceptée par des oreilles indiscrètes. Ses serveurs sont situés en France et soumis à la loi française, ce qui fournit une forme de protection juridique contre d’éventuelles exploitations commerciales des données ; mais cela signifie également que le contenu du disque dur peut être facilement accessible, sur réquisition judiciaire, aux autorités françaises, comme pour tout service en ligne.
Après plusieurs semaines d’utilisation, le Shadow s’est donc avéré être un très bon PC gamer, mais ses quelques limitations font qu’il est difficile de l’utiliser comme unique machine multiusage. Heureusement, le temps de démarrage quasi instantané du Shadow permet de jongler facilement d’un environnement à l’autre. En complément d’une machine dévolue à la bureautique, il permettra aux amateurs de jeux en 4K de profiter des dernières sorties – on pense notamment aux joueurs et joueuses qui ont besoin d’un Mac pour des raisons professionnelles…
On a aimé :
- La technologie impressionnante
- Avoir son PC tout le temps avec soi, sur différents supports
- Une manière simple et à un prix correct d’avoir une machine de jeu toujours à jour
On a moins aimé :
- Des problèmes de compatibilité
- Le service est encore un « work in progress », avec son lot de réparations et d’évolutions
- Le boîtier pourrait être amélioré
C’est plutôt pour vous si :
- Vous avez la fibre
- Vous adorez jouer mais êtes équipé Mac
- L’idée d’ouvrir votre ordinateur pour changer sa carte graphique vous paralyse
Ça n’est pas pour vous si :
- Vous aimez customiser votre PC vous-même
- L’idée que vos données soient stockées à distance vous met mal à l’aise