Sculpture de jerrican d’essence par l’artiste koweïtienne Alia Farid. / COURTESY DE L’ARTISTE ET GALERIE IMANE FARÈS

Le musée national du Koweït, construit en 1960, est une institution historique, le tout premier du genre dans le golfe Arabo-Persique. Un symbole de modernité, imaginé par l’architecte et urbaniste français Michel Écochard. L’artiste koweïtienne Alia Farid est née en 1985, six ans avant qu’il ne soit bombardé et pillé lors de l’invasion irakienne. Après la guerre, cet emblème national est entré dans un interminable processus de reconstruction. Exposée à la galerie Imane Farès, la plasticienne y présente un travail autour du musée, composé de photos d’archives conservées dans les sous-sols du bâtiment, de planches archéologiques, mais aussi d’œuvres personnelles.

Tout commence en 2014. La jeune femme, architecte de formation, est chargée par le Conseil national pour les arts et les lettres d’assurer le commissariat de la participation koweïtienne à la Biennale de Venise d’architecture. Plutôt que d’encenser les constructions nouvelles de la pétromonarchie, elle décide d’appeler à valoriser ce musée, qu’elle n’a jamais vu ouvert et dont la rénovation altère l’héritage moderniste. Esclandres en interne. « On m’a dit : “Vous nous avez fait mauvaise presse.” Pas parce que j’étais critique, mais parce que le projet que je proposais à Venise n’était pas assez clinquant », se souvient-elle.

« Un bazar total »

Le scandale vénitien passé, elle poursuit ses investigations à Paris, et consulte les archives d’Écochard à la Cité de l’architecture. Et de s’interroger : quel sens ce musée revêt-il dans un contexte où la représentation humaine est bannie par les sociétés musulmanes, ou tout bonnement détruite par l’État islamique ? En 2016, elle obtient des autorités koweïtiennes l’autorisation de pénétrer dans le chantier et de fouiller ses sous-sols poussiéreux. « C’était un bazar total, pas du tout archivé, rempli de choses hétéroclites qui n’ont pas été triées, sans lumière ni ventilation. »

Au début, on ne lui accorde que trois jours de recherche, sous la surveillance rapprochée d’un gardien du musée. Elle en obtient finalement sept pour débroussailler la masse d’œuvres et d’images. « Et encore, ce n’était pas suffisant. Je n’ai même pas réussi à scanner un tiers de ce qu’il y a là-bas », soupire-t-elle. Après avoir montré une partie des archives à la galerie, elle dit vouloir clore ce chapitre. Jusqu’à nouvel ordre.

« Between Dig and Display. Alia Farid », Galerie Imane Farès, 41, rue Mazarine, Paris 6e. Tél. : 01-46-33-13-13. Jusqu’au 18 septembre. www.imanefares.com

Le site d’Alia Farid : www.aliafarid.net