En Catalogne, le débat sur la sécession vire aux insultes et à la haine
En Catalogne, le débat sur la sécession vire aux insultes et à la haine
Par Sandrine Morel (Madrid, correspondance)
La cheffe de file des antinationalistes de Ciudadanos, Inés Arrimadas, insultée sur Facebook, dénonce une montée de la tension sociale.
Inés Arrimadas, du parti Ciudadanos, ici au Parlement catalan, a été la cible d’insultes et d’inciation au viol sur Facebook. / LLUIS GENE / AFP
« En écoutant Arrimadas [à la télévision], je ne peux que lui souhaiter que, quand elle sortira cette nuit, elle se fasse violer en groupe, parce qu’elle ne mérite rien d’autre, cette chienne dégoûtante. » Publié sur Facebook, ce commentaire d’une internaute catalane contre Inés Arrimadas, la chef de file du parti antinationaliste Ciudadanos en Catalogne, a provoqué de vives réactions en Espagne. Mardi 5 septembre, Mme Arrimadas, qui a essuyé d’autres insultes sur les réseaux sociaux, a annoncé son intention de porter plainte contre « cette manifestation claire de haine ».
Elle a immédiatement reçu le soutien de l’ensemble de la classe politique catalane, et l’internaute en question n’a pas tardé à être licenciée de son entreprise de cotation immobilière. Il n’empêche : pour Inés Arrimadas, cet épisode est une nouvelle démonstration de la montée d’un climat de haine en Catalogne lié au conflit politique.
Le 6 septembre, elle a profité de la session parlementaire pour interpeller le président catalan, Carles Puigdemont, sur la question de cette « tension au sein de la société » liée, selon elle, au processus sécessionniste qui « affaiblit » les droits des citoyens et « manque de respect » à ceux qui ne sont pas indépendantistes. « Vous êtes sur le point de commettre l’erreur démocratique la plus grande de l’histoire de la Catalogne. De ce qui se passera, vous serez le premier responsable », a-t-elle ajouté. Et de s’inquiéter des appels de plus en plus fréquents à la « mobilisation de la rue » par les partenaires de gouvernement de M. Puigdemont.
« Divisions fausses et intéressées »
Le porte-parole socialiste, Miquel Iceta, s’est lui aussi fait l’écho des risques de déchirement de la société catalane en demandant de ne pas « créer des divisions fausses et intéressées entre démocrates et non-démocrates, bons et méchants, patriotes et traîtres, sujets et citoyens », proposant une réforme pour faire de l’Espagne un Etat fédéral. « C’est bien mieux car cela ne met pas en risque l’unité du peuple catalan », a-t-il conclu.
D’ordinaire prompt à nier la division que le défi indépendantiste aurait provoquée dans la société catalane, M. Puigdemont a assuré qu’il déplorait ces menaces « à titre personnel », pour aussitôt préciser que des indépendantistes comme lui-même en reçoivent aussi – ces derniers mois, plusieurs personnes l’ont menacé de mort sur Twitter. Mais il a surtout saisi l’occasion pour déclarer que les principales menaces, « plaintes et exclusions » viennent du gouvernement espagnol, qu’il a qualifié de « menaçocratie ».