« Seven Sisters » : Noomi Rapace fois sept
« Seven Sisters » : Noomi Rapace fois sept
Par Murielle Joudet
Le film de Tommy Wirkola se révèle être une petite série B de luxe tout à fait aimable et parfaitement affûtée.
2073, la Terre est surpeuplée et une politique de l’enfant unique a été instaurée par les autorités. Elle est très sévèrement appliquée par le Bureau d’allocation des naissances, dirigé par une femme de poigne, Nicolette Cayman (Glenn Close). Les parents qui transgressent la règle se voit retirer leur enfant, voués à être cryogénisés en attendant de meilleurs jours. C’est dans ce contexte qu’une femme met au monde des septuplés. Elle ne survit pas à l’accouchement mais son père, Terrence Settman (Willem Dafoe) décide de s’occuper clandestinement de ses sept petites-filles.
Pour leur survie, des conditions drastiques leur sont imposées : chacune ne peut sortir que le jour de la semaine correspondant à son prénom (elles sont nommées d’après les sept jours de la semaine). Elles doivent également partager une seule et même identité, celle de leur mère, Karen Settman, pour ne pas prendre le risque de se faire cryogéniser par les autorités.
Grande surprise du box-office français, Seven Sisters est sorti directement sur Netflix en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, tandis qu’il bénéficiait d’une projection sur la prestigieuse Piazza Grande du Festival de Locarno.
Tour de magie numérique
Longtemps resté dans les tiroirs, le scénario laissait craindre un fétichisme de la prouesse technique puisqu’il s’agit de multiplier le corps de son actrice principale, Noomi Rapace. Slalomant entre les écueils, Seven Sisters opère un savant équilibre entre technicité et lucidité, exploite avec beaucoup de malice son tour de magie numérique à l’intérieur d’une dystopie a priori des plus conventionnelles : un monde pré-apocalyptique, une crise écologique et démographique qui ne sert finalement que de terrain de jeu où développer une idée aussi aberrante qu’amusante.
Malgré son contexte renvoyant à la plus brûlante des actualités, Seven Sisters se focalise sur un enjeu très simple : faire tenir sept corps dans une seule et même identité, le récit basculant au moment où la mascarade est dévoilée, où les corps des sept jumelles, les uns après les autres, finissent par devenir autonomes et par ne plus coïncider avec leur commune identité. Le public assiste ainsi à l’exploit très jouissif d’une actrice jouant sept fois avec elle-même (on cherche la faille, le détail négligé sans les trouver), revêtant sept look et sept personnalités différentes, chacune correspondant à son jour de la semaine : Samedi se voit ainsi reprocher ses incessantes gueules de bois.
Le défi formel reste d’ailleurs fermement arrimé aux enjeux scénaristiques qui s’enchaînent savamment, et il faut évidemment un scénario des plus solides pour faire accepter l’idée de départ. Habile divertissement, Seven Sisters préfère d’ailleurs coupler sa virtuosité à une forme d’humilité, une qualité de plus en plus rare à l’intérieur du genre souvent très sérieux et arrogant du film de science-fiction. Loin de tout commentaire suffisant sur le cinéma à l’ère de la reproductibilité des corps, Seven Sisters se révèle être une petite série B de luxe tout à fait aimable et parfaitement affûtée.
SEVEN SISTERS - Bande-annonce VF
Durée : 02:21
Film américain, britannique, français et belge de Tommy Wirkola. Avec Noomi Rapace, Glenn Close, Willem Dafoe (2 h 04). Sur le Web : fr-fr.facebook.com/snd.films