TV : « Cartel Land », quand la population combat les « narcos »
TV : « Cartel Land », quand la population combat les « narcos »
Par Daniel Psenny
Notre choix du soir. Une plongée saisissante au cœur des milices de citoyens qui luttent contre les cartels aux Etats-Unis et au Mexique (sur France Ô à 20 h 55).
Cartel Land Official Trailer 1 (2015) - Drug Cartel Documentary HD
Durée : 02:31
Dans l’attente du mur que Donald Trump a promis de construire à la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique, les frontaliers s’organisent pour lutter contre tous les genres de trafic – principalement la drogue – dirigés par les cartels mexicains.
Dans la province de Michoacan, une zone montagneuse à l’ouest du territoire mexicain, c’est José Manuel Mireles, un médecin charismatique, qui, en 2013, a décidé de mobiliser les habitants des villages en groupes d’autodéfense. Cette milice armée est chargée de pallier l’abandon des forces de l’ordre rongées par la corruption.
« On a décidé de la façon dont on voulait mourir : en menant le combat », dit-il à ses troupes en désignant leurs ennemis : Los Viagras, un groupe de mafieux qui se présentent comme les défenseurs de la cause sociale, et le redoutable cartel de narcotrafiquants Les Chevaliers templiers, qui, malgré une perte d’influence, continuent à terroriser la population depuis des années et à produire de la marijuana, du pavot et des drogues synthétiques avec la complicité des autorités locales.
« Cartel Land », de Matthew Heineman avec Tim Nailer Foley (à gauche). / ZYLO
De l’autre côté, Tim « Nailer » Foley, ex-militaire américain, a pris la tête de l’Arizona Border Recon, un groupe paramilitaire qui patrouille le long de la frontière pour empêcher les cartels de mettre les pieds dans l’Altar, un désert considéré comme le corridor de la drogue. Tête brûlée, il agit illégalement en surveillant, avec sa petite troupe lourdement armée, tous les points de passage possibles. Une guerre en forme de cache-cache qui semble ne jamais se terminer. « Même si on n’arrête pas des trafiquants, on les empêche d’utiliser les routes, ils savent qu’on est présents », explique-t-il, un peu las.
Avec Cartel Land, le réalisateur Matthew Heineman livre un document-choc (déjà diffusé en 2016 sur Canal+) et sans concessions. Le documentaire, sélectionné pour les Oscars et récompensé dans de nombreux festivals, dont celui de Sundance en 2015(meilleure réalisation et meilleure photographie) montre la terreur et l’extrême violence qui règnent dans cette zone latino-américaine.
Cartel Land - Shootout - Now Playing In Theaters
Durée : 00:42
Le film est aussi le portrait de deux hommes totalement différents qui ne se présentent pas comme des héros. Matthew Heineman pose la question de l’autodéfense des citoyens face aux défaillances et à la corruption des Etats. « Je me suis intégré dans les deux groupes pendant plus d’un an, et le film et l’histoire ont pris une direction que je n’aurais jamais pu prévoir, expliquait le réalisateur lors de la présentation de son documentaire dans les festivals. Mais une partie du documentaire essaye aussi de comprendre ce qui pousse ces gens à faire ce qu’ils font, à prendre les armes. C’est quelque chose de très compliqué parce qu’ils sont tous là pour des raisons différentes .»
Matthew Heineman montre que la lutte contre les cartels est vaine. De nombreux trafiquants locaux se sont infiltrés dans les groupes d’autodéfense pour régler leurs comptes et dénigrer José Manuel Mireles, accusé, depuis, des mêmes exactions que celles des cartels. Arrêté en juin 2014 par l’Etat du Mexique pour trafic d’armes, il dénonce un complot et attend toujours son procès en prison.
Cartel Land, de Matthew Heineman (EU, 2016, 100 min).