Voitures connectées : à qui appartiennent les données ?
Voitures connectées : à qui appartiennent les données ?
LE MONDE ECONOMIE
Les industriels et les autres acteurs, assureurs en tête, se disputent la manne du big data produit par les automobiles, devenues de vrais smartphones roulants.
A qui appartiennent les données générées par une voiture ? La question est cruciale, à l’heure où une automobile d’aujourd’hui – véritable smartphone roulant – produit en moyenne 1 milliard d’octets par jour, mille fois plus qu’il y a simplement deux ans. Et 30 000 fois moins qu’un véhicule du futur surconnecté et autonome. Cette manne du big data – le pétrole du XXIe siècle – est l’objet d’une lutte sourde entre les industriels et d’autres acteurs, en particulier les assureurs.
Le 19 octobre, une conférence de presse discrète s’est déroulée à Paris. Les représentants de la filière – constructeurs, équipementiers, garagistes – annonçaient leur adhésion au « pack de conformité », une sorte de Yalta des données automobiles négocié avec la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).
La démarche s’inscrit dans la perspective de l’application, le 25 mai 2018, du nouveau règlement européen sur la protection des données personnelles, qui élargit le droit des personnes en matière de données. Pour mettre en place ce pack de conformité automobile, la CNIL a mené une concertation avec les acteurs de la filière mais aussi, chose inédite, avec des fournisseurs de service et de technologie connexes. Et en particulier les sociétés d’assurance.
De vifs débats
Une question, déterminer si les informations générées par une voiture constituent des données machine ou des données personnelles, a suscité de vifs débats entre les constructeurs, soucieux de ne pas disséminer « leur » data, et les assureurs, chauds partisans de l’ouverture.
La CNIL a dû sensibiliser les industriels au fait que la définition des données personnelles est très large. Elle s’étend en effet bien au-delà des éléments de l’identité d’une personne. Les données de déplacement mais aussi de consommation ou d’usure des pièces sont considérées comme personnelles dès lors qu’il est possible de les relier à quelqu’un.
Les constructeurs, qui avaient commencé ces discussions avec la CNIL afin de se protéger des géants du Web (Google, Apple, etc.) ont découvert un droit de la donnée qui ne les avantage pas. D’autant plus que la nouvelle réglementation européenne prévoit dans son article 20 qu’un individu a le droit de transmettre les données le concernant à un autre prestataire de service.
Ce « droit à la portabilité » fait le bonheur des assureurs qui voient là l’occasion de prospecter de nouveaux clients et d’offrir des prestations sur mesure aux conducteurs. De leur côté, les industriels font bonne figure. « Il est hors de question d’aller à l’encontre des demandes et des droits de nos clients », affirment en substance les professionnels de l’automobile.