Patrice Evra a été expulsé avant même le coup d’envoi du match face à Guimaraes, pour avoir asséné un coup à un spectateur, jeudi 2 novembre. / MIGUEL RIOPA / AFP

Longtemps entraîneur de football, Denis Troch s’est reconverti dans le management et la préparation mentale. L’ancien joueur du Paris-Saint-Germain revient sur l’altercation entre Patrice Evra et des spectateurs, en marge du déplacement de Marseille sur la pelouse de Guimaraes (Portugal), jeudi 2 novembre 2017, en Ligue Europa.

Quelle a été votre réaction au geste de Patrice Evra ?

Denis Troch. Je suis forcément surpris de voir un joueur sortir de ses gonds et des limites du terrain pour s’en prendre à un spectateur. Le geste est hors norme. On est toujours interpellé par la sécurité des joueurs, présents pour pratiquer un sport et parfois empêchés de le faire dans des conditions normales, à cause d’un public qui peut se mettre en transe.

La première des choses est la sécurité. Les joueurs doivent être protégés des actes physiques violents et des paroles insultantes. Un joueur qui crache, insulte ou tape est sanctionné de la même façon. On peut penser qu’ils doivent eux aussi être protégés. Il doit y avoir une protection optimale entre l’aire de jeu et l’extérieur.

Surmédiatisés et très bien rémunérés, les sportifs sont-ils tenus à un devoir renforcé d’exemplarité ?

L’exigence n’est pas en relation avec la rémunération. Qu’on soit dans un club de 3Division, de district ou en Ligue des champions, les comportements doivent être exemplaires, dans le respect des règles, d’autrui et de soi-même. L’argent n’entre pas en ligne de compte, sauf peut-être pour l’agresseur.

Avez-vous déjà été confronté à ce type de comportement en tant qu’entraîneur ?

Bien sûr. Quand les résultats ne sont pas en adéquation avec les ambitions du club et les attentes des supporteurs, il peut y avoir une animosité entre les deux. Si aujourd’hui les stades et les camps d’entraînement sont sécurisés, ce n’est pas le fruit du hasard. Parfois l’enjeu prend l’ascendant sur le sport et ses valeurs. C’est inquiétant.

On n’a pas trouvé mieux que de fermer les enceintes et sécuriser l’aire de jeu. Il y a une nécessité de doter les joueurs d’outils mentaux pour se protéger et éviter de sortir de leur mission, qui est de jouer un match dans les meilleures conditions possibles. On n’a pas suffisamment travaillé l’humain, le comportement. L’approche mentale, le fait de se concentrer sur une action, un match, ce n’est pas totalement acquis dans le monde du sport.

Des préparations mentales spécifiques sont-elles déjà dispensées ?

Il y a des prémices. C’est fondamental. Il ne faut pas mélanger le jeu, le match et les comportements hors norme qui peuvent exister. Il faut sécuriser la personne, lui donner les outils pour s’autogérer dans des moments anormaux qui pourraient survenir pendant une rencontre. Face à l’agressivité il faut être protégé physiquement – par l’organisation et les institutions – et mentalement d’une colère qui peut parfois être légitime.

L’être humain peut être interpellé sur des mauvaises performances ou un geste manqué, mais on ne peut attaquer l’homme et la personne. Quand les sportifs sortent de leurs gonds, c’est généralement après avoir été touché profondément. Des outils existent pour y faire face.