En marge de l’inauguration du Louvre d’Abou Dhabi, Emmanuel Macron a endossé son costume de chef des armées. Il a estimé, jeudi 9 novembre, que la lutte contre l’Etat islamique (EI) était en passe d’être gagnée en Irak et en Syrie et a abordé la question des conditions d’un retour en France des femmes et enfants de djihadistes français capturés en Irak et en Syrie.

Les adultes remis à la justice française

« Lorsqu’ils reviennent en France, les adultes sont soumis à la justice française, sont incarcérés, seront jugés », a-t-il dit. « Et tout ce qui a été commis fera l’objet d’un jugement, parce que c’est aussi la juste protection que nous devons à nos concitoyens. » En Irak, « nous avons des échanges permanents avec la justice (locale), que nous reconnaissons. Et quand des crimes sont identifiés pour des ressortissants français (…), ils doivent être jugés ».

« Il y en a qui peuvent revenir sans qu’ils soient rapatriés, il y en a qui peuvent être rapatriés, et il y en a qui seront jugés avec leurs familles, dans certaines circonstances, dans les pays où ils sont, en particulier l’Irak », a ajouté M. Macron.

Il n’a pas fourni de précisions sur la Syrie, où se trouvaient jusqu’à cette année, selon des sources concordantes, la plupart des femmes et des enfants de djihadistes français combattant pour l’EI aujourd’hui en pleine déconfiture sur le terrain.

« Pour les femmes et les enfants, ce sera du cas par cas (…) Cela dépend à chaque fois des pays et des situations », avait déclaré le chef de l’Etat, interrogé mercredi par France 2 sur l’épineuse question des « revenants », provoquant l’inquiétude de leurs familles qui l’exhortent à les rapatrier pour ne pas en faire « des bombes à retardement ».

Les enfants « français » de djihadistes « ont vocation à revenir sur le territoire français », a affirmé jeudi Sébastien Chenu, porte-parole du Front national, se disant « partiellement d’accord » avec le président de la République sur la question épineuse des « revenants ».

Inquiétude des proches

A la fin d’octobre, une vingtaine de « parents, grands-parents et proches des jeunes filles parties en Syrie ou en Irak » avaient envoyé une lettre à M. Macron pour lui demander de rapatrier en France les femmes françaises et leurs enfants et de faire en sorte que les premières y soient jugées en fonction de leurs actes.

Ils n’avaient jusqu’ici pas eu de réponse, le gouvernement redoublant de prudence sur le sujet, la France étant toujours marquée par le souvenir des attentats de novembre 2015, en partie perpétrés par des « revenants » de Syrie.

Les déclarations du président ont aussitôt été dénoncées par un représentant et un avocat des familles concernées. Ces propos sont « indignes » et « irresponsables », a déclaré à Amine Elbahi, dont la sœur, qui avait quitté la France en 2014 à 19 ans pour gagner la Syrie y a eu deux enfants d’un combattant de l’EI tué depuis.

« Le retour de ces enfants est un enjeu sociétal prioritaire. Les abandonner à leur sort serait faire d’eux des bombes à retardement », a abondé Samia Maktouf, avocate en lien avec certaines familles.

Selon le gouvernement, environ 1 700 Français sont partis rejoindre les zones djihadistes irako-syriennes depuis 2014. Sur ce total, 278 sont morts – chiffre qu’il admet lui-même sous-évalué – et 302 sont revenus en France, dont 66 femmes et 58 mineurs, la plupart de moins de 12 ans. Les autres ont été capturés en Syrie ou en Irak, tués dans les combats ou ont fui vers les derniers territoires tenus par l’EI ou d’autres foyers djihadistes (en Libye notamment).