Les cinq acteurs majeurs de la crise au Zimbabwe
Les cinq acteurs majeurs de la crise au Zimbabwe
Le Monde.fr avec AFP et Reuters
L’armée a bloqué les accès au Parlement, au siège du parti au pouvoir et aux bureaux dans lesquels le chef de l’Etat, Robert Mugabe, réunit ses ministres.
Des militaires dans les rues d’Harare, la capitale du Zimbabwe, mercredi 15 novembre 2017. / AP
L’armée zimbabwéenne a annoncé, mercredi 15 novembre, avoir pris le pouvoir dans le cadre d’une action visant des « criminels » entourant le président, Robert Mugabe. Dans un message, diffusé dans la nuit, le général Sibusiso Moyo, a assuré que le dirigeant de 93 ans ainsi que sa famille étaient « sains et saufs ».
L’armée zimbabwéenne intervient en pleine crise ouverte par le limogeage, la semaine dernière, du vice-président du pays, Emmerson Mnangagwa, longtemps présenté comme son dauphin.
Robert Mugabe, plus vieux chef d’Etat en exercice de la planète
Depuis son indépendance, en 1980, le Zimbabwe n’a connu qu’un seul dirigeant : Robert Mugabe. A 93 ans, ce dernier est le plus vieux chef d’Etat en exercice de la planète. Et, avant les événements de cette nuit, il avait prévu de se présenter à la présidentielle de 2018, assurant qu’il comptait régner jusqu’à ses 100 ans.
Robert Mugabe a cherché à rassurer à propos de sa santé après plusieurs voyages à Singapour cette année pour raisons de santé. / JEKESAI NJIKIZANA / AFP
Au cours de l’été, le président a cherché à rassurer après plusieurs voyages à Singapour cette année pour raisons de santé, affirmant qu’il n’était « pas en train de mourir ». Ses visites médicales en Asie sont devenues plus fréquentes au cours des dernières années.
Grace Mugabe, sa femme, a révélé qu’elle l’encourageait à désigner un successeur. Mais l’Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique (ZANU-PF, pour Zimbabwe African National Union-Patriotic Front), le parti au pouvoir, est très divisée sur l’identité de ce possible successeur. Robert Mugabe lui-même n’a pas pris position officiellement sur le sujet.
Emmerson Mnangagwa, alias « Le Crocodile »
Agé de 75 ans, surnommé « Le Crocodile » en raison de son caractère impitoyable, Emmerson Mnangagwa est l’ancien patron des services de renseignement. Il a joué un rôle-clé dans les violences qui ont ensanglanté la présidentielle de 2008, remportée par Robert Mugabe après le retrait de l’opposant, Morgan Tsvangirai.
Après quelques jours d’exil, Emmerson Mnangagwa a annoncé son retour au Zimbabwe. / TSVANGIRAYI MUKWAZHI / AP
En octobre, il a perdu son portefeuille de ministre de la justice. Il a toutefois été maintenu à la vice-présidence, dont il occupe un des deux postes depuis 2014. Ses partisans ont suggéré que cette tentative avait été ourdie par Grace Mugabe, qui a très vigoureusement démenti.
Mercredi, après quelques jours d’exil, il a tweeté pour demander aux « Zimbabwéens de rester calmes et d’écouter les informations. Je suis de retour au Zimbabwe et serai occupé au cours des prochains jours. Je communiquerai avec vous à travers les moyens de communication officiels ».
Grace Mugabe, alias « Gucci Grace »
Agée de 52 ans, Grace Mugabe est l’épouse le président zimbabwéen depuis 1996. Figure controversée, connue pour ses accès de colère, elle défraye régulièrement la chronique des pages people des magazines, ce qui lui vaut le surnom de « Gucci Grace », en référence à la marque de luxe italienne. Elle dirige la branche féminine du parti de son mari, ZANU-PF.
La rue la surnomme également « Disgrâce », en raison de ses outrances, de ses dépenses et, dernièrement, de sa virulence inquiétante.
Considérée comme l’un des dauphins potentiels de son mari, Grace Mugabe a annoncé, dimanche 12 novembre, qu’elle était prête à lui succéder. Mais elle compte de nombreux opposants au sein du parti et du gouvernement.
Ces dernières semaines, la Génération 40 (G40), la faction de Grace, a opéré une offensive interne, obtenant de Robert Mugabe qu’il limoge le vice-président Mnangagwa.
Grace Mugabe, le 9 novembre 2017. / TSVANGIRAYI MUKWAZHI / AP
L’opposition
La formation d’opposition zimbabwéenne le Mouvement pour le changement démocratique (MDC), fondé par Morgan Tsvangirai, est la principale force d’opposition au parti au pouvoir du président Mugabe, la ZANU-PF.
Le MDC a appelé, mercredi, à un retour pacifique à la démocratie constitutionnelle après l’intervention des militaires. Dans son communiqué, le parti dit aussi espérer que l’intervention militaire débouche sur « l’établissement d’un Etat-nation stable, démocratique et progressiste ».
Mais l’opposition, pour l’heure, n’est pas associée au changement de pouvoir qui s’opère.
Morgan Tsvangirai de la MDC parle avec Joyce Mujuru, une des figures de l’opposition, le 13 août 2016. / ZINYANGE AUNTONY / AFP
En 2008, le MDC avait gagné le contrôle du Parlement aux mains de la ZANU-PF depuis l’indépendance. Mais Robert Mugabe est resté président. M. Tsvangirai, arrivé en tête au 1er tour, s’étant retiré après une vague de répression contre l’opposition.
L’armée
« La purge actuelle qui vise clairement les membres du parti qui ont été engagés dans la guerre d’indépendance doit cesser immédiatement », a lancé le général Constantino Chiwenga, le chef de l’armée zimbabwéenne, en lisant un communiqué devant la presse au quartier général de l’armée. « Nous devons rappeler à ceux qui sont derrière ces dangereuses manigances que lorsqu’il s’agit de protéger notre révolution, l’armée n’hésitera pas à intervenir », a-t-il menacé.
« Nous devons rappeler à ceux qui sont derrière ces dangereuses manigances que lorsqu’il s’agit de protéger notre révolution, l’armée n’hésitera pas à intervenir », a rappelé Constantino Chiwenga – ici le 13 novembre 2017 –, le chef de l’armée zimbabwéenne. / TSVANGIRAYI MUKWAZHI / AP
L’objet de l’opération militaire nocturne est, en premier lieu, de faire triompher, au sein du parti au pouvoir, la ZANU-PF, la faction des partisans d’Emmerson Mnangagwa. Mercredi matin, le général Sibusiso Moyo a expliqué que cette opération n’était pas « un coup d’Etat contre le gouvernement » et assuré que le chef de l’Etat et sa famille étaient « sains et saufs » et « en sécurité ».
Les 10 articles du « Monde » pour comprendre la crise au Zimbabwe
Hararé s’est réveillée, mercredi 15 novembre, sous le contrôle des militaires qui ont pris le pouvoir, sous la direction du général Chiwenga, dans la nuit et placé le président Robert Mubgabe, 93 ans, en détention.
Retour sur les semaines de crise qui ont précédé le coup d’Etat en quelques articles essentiels.
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