La ministre du travail, Muriel Pénicaud, le 7 novembre 2017 à l’Assemblée nationale. / FRANCOIS GUILLOT / AFP

Il n’y a pas eu de coup de théâtre. Invités par le gouvernement à négocier sur la réforme de la formation professionnelle, les partenaires sociaux ont confirmé, vendredi 17 novembre, à l’issue d’une rencontre au siège du Medef, qu’ils se prêteraient à cet exercice. Mais ils le feront en prenant de menues libertés avec la feuille de route qui leur avait été communiquée, mercredi, par la ministre du travail, Muriel Pénicaud.

Dans ce « document d’orientation », d’une dizaine de pages, l’exécutif avait formé le vœu que les discussions s’achèvent « fin janvier 2018 » – un projet de loi devant être présenté en avril de la même année. Les organisations de salariés et d’employeurs ont décidé, vendredi, de s’accorder deux semaines supplémentaires, en inscrivant le 16 février comme date-butoir du cycle de négociations. Une dizaine de réunions sont prévues d’ici là.

Thématiques pointues

Autre petit écart : les sujets, mentionnés dans le cahier des charges de l’exécutif, seront abordés dans un ordre et selon une logique fixés par les négociateurs. Exemple : le document d’orientation mentionne comme première orientation la mise en place d’un compte personnel de formation (CPF) « facile d’accès, opérationnel et documenté ». Ce dispositif figurera bien en ouverture des échanges entre le patronat et les syndicats, mais en étant intégré dans une discussion plus large, sur l’accès aux droits et l’accompagnement des personnes. « On a restructuré la feuille de route », a déclaré Catherine Perret (CGT), vendredi. « Il y a un document d’orientation dont on ne peut s’extraire, mais on le reprend à notre main », a complété Yvan Ricordeau (CFDT). Ainsi, a-t-il ajouté, la négociation est remise « dans le bon sens ». Une façon de rappeler au gouvernement que les partenaires sociaux entendent faire des propositions et non pas se contenter de mettre en musique le programme du gouvernement.

Les autres thématiques sur lesquelles plancheront les protagonistes s’annoncent particulièrement pointues – et impénétrables pour le profane : alternance et entreprises ; certification, évaluation et qualité de l’offre de formation ; gestion des parcours professionnels et identification des besoins en compétences dans les territoires ; gouvernance et financement, etc.

Crainte d’une disparition du CIF

Plusieurs responsables syndicaux ont fait part de leurs préoccupations sur la réforme à venir. M. Ricordeau a exprimé le souhait que les discussions entre organisations patronales et syndicales associent, à un moment donné, deux autres acteurs majeurs du système : l’Etat et les régions. « On demande qu’il y ait un cadre quadripartite, a-t-il dit. Il y a un manque [à ce niveau-là], on demande qu’il soit réparé. »

D’autres centrales syndicales ont manifesté leur crainte de voir disparaître le congé individuel de formation (CIF). « C’est un outil auquel on tient beaucoup car il garantit une formation longue, ce qui est précieux, en particulier pour les salariés en reconversion professionnelle », explique Michel Beaugas (FO). Or, le document d’orientation transmis mercredi par Mme Pénicaud laisse à penser que le dispositif serait fusionné avec le CPF. Une idée à laquelle la CGT est opposée : elle vient d’ailleurs de lancer une pétition « Sauver le CIF » sur la plate-forme change.org.

Entré en vigueur début 2015, le CPF suit chaque personne tout au long de sa vie professionnelle, en lui ouvrant des droits à un certain nombre d’heures de formation. L’exécutif veut lui donner une plus grande place et simplifier son utilisation, grâce à une application numérique : l’objectif est de permettre à tout un chacun de « connaître en temps réel » les droits individuels acquis, les offres d’emploi disponibles sur un territoire donné, les formations préparant à l’acquisition des compétences requises par ces mêmes emplois et les « taux d’insertion » de ces stages. Un « cahier des charges » très ambitieux, a observé Jean-François Foucard (CFE-CGC) : « S’ils arrivent à le mettre en œuvre en trois mois, alors là, chapeau ! »