La Cravate solidaire habille les demandeurs d’emploi
La Cravate solidaire habille les demandeurs d’emploi
LE MONDE ECONOMIE
Depuis cinq ans, cette association aide les demandeurs d’emploi à paraître sous leur meilleur jour lors d’un entretien d’embauche. Sur les 2 500 bénéficiaires accueillis depuis les débuts, 70 % ont retrouvé un travail.
« En plus d’une séance de relooking et du don d’un costume, le chômeur se voit proposer une simulation d’entretien d’embauche. » / SASCHA KOHLMANN/FLICKR/CC BY 2.0
L’habit ne fait pas le moine, mais il y contribue : c’est partant de cette idée que Yann Lotodé, Jacques-Henri Strubel et Nicolas Gradziel, trois anciens étudiants en école de commerce, ont eu l’idée de fonder une association, qui fournirait à des demandeurs d’emploi un costume pour passer un entretien d’embauche, via des dons de particuliers ou d’entreprises. C’est ainsi qu’est née la Cravate solidaire, qui célébrait ses cinq ans d’activité jeudi 23 novembre.
A une époque où une veste peut s’acheter moins cher qu’un sandwich et où Emmaüs croule déjà sous les dons de vêtements, l’intérêt peut paraître limité. C’est pourquoi le positionnement de l’association a vite évolué. « Au départ, on voulait s’attaquer au problème de l’apparence pour réussir son entretien, souligne Nicolas Gradziel. Mais on ne voulait pas être un simple vestiaire ; alors on a créé un accompagnement. »
En plus d’une séance de relooking et du don d’un costume, le chômeur se voit proposer une simulation d’entretien d’embauche. « Le vêtement est un prétexte, fait valoir Catherine Lèbre, bénévole à l’association. L’objectif est de redonner confiance en soi. »
Des profils très divers
Accompagner les chômeurs, les aider à reprendre confiance en eux : n’est-ce pas le travail de Pôle emploi ? « On vient en complément », souligne Catherine Lèbre, bénévole de La Cravate solidaire. Et le besoin semble bien là : en l’espace de cinq ans, l’association a accueilli pas moins de 2 500 bénéficiaires. 70 % ont retrouvé un travail par la suite – sachant que ceux qui viennent à l’association ont déjà en vue un entretien d’embauche.
Catherine Lèbre a vu passer des profils très divers. La plupart des bénéficiaires sont envoyés par des associations et des missions locales. Tous ont en commun un parcours de vie difficile : « J’ai eu le cas d’un homme qui a passé dix ans en prison pour braquage, très réticent au départ à l’idée se mettre en situation, se souvient la bénévole. L’entretien lui a permis de reprendre confiance en lui. A la fin, il a même dessiné un petit cœur sur le tableau d’évaluation… »
Les bénéficiaires, justement, sont les grands absents de la soirée d’anniversaire organisée le 23 novembre. « Ils auraient été trop mal à l’aise », estime Cécile Vaesen, bénévole à la Cravate solidaire. Ils ont fêté l’événement en amont de cette soirée, réservée aux acteurs institutionnels et aux entreprises partenaires de l’association.
Neuf antennes sur toute la France
Du côté des entreprises, « cette initiative apporte de la cohésion. Les salariés parlent de la collecte entre eux, estime Alexandre Pruvot, qui a déjà organisé deux collectes de vêtements dans son entreprise, la filiale française de la Bank de Tokyo-Mitsubishi. La troisième collecte est programmée. « Travaillant aux ressources humaines, j’estime que l’on a la responsabilité d’aider les gens dans leur recherche d’emploi », indique le responsable, qui souligne aussi l’apport en termes de responsabilité sociale des entreprises (RSE).
La Cravate solidaire, qui a connu une forte croissance, dispose désormais de neuf antennes sur toute la France. « C’est par les entreprises et les associations qu’on va pouvoir trouver des réponses aux problèmes structurels de l’emploi en France », a déclaré Christophe Itier. Le haut-commissaire à l’Economie sociale et solidaire et à l’Innovation sociale, qui était présent à l’événement, en a profité pour annoncer le lancement d’un accélérateur d’innovation sociale, qui vise à soutenir les projets innovants dans le domaine de l’économie sociale et solidaire.
Une manière de consacrer une autre forme d’engagement de l’Etat, alors que la baisse des contrats aidés a durement touché le secteur associatif et que les agents de Pôle emploi s’estiment débordés dans leurs missions.