Les nationalistes Gilles Simeoni (à gauche) et Jean-Guy Talamoni avant un meeting à Bastia, le 30 novembre. / PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP

Les Corses s’apprêtent à se prononcer sur l’avenir institutionnel de l’île, lors du premier tour des élections territoriales, dimanche 3 décembre (le deuxième tour aura lieu le 10 décembre). Rarement un scrutin local aura précédé un tel enjeu : la mise en place, annoncée au 1er janvier 2018, d’une « collectivité unique » inédite dans l’histoire de l’organisation institutionnelle française, fruit de la fusion des deux départements de l’île avec la Collectivité territoriale.

  • En quoi consiste cette nouvelle collectivité ?

Le 1er janvier 2018, la Corse connaîtra son quatrième changement de statut depuis 1982 et deviendra la première région métropolitaine à connaître la fusion de ses deux départements et de la collectivité territoriale en une collectivité unique. Il n’y aura plus qu’une seule instance qui gérera les compétences habituellement dévolues aux départements et aux régions, en sus des compétences spécifiques dévolues à la Collectivité territoriale de Corse. Les élus assureront la gestion de l’île en matière, entre autres, de réseau routier, d’aménagement du territoire, de développement économique ou d’action sociale.

Voulue par la loi sur la nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), cette organisation institutionnelle inédite a été précisée, en matière budgétaire, financière, fiscale et comptable, par trois ordonnances ratifiées par le Parlement le 7 mars. Le budget de la collectivité devrait avoisiner 1 milliard d’euros, mais il est d’ores et déjà grevé par l’important volume de la dette, de l’ordre de 600 millions d’euros.

Les adversaires de la réforme dénoncent une « usine à gaz » qui devrait employer quelque 4 200 agents pour une population de 320 000 habitants et des incertitudes en matière de statut des agents, de temps de travail ou de rémunération. Une chambre des territoires, censée assurer une représentation du rural, regroupera les élus locaux des intercommunalités et des communes. Son rôle ne sera cependant que purement consultatif.

  • Qui se présente à l’élection ?

Les 3 et 10 décembre, sept listes se disputeront les suffrages des 140 000 électeurs corses :

  • Pè a Corsica (« Pour la Corse », nationaliste) ;
  • A strada di l’avvene (« La voie de l’avenir », droite « régionaliste ») ;
  • Voir plus grand pour elle (soutenue par Les Républicains) ;
  • Andà per dumane (« En avant vers demain », La République en marche) ;
  • Rassemblement pour une Corse républicaine (Front national) ;
  • L’Avenir, la Corse en commun (La Corse insoumise-PCF) ;
  • Core in fronte (nationaliste).

La future assemblée verra son nombre de « conseillers » porté de 51 à 63 (et 14 « conseillers exécutifs »).

  • Qui est favori ?

Les nationalistes, qui contrôlent déjà la région depuis décembre 2015, paraissent en position de force avant ce scrutin, l’opposition ayant eu du mal à s’organiser.

La droite se divise ainsi entre deux listes, les « régionalistes » d’un côté et la liste soutenue officiellement par Les Républicains de l’autre. La gauche, elle, peine à se remettre du départ de Paul Giacobbi, condamné à trois ans de prison et à cinq ans d’inéligibilité pour « détournement de fonds publics » par le tribunal correctionnel de Bastia en janvier – il a fait appel de la décision.

Seul un front de circonstance au second tour entre la droite et les néo-candidats de La République en marche semblerait en mesure de contrecarrer les visées nationalistes.

  • L’abstention, la grande inconnue ?

Le taux de participation sera observé de près lors de ce premier tour dans une île lassée des votes à répétition ces dernières années. Une note de l’Insee rendue publique en octobre montre que la Corse est la région de France avec le taux d’inscription sur les listes électorales le plus faible et l’abstention systématique la plus élevée.