Les hommes d’affaires britannique Richard Branson et américain Bill Gates à la sortie de l’Elysée le 12 décembre après une rencontre avec le président Emmanuel Macron. / CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

C’est un ensemble d’annonces disparates qui devait être dévoilé, mardi 12 décembre, au One Planet Summit, le sommet sur le climat organisé par la France à l’occasion des deux ans de l’accord de Paris. Cette série d’engagements, à l’échelle internationale et française, est censée concrétiser la mobilisation des acteurs publics et privés pour financer la lutte contre le réchauffement climatique.

Parmi ces douze « Clim’acts », qui vont des stratégies de riposte aux événements extrêmes à la protection des ressources naturelles, en passant par des mesures en faveur des véhicules électriques et des initiatives du secteur financier pour favoriser une économie décarbonée, certains mécanismes inédits côtoient des dispositifs déjà enclenchés.

Des fonds souverains s’engagent à verdir leurs portefeuilles

Parmi les annonces nouvelles, une coalition de fonds souverains, avec la Norvège en chef de file, associe le Qatar, le Koweït, les Emirats arabes unis, l’Arabie saoudite et la Nouvelle-Zélande. Ils s’engagent à travailler ensemble pour verdir leurs portefeuilles. L’Elysée pousse pour que 5 % des nouveaux engagements de ces fonds soient désormais « compatibles avec la mise en œuvre de l’accord de Paris », ce qui signifierait un renoncement aux investissements dans les énergies fossiles. Mais aucun objectif chiffré n’a encore été atteint. La Chine et Singapour sont aussi intéressés par cette initiative, assure-t-on dans l’entourage du président français Emmanuel Macron.

Un « groupe de philanthropes », réunissant une dizaine de fondations, dont celles de Michael Bloomberg, Bill Gates ou encore Richard Branson, s’engagent à augmenter la part de leurs actions en faveur du climat. Actuellement, seuls 3 à 5 % de leur force de frappe financière sont consacrés à ce domaine. Le milliardaire américain Bill Gates devrait par ailleurs porter de 300 à 500 millions de dollars (254 à 424 millions d’euros) sa contribution à un programme de financement sur la recherche climatique et ses impacts sur le monde agricole.

Du côté des investisseurs, une centaine de fonds d’investissement et de fonds de pensions, dont les poids lourds que sont les américains CalPERS et BlackRock, ou la banque britannique HSBC, « s’engagent à la transparence de leurs investissements climatiques vis-à-vis de l’ensemble de leurs actionnaires », explique-t-on à l’Elysée. Ils devraient également élaborer « une stratégie collective de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans les douze mois qui viennent ». Les institutions financières tricolores publiques, dont la Caisse des dépôts ou Bpifrance, ainsi que l’Agence des participations de l’Etat, qui ont signé lundi à Bercy une charte sur le sujet, seront également de la partie.

Des engagements publics faibles

« Le risque climatique est enfin pris au sérieux dans le monde financier – tant par les entreprises qui s’engagent plus nombreuses à la transparence sur ces risques, que les
superviseurs et banques centrales qui vont les intégrer dans leurs travaux. C’est une bonne nouvelle. Il est plus que temps »,
assure Bruno Le Maire, le ministre de l’économie.

Mais en dépit des déclarations volontaristes du gouvernement, les engagements publics apparaissent faibles. Fin novembre, Emmanuel Macron avait pourtant souhaité « obtenir une liste d’actions et d’engagements financiers concrets […] publics et privés ».

Plusieurs annonces s’apparentent davantage au fléchage « vert » de mesures déjà dévoilées. C’est le cas dans le domaine des transports, où sont rappelés les objectifs du plan climat, porté par le ministre de la transition écologique Nicolas Hulot, de mettre fin d’ici 2040 à la vente de voitures contribuant à l’effet de serre, ceux de la loi hydrocarbures ou encore ceux du plan d’investissement détaillé en septembre par l’exécutif.

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Des dispositifs déjà connus

Certains engagements égrénés au One Planet Summit de Paris ne sont que le rappel de dispositifs déjà connus, comme l’Alliance solaire internationale, lancée à l’occasion de la COP21, en décembre 2015, ou le Fonds de lutte contre la dégradation des terres et la désertification.

Cet ensemble de mesures « comprend quelques initiatives intéressantes, beaucoup de choses recyclées et dénote une absence de volonté politique forte », déplore Armelle Le Comte, d’Oxfam France.

Ce paquet d’annonces « comprend quelques initiatives intéressantes, beaucoup de choses recyclées et dénote une absence de volonté politique forte », déplore Armelle Le Comte, d’Oxfam France. Le succès de ce sommet repose largement sur « la bonne volonté des acteurs privés », estime la responsable énergie et climat de l’ONG, qui pointe l’absence de nouvelles mesures fiscales et réglementaires contraignantes. L’obligation de reporting climat (compte-rendu) comprise dans la loi de transition énergétique de 2015, pourrait, par exemple, être étendue à l’échelle européenne. Le serpent de mer de la taxe sur les transactions financières européennes, que le président Macron assure vouloir relancer, ne figure pas dans les déclarations.

Un comité de suivi associant la France, les Nations Unies et la Banque mondiale (les trois coorganisateurs de l’événement) devrait faire un point d’étape sur les engagements pris. Ce premier bilan pourrait intervenir en septembre 2018, lors du sommet des acteurs non étatiques organisé en Californie. Voire à l’occasion d’un nouveau One Planet Summit en fin d’année, en Afrique ou en Europe, veut croire l’Elysée.