« Menina » : une chronique douce-amère de la double culture
« Menina » : une chronique douce-amère de la double culture
Par Mathieu Macheret
Largement autobiographique, le premier film de Cristina Pinheiro reste trop recroquevillé sur l’ego de l’enfant, double fictionnel de la réalisatrice.
Dans la foulée de Tous les rêves du monde, de Laurence Ferreira Barbosa, et Soleil battant, de Clara et Laura Laperrousaz, ce premier long-métrage de la comédienne Cristina Pinheiro confirme une recrudescence de fictions franco-portugaises, sensibles aux problématiques des identités croisées, formant peut-être ainsi, par bouture, une sorte de sous-genre transeuropéen.
1979. La petite Luisa (Naomi Biton), 10 ans, vit dans le sud de la France auprès de parents d’origine portugaise ayant fui la dictature de Salazar. Elle perçoit avec ses yeux d’enfant les douleurs et difficultés d’un exil qu’elle ne peut pas nommer, à travers un père, Joao (Nuno Lopes), noyant son mal du pays dans l’alcool, et une mère, Leonor (Beatriz Batarda), dévorée par la frustration et le refus de la sensualité. Luisa bouche les trous d’un roman familial fragmentaire avec son imagination et découvre que son père, sujet aux quintes de toux, est atteint d’une maladie grave.
Répercussions intimes
C’est sur le fil d’une chronique douce-amère qu’on observe les répercussions intimes du déracinement et la façon dont elles envahissent les liens de filiation : les vexations quotidiennes, le décalage culturel et linguistique, le déclassement social, la lassitude et les crises domestiques… Toutefois, le film ne trouve pas la meilleure distance pour rendre compte de cette construction complexe qu’est celle de la double culture.
D’inspiration largement autobiographique, il reste trop recroquevillé sur l’ego de l’enfant, double fictionnel de la réalisatrice et unique référent d’une expérience qui aurait sans doute mérité qu’on varie les points de vue sur elle. La patine clinquante de l’image, les efforts laborieux de reconstitution, les conventions désuètes de la mise en scène, contribuent à instiller une certaine forme de complaisance : celle de la réalisatrice envers une histoire personnelle qu’elle ne se prive pas d’enjoliver.
Trailer MENINA
Durée : 01:47
Film français de Cristina Pinheiro. Avec Naomi Biton, Nuno Lopes, Beatriz Batarda, Thomas Brazete (1 h 37). Sur le Web : www.urbandistribution.fr/films/menina