« L’Echappée belle » : road movie de fin de vie
« L’Echappée belle » : road movie de fin de vie
Par Thomas Sotinel
Le réalisateur italien Paolo Virzi offre un petit cadre à deux immenses acteurs, Donald Sutherland et Helen Mirren.
Si vous avez plus de 70 ans et que vous n’avez jamais joué un vieillard frappé d’une forme ou d’une autre de démence sénile, vous n’êtes pas un grand acteur. En vertu de cette règle hollywoodienne tacite, Donald Sutherland est atteint de la maladie d’Alzheimer dans ce petit road movie tourné aux Etats-Unis par l’Italien Paolo Virzi. On aimerait voir dans les EPHAD des patients aussi altiers que l’immense acteur canadien. Mais tout le talent de Sutherland, auquel vient s’ajouter le renfort considérable du jeu de Helen Mirren (elle incarne son épouse, plus jeune, mais arrivée à la phase terminale de son cancer) ne suffit pas à éviter les pièges tendus par les ressorts dramatiques de cette Echappée belle.
Stations sentimentales prévisibles
Ella (Helen Mirren) et John (Donald Sutherland) Spencer se soustraient à la surveillance affectueuse de leurs deux enfants adultes pour remettre en service leur mobile home, baptisé le Leisure Seeker (le chercheur de loisir, d’oisiveté) et quitter le New Jersey pour la Floride, où ils espèrent visiter la maison d’Ernest Hemingway. C’est que John fut professeur d’anglais, de ceux que ses anciens élèves reconnaissent des années plus tard, à travers le brouillard des années et la brume des larmes que fait jaillir l’émotion des retrouvailles.
Plus encore que la géographie des étapes (les sites historiques du Sud – dont est originaire Madame, la côte géorgienne, les keys de Floride), ce sont les stations sentimentales de ce trajet que l’on devine à peine la clé de contact tournée pour la première fois. Il faudrait dévoiler l’issue parfaitement prévisible de l’Echappée belle pour dire tout le mal que l’on pense du procédé qui consiste à rendre comestibles (enfin… drôles, attendrissants) les derniers chapitres d’existences ravagées par la maladie. L’engagement des acteurs (Donald Sutherland sait à merveille entrer et sortir de l’état de conscience, Helen Mirren ferait presque croire qu’elle est vraiment malade) n’y change rien, il ne faut pas ciller quand on parle de ces affaires, comme l’avait bien compris Michael Haneke lorsqu’il a dirigé Amour.
L’ÉCHAPPÉE BELLE - Bande-annonce officielle - Au cinéma le 3 janvier
Durée : 01:25
Film italien et américain de Paolo Virzi, avec Donald Sutherland, Helen Mirren (1 h 52). Sur le web : www.bacfilms.com, www.facebook.com/bacfilms