Le Dakar de trop pour Sébastien Loeb ?
Le Dakar de trop pour Sébastien Loeb ?
Par Catherine Pacary
Le duo Loeb-Elena écrit depuis vingt ans les plus belles pages du rallye mondial mais ne gagnera pas le Dakar. Un rendez-vous manqué qui doit précéder leur retour partiel en WRC.
La Peugeot 3008 DKR Maxi du duo Loeb-Elena, ensablée, le 10 janvier, lors de la 5e étape du Dakar, au Pérou. / FRANCK FIFE / AFP
Le feu sacré a-t-il manqué ? L’ultime espoir de Sébastien Loeb et de son copilote, Daniel Elena, de remporter le Dakar s’est éteint, mercredi 10 janvier, dans le sable mou et piégeux du désert d’Ica, au Pérou, lors de la 5e étape. Après s’être ensablée une première fois, la Peugeot 3008 DKR Maxi du duo s’est plantée à nouveau dans une dune, blessant Daniel Elena et contraignant l’équipage à l’abandon.
« Nous avons dû terminer la spéciale au ralenti tellement j’avais mal, témoigne Daniel Elena à l’arrivée. D’habitude, je ne lâche rien mais là, je ne me sens vraiment pas de continuer. » Quelque chose s’est cassé. Depuis vingt ans, les deux hommes vivent une histoire inédite dans le sport automobile, neuf fois champions du monde des rallyes d’affilée, avant de se retirer au sommet de leur gloire du WRC, en 2012.
« Pour s’amuser »
L’Alsacien, 43 ans, et le Monégasque, 45 ans, restent inséparables. Mais rien n’est plus comme avant. Difficile de retrouver les mêmes sensations, même si Sébastien Loeb pulvérise dès 2013 le record de Pikes Peake, la course de côte du Colorado, sur asphalte. Ensemble, ils tentent plusieurs aventures « pour s’amuser ». La première les mène sur les circuits du championnat du monde de voiture de tourisme, avec Citroën (2014-2015) ; mais tourner en rond n’est pas très excitant. De plus, en France, le WRCC n’a aucune visibilité. « Je croise des gens qui me disent : “Alors, ça y est, tu as pris ta retraite ?” », confiait alors Sébastien Loeb. D’où l’idée du rallycross. Ils y retrouvent Peugeot avec un certain succès (5e en 2016, 4e en 2017) et des projets en Rallye-Raid.
Sébastien Loeb (à gauche) et son copilote Daniel Elena, après avoir percuté une dune, le 10 janvier, entre San Juan de Marcona et Arequipa, au Pérou. / FRANCK FIFE / AFP
Sébastien Loeb se laisse ainsi convaincre de participer à son premier Dakar en 2016, séduit par un tracé comme dessiné pour lui, qui fait la part belle aux pistes. A condition de rouler avec Daniel Elena, pourtant totalement novice en navigation. Le Rallye-Raid ne s’improvisant pas, l’équipage alsaco-monégasque finit honorablement 6e. Mais, piqué au vif, en 2017, il remet ça et frôle l’exploit (2e), coiffé à la dernière étape par un autre duo Peugeot, l’expérimenté Stéphane Peterhansel-Jean-Paul Cottret.
Cette troisième tentative était-elle celle de trop ? Pragmatique, Sébastien Loeb l’abordait conscient de leur point fort, « les pointes de vitesse sur piste » et de leur point faible, « le hors-piste ». Mais rien ne s’est goupillé comme il le fallait. D’abord, le tracé 2018 fait la part belle au désert, apprécié des spectateurs, mais pas du duo de pilotes, d’autant que pour la première fois, les cartes sont interdites. Ensuite, la nouvelle 3008 DKR Maxi est lourde, beaucoup plus lourde que ses rivales. Il y a également cette première étape, courue avec des freins défaillants, que Sébastien Loeb et Daniel Elena finissent 29e. En quatre jours, ils avaient réussi à remonter deuxièmes au classement général. Sébastien Loeb avait même surpris, lundi, les observateurs, descendant de voiture pour aller examiner ce qu’il y avait derrière une dune avant de s’y aventurer.
Le copilote Daniel Elena s’est blessé en tombant violemment dans un trou de sable lors de la 5e étape du Dakar, le 10 janvier, contraignant l’équipage à l’abandon. / FRANCK FIFE / AFP
Retour en rallye « sans prétention »
Rien ne s’est passé comme prévu, jusqu’à la victoire d’étape – enfin – de mardi, devenue le lendemain un handicap fatal, puisqu’elle a contraint l’équipage Loeb-Elena à ouvrir l’étape, entre San Juan de Marcona et Arequipa (267 km), c’est-à-dire à partir en aveugle dans les dunes, sans trace à suivre. C’était pourtant la dernière étape dans les sables, avant de retrouver une piste plus dure à se mettre sous les pneus, et se retrouver en terrain connu, une piste de type rallye.
« Moi ce que je sais faire, c’est trouver la meilleure trajectoire pour prendre un virage, négocier la courbe parfaite », expliquait Sébastien Loeb. C’est pour cela que, depuis 2012, il s’est accordé quelques piges pour le WRC (quatre avec Citroën en 2013 et une à Monte-Carlo en 2015). Plus des extras, comme en septembre 2017, sa participation à la course de côte de Turckheim, en Alsace.
Difficile de raccrocher ? Sébastien Loeb a encore envie d’en profiter. Il a d’ailleurs annoncé le 20 décembre son retour, toujours accompagné de Daniel Elena bien sûr, en WRC pour trois dates : au Mexique (8 au 11 mars), en Corse (5 au 8 avril) et en Espagne (25 au 28 octobre). Un rendez-vous qu’ils ne veulent manquer à aucun prix. « Les sensations du rallye sont parmi les plus fortes que j’ai connues, justifiait simplement alors Sébastien Loeb. Et j’avais envie de rouler en course avec ces nouvelles WRC. C’est sympa de le faire au sein de l’équipe [Citroën] avec laquelle j’ai tout gagné ! J’y vais sans prétentions, avec pour objectif de m’amuser. » Espérons qu’un coccyx endommagé ne va pas les en empêcher.