Prisons : alors que les syndicats appellent à débrayer, la ministre de la justice joue la médiation
Prisons : alors que les syndicats appellent à débrayer, la ministre de la justice joue la médiation
Le Monde.fr avec AFP
Nicole Belloubet reçoit les organisations syndicales pour reprendre le dialogue. Elles ont rejeté un projet d’accord négocié avec le gouvernement, ne le trouvant pas suffisant.
Nicole Belloubet a visité la prison de Borgo, en Corse, le 19 janvier, où deux surveillants avaient été agressés. / PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP
Faute de consensus sur les propositions du gouvernement, les surveillants des 188 établissements pénitentiaires français sont appelés au « blocage total » des prisons dès 6 heures. Afin de débloquer la situation et reprendre « immédiatement » le dialogue, la ministre de la justice Nicole Belloubet recevra lundi 22 janvier « l’ensemble des organisations syndicales représentatives ». Elle appelle les surveillants « à la responsabilité de chacun afin que la sécurité et le fonctionnement des établissements pénitentiaires soient assurés ».
La ministre réaffirme également « son soutien et sa solidarité aux surveillants victimes d’agressions graves et intolérables » et dit mesurer « les difficultés et les risques auxquels ils sont confrontés à chaque déplacement qu’elle effectue, depuis son entrée en fonction, dans les centres pénitentiaires ».
Les agressions à répétition alimentent la colère des gardiens de prison qui jugent leur profession dangereuse, mal payée et mal considérée. C’est l’agression de surveillants par un détenu djihadiste à Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais) le 11 janvier qui a mis le feu aux poudres. Depuis, une série d’agressions dans plusieurs établissements du pays a ravivé le sentiment de ras-le-bol.
Nouvelle agression dans le Pas-de-Calais
A la veille du blocage, la situation s’est tendue dans de nombreux établissements pénitentiaires. Un surveillant et une surveillante ont notamment été agressés avec un pied de table en fer par un détenu à la prison de Longuenesse (Pas-de-Calais), et ont été conduits à l’hôpital, dimanche, vers 18 h 30. « Ils ont de nombreuses contusions aux bras et sont touchés psychologiquement », a détaillé Yannick Lefebvre, du syndicat Ufap-Unsa à la prison de Longuenesse.
L’agresseur, un détenu de droit commun, a été placé en garde à vue, a expliqué le secrétaire interrégional FO pénitentiaire Julien Martin. « On est très choqué, ça ne va faire qu’amplifier la grogne et il y aura un durcissement demain à Longuenesse, a-t-il commenté. Les syndicats appellent à ne pas prendre les clefs demain à Longuenesse : on peut s’attendre à ce que ce soit les policiers qui viennent gérer l’établissement. »
Dimanche après-midi, toujours dans les Hauts-de-France, des dizaines de détenus dans les prisons de Maubeuge (Nord) et Sequedin (Nord) avaient refusé de regagner leur cellule après la promenade. La situation est redevenue normale en fin de journée.
Gouvernement et syndicats dans l’impasse
Ce rendez-vous intervient deux jours après que les surveillants ont rejeté un projet d’accord négocié avec le gouvernement. L’UFAP-UNSA, majoritaire (40 %), a fait savoir tard dans la soirée qu’après avoir interrogé ses militants, il ne signerait pas le texte. La CGT-Pénitentiaire (environ 15 %) avait déjà annoncé dans l’après-midi qu’elle ne le paraferait pas, évoquant des propositions « bien en deçà des attentes des collègues mobilisés, notamment en termes de reconnaissance et d’attractivité de [ses] missions de service public [indemnité et statut] et de l’insuffisance de création de postes proposés ».
Ce projet d’accord prévoyait notamment la création de 1 100 emplois de surveillant sur quatre ans, « dont une première tranche de 100 emplois dès 2018 » ; des mesures pour améliorer la sécurité des gardiens ; un régime de détention spécifique pour les « détenus terroristes et radicalisés ».
De son côté, FO-Pénitentiaire (environ 30 %), qui fait cavalier seul depuis le début du mouvement, a appelé à durcir le ton en appelant à des débrayages mais aussi à des « dépôts de clés », geste qui consiste pour les surveillants à ne pas prendre leur travail et à laisser, le cas échéant, les forces de l’ordre prendre le relais.