La voiture de demain va transformer le design automobile
La voiture de demain va transformer le design automobile
Par Éric Béziat
Une exposition consacrée au style automobile ouvre ses portes à Paris jusqu’au 4 février.
Bruno Le Maire, ministre de l’économie, dans la nouvelle Alpine 110 de Renault, le 14 décembre 2017, à Dieppe. / CHARLY TRIBALLEAU / AFP
C’est un petit événement à l’échelle de l’économie de la voiture mais il n’a pas d’équivalent ailleurs dans le monde. Le coup d’envoi du Festival automobile international version 2018 a été donné à Paris, mardi 30 janvier, avec la remise à l’Alpine A110, du prix de la plus belle voiture de l’année, en plus d’une dizaine d’autres récompenses.
Cette « fashion week du design automobile », pour reprendre l’expression de son président-fondateur Rémi Depoix (un négociant en blé passionné de belles voitures), est l’occasion pour le public d’admirer une rarissime exposition de 12 « concept cars » (80 ont été produits en 2017 dans le monde), ces véhicules uniques destinés à préfigurer le style à venir des marques auto et qui sont en général dévoilés lors des grands salons internationaux.
Les amateurs pourront apprécier, aux Invalides, à Paris, jusqu’au dimanche 4 février, la Mazda Vision Coupé (prix du plus beau concept car 2018), la Lamborghini Terzio Millenio ou encore la DS7 Crossback présidentielle, qui a descendu les Champs-Elysées avec le président Macron et qui ne pourra être ouverte par les visiteurs car elle contient des équipements électroniques sensibles.
Un univers nouveau et encore largement imprévisible
L’événement attire les designers des marques : l’équipe de Mazda au grand complet, Adrien Van Hooydonk, tête pensante du design du groupe BMW, ou encore Gerry McGovern, l’homme qui a refondé le style de Land Rover. Les occasions de se retrouver entre designers auto ne sont pas si fréquentes. Et cette année, les discussions risquent d’être animées.
Car comme le reste de l’industrie de la voiture, le monde du style automobile entre dans un univers nouveau et encore largement imprévisible : celui de la voiture électrique et autonome. Qui dit électrique, dit réduction considérable du volume du moteur avec toutes les conséquences et libertés stylistiques qui peuvent en découler. Qui dit autonome, dit aménagement intérieur entièrement repensé dans une voiture où, à terme, le chauffeur, son volant, son tableau de bord, seront amenés à disparaître.
La Renault Symbioz, voiture concept lauréate du prix de l’expérience créative décerné par le Festival, illustre cette évolution. Les équipes de recherche design de la marque au losange menées par Stéphane Janin et Laurens Van Den Acker, le patron du style Renault, ont conçu une voiture-salon dont les sièges pivotent. Elle peut même s’intégrer dans une maison à laquelle elle ajoute une nouvelle petite pièce cosy. On connaissait la voiture en tant que prolongement du moi, avec Symbioz, elle devient une extension du « chez moi ».
Inquiétude dans le monde du design auto
On peut citer aussi le cas de la Volkswagen Sedric, cabine cubique qui n’a plus ni volant ni pédale capable d’emporter quatre passagers. Avec ce modèle, la marque allemande s’affranchit de la forme classique de l’automobile (une partie avant prononcée et non habitable). « La silhouette de la plupart des futures automobiles ne devrait pas changer outre-mesure, relativise M. Depoix. Ne serait-ce que pour préserver la sécurité des passagers. »
Une inquiétude peut aussi surgir dans le monde du design auto. Avec la révolution technologique, les coûts de R&D sont appelés à exploser et à s’additionner : coût de recherche en matière de dépollution et d’hybridation, coût de développement en matière de logiciels et d’intelligence artificielle... Les constructeurs auront peut-être à faire des choix, éventuellement au détriment des investissements en matière de design.
L’angoisse des esthètes de l’automobile serait de revivre les années 1980-1990 « Une époque où on ne pensait que performance et quantité d’options, sans se soucier d’harmonie », se souvient M. Depoix. La frénésie high-tech fera-t-elle reculer le style ? Au Festival de l’automobile, on se rassure en se rappelant un chiffre magique : parmi les différents critères déclenchant l’acte d’achat d’une voiture, le design compterait pour 70 à 80%.