Washington proche du « shutdown »
Washington proche du « shutdown »
Le Monde.fr avec AFP et Reuters
Le Bureau de la gestion et du budget de la Maison blanche a annoncé jeudi qu’il se préparait à l’éventualité d’un nouveau « shutdown » si le Congrès ne vote pas une proposition de loi de financement d’ici minuit.
Les discussions budgétaires ont lieu jusqu’à minuit jeudi soir au Capitole américain pour tenter d’éviter le « shutdown ». / SAUL LOEB / AFP
Le gouvernement américain se préparait jeudi 8 février au soir à une paralysie de l’Etat fédéral à partir de vendredi, pour la seconde fois en trois semaines, faute d’un accord au Congrès sur un accord budgétaire crucial.
La direction du budget de la Maison Blanche « se prépare à une interruption des crédits », a dit un haut responsable de la Maison Blanche alors que le vote d’une proposition de loi par les deux chambres avant minuit paraissait de moins en moins probable.
La proposition, qui permet un financement de l’Etat jusqu’en 2019, doit être votée d’abord par le Sénat, où elle devrait avoir les 60 voix nécessaires sur 100, puis par la Chambre des représentants où l’opposition à ce compromis est plus importante.
Mais c’était sans compter avec le sénateur libertarien Rand Paul, qui a choisi de retarder le vote en s’exprimant longuement contre cet accord qui abroge jusqu’en 2019 le principe d’un plafond de la dette américaine.
Chômage technique
Sans vote, ce sera le « shutdown » : le gouvernement ne disposera plus de crédits et devra mettre au chômage technique des centaines de milliers de fonctionnaires. L’administration Trump avait vécu sa première paralysie le 20 janvier, déjà faute d’accord sur le budget. Elle avait duré trois jours.
Le chef de la majorité sénatoriale, Mitch McConnell, et son homologue démocrate, Chuck Schumer, avaient pourtant trouvé mercredi un terrain d’entente sur les montants des budgets 2018 et 2019, permettant au gouvernement de planifier à long terme ses dépenses et investissements.
L’accord offre à M. Trump la possibilité de tenir une des promesses de campagne, le gonflement du budget militaire, en augmentant le plafond de la dette jusqu’en mars 2019. L’accord est « trop important pour notre grande armée », a affirmé M. Trump sur Twitter. « Républicains et démocrates doivent soutenir nos soldats et soutenir cette loi! »
L’opposition démocrate a de son côté obtenu une augmentation comparable pour les portefeuilles non-militaires comme la lutte contre les opiacés, la couverture maladie des enfants pauvres, les investissements dans les infrastructures, ou une aide de 90 milliards de dollars pour les Etats ravagés par les ouragans et incendies en 2017. Au total, la hausse pourrait atteindre 300 milliards de dollars par an, de source sénatoriale.
Armée et classe moyenne
« Ce budget fait les deux, financer notre armée et la classe moyenne (qui a) depuis des décennies souffert d’une austérité inutile que le Congrès s’est lui-même imposée », a affirmé Chuck Schumer devant les sénateurs.
Le Congrès, contrôlé par les Républicains, veut ainsi voter six semaines de crédits, jusqu’au 23 mars, afin de donner du temps aux élus pour transcrire l’accord budgétaire en proposition de loi.
Mais certains parlementaires grincent des dents. Des républicains estiment que le texte va considérablement augmenter la dette du pays, alors qu’une loi sur une baisse massive des impôts a été votée en décembre. « Je n’ai pas encore décidé », a affirmé le représentant de la droite radicale Ted Yoho sur CNN. « Est-ce qu’on s’occupe de l’immédiat ou est-ce qu’on regarde à long terme ? », s’est-il interrogé.
Les démocrates grondent car il ne mentionne pas la régularisation à terme des centaines de milliers de clandestins appelés « Dreamers » (rêveurs). L’opposition veut lier le sort de ces jeunes entrés illégalement dans le pays alors qu’ils étaient enfants à un accord budgétaire, ce qui avait déjà mené au « shutdown » il y a trois semaines.
Les « Dreamers » étaient protégés de toute expulsion par le programme Daca, créé en 2012 par l’ancien président Barack Obama. Donald Trump a abrogé le décret de son prédécesseur et a donné au Congrès jusqu’au 5 mars pour trouver une issue législative.
La cheffe des démocrates à la Chambre, Nancy Pelosi, a prévenu qu’elle voterait non si un débat sur l’immigration n’était pas mis à l’ordre du jour. Elle s’est exprimée mercredi dans l’hémicycle pendant huit heures et sept minutes – un record – en lisant des témoignages de « Dreamers ». « Les deux partis sont vraiment engagés pour trouver une solution au défi du Daca », a rassuré jeudi le président de la Chambre des représentants, le républicain Paul Ryan, affirmant : « nous présenterons une solution que le président signera ».