Haïti : l’ONG Oxfam accusée d’avoir engagé des prostituées après le séisme en 2010
Haïti : l’ONG Oxfam accusée d’avoir engagé des prostituées après le séisme en 2010
Le Monde.fr avec AFP
Le gouvernement britannique réclamant une « enquête complète et urgente » sur ces accusations de scandale sexuel révélées par le « Times ».
Oxfam a assuré avoir lancé immédiatement, en 2011, une enquête interne. Quatre employés ont été licenciés et trois autres ont démissionné, dont Roland van Hauwermeiren, avant la fin de cette enquête. / PETER NICHOLLS / REUTERS
L’organisation humanitaire Oxfam était dans la tourmente après des révélations du Times publiées vendredi. Selon le quotidien britannique, des employés d’Oxfam, confédération d’organisations humanitaires dont le siège se trouve à Oxford, ont engagé de jeunes prostituées en 2011 à Haïti au cours d’une mission consécutive au séisme qui avait ravagé le pays en 2010.
La secrétaire d’Etat du développement international, Penny Mordaunt, a annoncé qu’elle s’entretiendrait, lundi 12 février, avec des responsables de l’ONG. « Je leur donne l’occasion de me dire en personne ce qu’ils ont fait après ces événements et je vais voir s’ils démontrent les qualités morales dont je pense qu’ils ont besoin », a déclaré, la veille, Mme Mordaunt, interrogée par la BBC. « S’ils ne transmettent pas toutes les informations, je ne travaillerai plus avec eux », a-t-elle prévenu.
Oxfam reçoit « moins de 10 % de son financement total » du département britannique chargé du développement international, a fait savoir samedi son PDG, espérant continuer à travailler avec le gouvernement. Pour la ministre, Oxfam « a pris tout à fait la mauvaise décision » en omettant de transmettre en détail la nature des accusations visant ses employés aux autorités et à la Commission caritative, institution britannique qui contrôle les organisations humanitaires.
Enquête interne
Selon le Times, des groupes de jeunes prostituées étaient invitées dans des maisons et des hôtels payés par Oxfam. Une source citée par le quotidien dit avoir vu une vidéo d’une orgie avec des prostituées portant des tee-shirts d’Oxfam.
Le quotidien affirme, en outre, qu’Oxfam n’a pas prévenu d’autres ONG du comportement des employés impliqués dans ce scandale, ce qui leur a permis d’obtenir par la suite des missions auprès de personnes vulnérables dans d’autres zones de catastrophes naturelles. Ainsi, le Belge Roland van Hauwermeiren, 68 ans, contraint de démissionner, comme l’a confirmé Oxfam, de son poste de directeur pour Haïti de l’organisation après avoir admis avoir engagé des prostituées, est devenu chef de mission pour Action contre la faim au Bangladesh de 2012 à 2014. ACF avait contacté Oxfam avant de recruter Roland van Hauwermeiren, mais l’ONG ne lui avait pas donné les raisons de sa démission, a déclaré Mathieu Fortoul, porte-parole d’ACF.
Oxfam a assuré avoir lancé immédiatement, en 2011, une enquête interne. Quatre employés ont été licenciés et trois autres ont démissionné, dont Roland van Hauwermeiren, avant la fin de cette enquête.
« Allégations très graves »
La Commission caritative a dit dans un communiqué avoir reçu un rapport d’Oxfam en août 2011. Ce rapport mentionnait des « comportements sexuels inappropriés, des faits d’intimidation, de harcèlement et d’intimidation du personnel » mais n’évoquait pas des « abus portant sur des bénéficiaires » de l’ONG ni de « potentiels crimes sexuels impliquant des mineurs ». « Notre approche aurait été différente si tous les détails mentionnés par la presse nous avaient été communiqués à ce moment-là », écrit la Commission, qui a demandé à Oxfam de fournir des informations supplémentaires « de toute urgence ».
Des informations jugées « vraiment choquantes » par Downing Street. « Nous voulons qu’Oxfam fournisse toutes les preuves qu’ils ont des événements à la Commission caritative pour une enquête complète et urgente sur ces allégations très graves », a dit un porte-parole de la première ministre.
« Nous présentons sans réserve nos excuses »
Dans un communiqué diffusé dimanche, la nouvelle présidente du conseil d’administration d’Oxfam, Caroline Thomson, a annoncé un ensemble de mesures visant à renforcer la prévention et le traitement des affaires d’abus sexuels. « Nous avons honte de ce qui s’est passé. Nous présentons sans réserve nos excuses », a déclaré Caroline Thomson.
La présidente du conseil d’administration a assuré qu’Oxfam avait fait de « grands progrès » depuis 2011 et s’est engagée à en faire davantage encore, en particulier dans le recrutement du personnel. « Nous continuerons de nous attaquer aux problèmes culturels sous-jacents qui ont permis ce comportement », ajoute-t-elle. Oxfam a « maintenant une culture d’ouverture et de transparence et nous tirons pleinement les leçons des événements de 2011 ».