Un pic de pollution « grave » s’installe sur Paris et l’Ile-de-France
Un pic de pollution « grave » s’installe sur Paris et l’Ile-de-France
Par Stéphane Mandard
Les conditions anticycloniques et la baisse des températures font craindre une intensification de l’épisode. La mairie de Paris demande à l’Etat d’activer la circulation différenciée.
Vue de la tour Eiffel lors d’un pic de pollution en décembre 2016. La pollution de l’air est à l’origine de 42 000 morts prématurées chaque année. / THOMAS SAMSON / AFP
Il y a des télescopages dont seule l’actualité a le secret. Le jour où le tribunal administratif de Paris a annulé la fermeture à la circulation des voies sur berge rive droite, un pic de pollution intense a débuté sur Paris et l’Ile-de-France. Et selon les prévisions d’Airparif, l’organisme de surveillance de la qualité de l’air, il devrait s’installer durablement et se renforcer la semaine prochaine en raison de la baisse des températures et du maintien de conditions anticycloniques.
Mercredi 21 février, le niveau de pollution aux particules fines PM10 (de diamètre inférieur à 10 µm) a atteint des niveaux compris entre 60 et 65 µg/m3 en vingt-quatre heures dans le centre de Paris avec des pointes à 100 µg/m3 en bordure de périphérique, soit le double du seuil réglementaire. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande de ne pas dépasser une exposition à 50 µg/m3 plus de trois jours par an. Les trois jours consécutifs de dépassement seront atteints dès vendredi, et samedi s’annonce particulièrement compliqué avec le chassé-croisé vers les stations de ski.
« L’effet cloche »
« L’épisode actuel est caractérisé par des particules très fines (essentiellement inférieures à 2,5 µm) », précise Airparif. Les PM2,5 sont particulièrement nocives car elles pénètrent profondément dans l’organisme et sont mises en cause dans l’augmentation du risque d’infarctus et d’accidents vasculaires cérébraux. « D’après leur composition, ajoute l’organisme, elles proviennent principalement du trafic et de l’agriculture [épandage d’engrais] et sont davantage présentes à proximité des axes routiers avec des concentrations 5 à 20 % plus élevées. »
La pollution observée en début d’épisode a été « majoritairement importée » sur l’Ile-de-France, constate Airparif. Ces derniers jours, le vent de nord-est a ainsi ramené la pollution élevée installée sur une grande partie nord-est de l’Europe (Allemagne, Benelux et Pologne, qui a été condamnée jeudi par la justice européenne pour ses dépassements réguliers des seuils de PM10 en raison notamment de ses centrales à charbon).
Un facteur aggravant risque de s’ajouter la semaine prochaine si les prévisions météorologiques se confirment. D’une part, le maintien de conditions anticycloniques pourrait renforcer « l’effet cloche » en créant un réservoir des polluants émis localement. D’autre part, la baisse annoncée des températures devrait conduire les Franciliens à se chauffer davantage. Or le chauffage, particulièrement au bois, est une source importante de particules fines.
« On ne voit pas de basculement de sortie d’épisode »
« Il y a un risque la semaine prochaine, confie-t-on à Airparif. On ne voit pas de basculement de sortie d’épisode. » Le dispositif expérimental de mesure des PM2,5 grâce à des microcapteurs embarqués sur des véhicules sillonnant Paris confirme cette crainte : l’indice moyen de qualité de l’air a triplé en quarante-huit heures et continue de grimper bien au-delà des limites fixées par l’OMS.
« Le pic de pollution est grave et il se poursuivra si nous n’agissons pas maintenant, a déclaré jeudi Bruno Julliard, le premier adjoint de la maire de Paris. Avec Anne Hidalgo, nous demandons à l’Etat de prendre les mesures nécessaires, au premier rang desquelles dès demain la circulation différenciée [sur la base des vignettes Crit’Air] en interdisant les véhicules les plus polluants. »
Après deux jours de pollution intense, la préfecture avait seulement décidé de réduire de 20 km/h la vitesse maximale autorisée et recommandait aux Franciliens de « limiter, dans la mesure du possible, les déplacements en voiture ». Une préconisation qui ne s’applique pas qu’aux voies sur berge.