La Nouvelle-Aquitaine aide les entreprises à recruter
La Nouvelle-Aquitaine aide les entreprises à recruter
Par Adrien de Tricornot
La reprise, ainsi que la transformation des métiers, obligent à reconsidérer l’offre de formation et la mobilité. Le point sur les synergies développées dans la région, à l’occasion d’O21 / s’orienter au 21 siècle à Bordeaux, les 2 et 3 mars.
Le logo de la région Nouvelle-Aquitaine est projeté sur la façade du Conseil régional, à Bordeaux, le 17 décembre 2016. / GEORGES GOBET / AFP
Au séminaire « Recruter ! » organisé au centre régional Vincent-Merle - Cap Métiers à Pessac, lundi 22 janvier, les participants issus des branches professionnelles et des entreprises s’accordaient pour dire que, dans la région, « la difficulté à embaucher est supérieure à la difficulté à licencier » : « On cherche des chaudronniers avec de beaux salaires, des spécialistes du numérique et des métiers industriels, des personnels du bâtiment ou de la couverture, et on n’en trouve pas même là où le chômage est élevé. On croise en permanence des entreprises qui ont trois ou quatre emplois vacants », explique Thierry Alves, directeur général adjoint du pôle formation et emploi de la région Nouvelle-Aquitaine.
Une bonne nouvelle, à condition de trouver la clé. Car la reprise de l’emploi et la mutation en cours de nombreux métiers liée au numérique posent de sérieux défis de formation, de mobilité et de cohésion entre les territoires. Forums de recrutements, partenariat avec Pôle emploi, qui a formé 350 conseillers à l’accompagnement du recrutement des entreprises, service numérique d’offres d’emplois, politique de formation et de promotion des métiers en tension, pôles d’excellence mêlant recherche et formation… La région multiplie les initiatives pour aider les entreprises à recruter, mais aussi à trouver des solutions pour la mobilité.
Besoin d’ingénieurs
A Cap Métiers, un fab lab est disponible pour le public, et des expositions présentent les emplois d’aujourd’hui : souvent des métiers industriels moins pénibles et plus high-tech que leur réputation ne le laisse supposer. « Il faut montrer ce que sont devenus les métiers. Et aussi proposer de beaux lycées professionnels pour que les familles aient envie de les visiter et valorisent ces filières », explique Alain Rousset, président de la région. « Un chaudronnier a plus de chances de trouver du travail qu’un bac + 4 en psycho », appuie Jean-Louis Nembrini, ancien recteur, chargé des lycées à la région.
Créé en 2011 à Latresne, le pôle de formation à la maintenance aéronautique Aerocampus s’en veut une illustration. Il propose donc des formations initiales du bac pro jusqu’au BTS et des formations continues. La bonne santé du secteur aéronautique, le déménagement d’activités de Dassault ou la création d’un vaste campus industriel par Thales, à Mérignac, ont amené plusieurs centaines d’emplois sur le territoire.
Et les compétences, très recherchées, viennent à se faire rares. « Thales a déménagé son centre de R&D en avionique à Mérignac, et il y a un besoin plus général d’ingénieurs dans la région bordelaise », confirme Véronique Bonnet, directrice générale de l’école d’ingénieurs ESME Sudria, qui a ouvert à la rentrée son campus de Bordeaux. « Notre première promotion compte 53 élèves, et nous avons déjà beaucoup de sollicitations d’entreprises de la région qui nous demandent des stagiaires ! Je ne doute pas qu’on aura de quoi proposer des emplois et alimenter les entreprises en profils qu’elles recherchent d’ici trois à quatre ans », poursuit-elle. Elle note que le territoire « a fait beaucoup d’efforts pour avoir une nouvelle dynamique économique avec des pôles de compétitivité dans les biotechs, les lasers ou l’aéronautique ».
Approche par les compétences
Face aux tensions de recrutement, Frédéric Toubeau, directeur régional de Pôle emploi, incite d’ailleurs les entreprises à utiliser davantage une approche par les compétences pour trouver les profils qu’elles recherchent plutôt que de ne s’appuyer que sur les seuls diplômes. Souvent, les PME n’ont cependant pas accès aux outils de ressources humaines ou manquent de temps : « Les entreprises ne sont pas toutes structurées pour anticiper ce que seront leurs besoins de personnel dans un, deux ou trois ans. Les situations d’urgence, c’est le quotidien de ce à quoi on va être confrontés dans la région Nouvelle-Aquitaine », redoute Gérard Bourgès, directeur des ressources humaines de Lim Group, spécialisé dans la maroquinerie de luxe.
Ce groupe est notamment propriétaire de CWD, le leader mondial des selles de cheval de luxe et sur mesure basé à Nontron, en Dordogne, lequel a pris le problème à bras le corps. Voici cinq ans, CWD a créé sa propre école, qui forme chaque année une dizaine de selliers et soixante commerciaux. « La première année, nous cherchions des candidats ayant déjà une expérience dans le cuir ou la couture. Nous avons vu qu’il fallait élargir le spectre et que des gens de tous âges ou de toutes professions, en étant motivés, pouvaient adopter ce métier de passion », explique Gérard Bourgès.
L’ensemble de cette filière retrouve d’ailleurs des couleurs, ce qui bénéficie à l’emploi. Ainsi le fabricant de ballerines et de chaussures Repetto est confronté à de fortes difficultés de recrutement depuis 2012 sur son site historique de Saint-Médard-d’Excideuil, dans le Périgord : « Les dirigeants de Repetto m’ont appelé pour me dire qu’ils se développaient mondialement, mais qu’ils ne trouvaient pas de main-d’œuvre pour leur activité de cuir retourné », se souvient Alain Rousset.
Formation continue
Le risque de délocalisation a poussé la région à investir et à ouvrir, en 2014, une formation professionnelle dans le cadre du lycée Porte-d’Aquitaine, à Thiviers, en Dordogne, qui forme aussi chômeurs et salariés, notamment pour d’autres acteurs de la filière comme Hermès : à la clé, plusieurs centaines d’emplois créés et la formation continue des salariés en poste. De quoi réjouir Alain Rousset, qui plaide pour « l’attractivité par la formation » sur son territoire.
« Anticiper, ce n’est pas une science exacte. Si l’on se fie à la loi de l’offre et de la demande, il est déjà trop tard », explique-t-il cependant. Créer une nouvelle formation se prévoit en effet plus de trois ans à l’avance : le temps de la concevoir, de la financer, d’aménager le plateau technique, de former les enseignants… Ce qui incite à un dialogue de tous les acteurs, à la fois pour développer des filières d’excellence et pour faciliter la mobilité vers les métiers et les territoires qui savent déjà qu’ils devront recruter.
Une région attractive et dynamique
Née en 2016 de la fusion de l’Aquitaine, du Limousin et de Poitou-Charentes, la région Nouvelle-Aquitaine s’étend sur un territoire plus grand que celui de l’Autriche. Ses 5,8 millions d’habitants forment une population comparable à celle du Danemark. Elle compte 11 villes de plus de 100 000 habitants, plus de 37 000 apprentis et plus de 180 000 étudiants. Elle accueille onze pôles de compétitivité. Pôle emploi y recense 30 000 emplois de plus qu’avant la crise de 2008. En 2017, les recrutements de cadres ont progressé de 20 %, selon l’Association pour l’emploi des cadres. Sur la façade maritime, l’emploi a été le plus dynamique… mais le chômage reste aussi plus élevé dans ces zones en croissance démographique. Les demandeurs d’emploi y sont aussi plus diplômés qu’avant la crise : 45 % d’entre eux avaient au moins le niveau bac en juin 2017, contre 27 % en 2007.
Participez à « O21 / S’orienter au 21e siècle »
Pour aider les 16-25 ans, leurs familles et les enseignants à se formuler les bonnes questions lors du choix des études supérieures, Le Monde organise la seconde saison d’« O21 / S’orienter au 21e siècle », avec cinq dates : après Nancy (1er- 2 décembre), Lille (19 - 20 janvier), Nantes (16-17 février), rendez-vous à Bordeaux (vendredi 2 et samedi 3 mars 2018, au Rocher de Palmer à Cenon) et Paris (samedi 17 et dimanche 18 mars 2018, à la Cité des sciences et de l’industrie).
Dans chaque ville, les conférences permettent au public de bénéficier des analyses et des conseils, en vidéo, d’acteurs et d’experts, et d’écouter et d’échanger avec des acteurs locaux innovants : responsables d’établissements d’universités et de grandes écoles, chefs d’entreprises et de start-up, jeunes diplômés, etc. Des ateliers pratiques sont aussi organisés.
Ils restent des places pour O21 Bordeaux ! Et les pré-inscriptions sont possibles pour O21 Paris.
En images : les temps forts d’O21, nos conférences pour s’orienter au 21e siècle, à Nancy
Pour inscrire un groupe de participants, merci d’envoyer un e-mail à education-O21@lemonde.fr. L’éducation nationale étant partenaire de l’événement, les lycées peuvent organiser la venue de leurs élèves durant le temps scolaire.